Articles et conférences scientifiques relatives au trauma ou au trouble de stress post-traumatique

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Message par câlin Dim 11 Fév 2024 - 20:14

C'est un sujet important et il a déjà été abordé plusieurs fois sur ZC, plutôt sous l'angle du vécu, de la gestion du trauma et des techniques de guérison. J'aimerais aussi comprendre comment ça fonctionne d'un point de vue mécanique, quel est l'état de la connaissance scientifique actuelle sur le sujet. Quel est le consensus scientifique ? Quelles sont les théories encore controversées ?

Pour commencer :

(Notions fondamentales sur le cerveau :
https://www.neurosciences.asso.fr/wp-content/uploads/2020/01/FichesCerveau-notions-fondamentales.pdf)

Conférence sur le stress traumatique du Dr Catherine Verney lors de la semaine du cerveau 2022 :
Conf de Catherine Verney:

Quelques messages de la conférence :
Sur le stress en général :
1) Contre le stress, respirer c'est super.
2) Le besoin premier d'un bébé, plus que la faim, c'est la sécurité (théorie de l'attachement).
3) Il existe deux types de mémoire, consciente (ex. souvenirs) et inconsciente (ex. conditionnement, automatismes). Une partie de la mémoire émotionnelle est implicite (inconsciente) et passe par l'amygdale.
4) Le stress peut se transmettre d'une génération à une autre (épigénétique), mais c'est réversible.
5) Le stress nous fait agir par automatisme, ce qui empêche de trouver une porte de sortie.
6) Ne rien faire (rêvasser, marcher dans la nature, écouter de la musique) est extrêmement bon pour sortir de ses habitudes.
Sur le stress post-traumatique :
1) Il y a deux types de réaction face au trouble de stress post-traumatique (qui peuvent osciller) : _ une avec une absence d'émotions et des flash-back _ une autre avec une hyperémotionnalité et une dissociation
2) Les conséquences physiologiques sont une hypertrophie de l'amygdale (hypervigilance) et une hypotrophie du cortex préfrontal (sidération, inaction) et de l’hippocampe (non remplacement par d'autres mémoires).
3) Plus on agit vite après un trauma, plus on a de chance d'empêcher les mémoires de peur de s'enraciner dans la mémoire à long terme.
4) Toutes les techniques de gestion du stress permettent de revisiter les mémoires et avec la plasticité cérébrale de modifier le cerveau. C'est le principe de l'EMDR qui permet de réécrire les mémoires traumatiques.
5) La musique, le chant, le théâtre et la danse soignent. Il faut s'amuser (ça renforcer les connexions neuronales).

Ce qui me surprend dans cette vidéo c'est qu'elle ne fait pas de différence, ou elle n'explique pas la différence entre le petit stress et le stress traumatique. Il semblerait que ce qui compte n'est pas l'horreur de l'évènement, mais plutôt la réaction neuronale, et dès lors qu'elle passe par l'amygdale, qu'elle implique une sidération, et que l'évènement finit par s'inscrire dans la mémoire à long terme, l'évènement est de nature traumatique. Il y aurait des différences de degré, mais pas obligatoirement de différence de nature entre les petits et les gros stress.

Elle a parlé exclusivement de la mémoire implicite (mémoire de la peur). Mais qu'en est-il de de la mémoire consciente ? Est-ce que l'amnésie traumatique s'explique neuronalement ? D'où viennent les flash-back ? Qu'est-ce que la dissociation ? J'espère que des prochains posts répondront à ces questions.

Ce qui semble être la clé est la confiance dans sa capacité à gérer une situation. Si le stress se résout par l'action (la fuite ou le combat), il est possible d'y prendre du plaisir et dans ce cas c'est du bon stress stimulant. Le mauvais stress est celui contre lequel il est impossible de faire face et qui créé un état de sidération. Une fois les circuits neuronaux de la peur et de la sidération empruntés, ils peuvent se renforcer et devenir des automatismes, des autoroutes neuronales. Tout l'enjeu est d'apprendre au cerveau qu'il est capable de réagir à la situation, être stimulé et prendre du plaisir. Pour cela, il faut d'abord sortir du déni ou de l'action, faire un pas de côté, rêvasser, chanter, danser.

Si vous préférez lire il y a aussi un article :
Anatomie et physiologie du stress traumatique
https://www.medecinesciences.org/fr/articles/medsci/full_html/2021/09/msc200619/msc200619.html

Avec une belle image résumé des traitements possibles:


câlin

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Message par My_illusion Sam 9 Mar 2024 - 5:50

Sujet intéressant mais je n'ai encore rien à ajouter, encore moins un consensus.
Le sujet est plus développé du côté anglophone. En France et en Belgique c'est encore assez maigre en formations.
La psylocibine est à ajouter dans les voies de traitement en cours d'essai.

Je pense qu'il faut aller regarder du côté des IRM fonctionnelles pour mieux comprendre les modifications neuronales.

Et en effet, ce n'est pas l'événement qui fait le traumatisé mais sa sensibilité à l'évènement.

Ça manque de thérapeutiques efficaces à long terme. Et du coup de résultats probants...

My_illusion

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Message par bepo Lun 11 Mar 2024 - 11:18

Peut être que mes références datent, mais j'en étais resté au fait que l'EMDR est une fumisterie. J'ai du coup du mal à faire confiance à un spécialiste qui évoque l'EMDR.

Edit : un article de 2008, de Nicolas Gauvrit sur l'EMDR.
https://www.afis.org/L-EMDR-ca-marche-meme-si-on-ne-bouge-pas-les-yeux
Résumé : en gros l'EMDR serait une TCC re-logo-tée avec de gros relents de désinformation.
Nicolas Gauvrit que l'on connait pour son approche rationnelle du concept du surdoué, qui m'avait laissé une très bonne impression, et dont l'article suscité m'apparait très sain, qui plus est sur un site en lequel j'ai confiance AFIS.
Bref cela laisse penser que la conférencière réalise là un chalutage (les chaluts connus pour réaliser une pèche non sélective caractérisée plus par la brutalité que la finesse)  non spécifique d’informations relatives au SSPT. Donc probable nécessité de réaliser un tri ultérieur.

bepo

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Message par câlin Lun 11 Mar 2024 - 12:39

My_illusion a écrit:Ça manque de thérapeutiques efficaces à long terme. Et du coup de résultats probants...

Le tableau en montre un certain nombre quand même, toutes les essayer doit prendre au moins plusieurs années...

bepo a écrit:Peut être que mes références datent, mais j'en étais resté au fait que l'EMDR est une fumisterie. J'ai du coup du mal à faire confiance à un spécialiste qui évoque l'EMDR.

Non non l'EMDR est efficace pour traiter les troubles de stress post-traumatiques. Je ne sais pas d'où tu tiens tes références, en tapant "EMDR" dans Google Scholar tous les articles sur lesquels je tombe montrent l'efficacité de l'EMDR, et ça commence dès les années 2000.

Pour ce qui est du long-terme pour l'EMDR, j'ai trouvé cet article (avec accès seulement à quelques extraits disponibles et pas référencé dans sci-hub) :

Treatment of post-traumatic stress disorder with eye movement desensitization and reprocessing: Outcome is stable in 35-month follow-up

https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0165178107003745

Ils disent qu'après 35 mois, 60% des patients ne sont plus diagnostiqués comme ayant un trouble de stress post-traumatique selon les critères du DSM-IV, et les résultats sont stables dans le temps :

l'article a écrit:Le résultat le plus important de cette étude est la réponse positive à l'EMDR chez 60 % des patients (perte de diagnostic), avec une amélioration des scores sur l'échelle de fonctionnement général et une diminution des symptômes d'anxiété et de dépression à 35 mois de suivi. Les effets immédiats du traitement sur les variables de résultats primaires et secondaires sont restés stables dans le temps et, à 35 mois, la capacité de travail a été rétablie chez la plupart des patients (de 20 % de tous les sujets avant le traitement à 60 % à 35 mois).

Il y a aussi beaucoup d'articles qui comparent l'EMDR aux thérapies comportementales et cognitives et en général concluent que les deux sont à peu près aussi efficaces dans le traitement du trouble de stress post-traumatique.

Cette méta-analyse me semble un bon résumé de ce qu'on sait de l'EMDR

25 years of Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR): The EMDR therapy protocol, hypotheses of its mechanism of action and a systematic review of its efficacy in the treatment of post-traumatic stress disorder

https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2173505018300086#fig0010

À propos des premières études dans la conclusion ils disent :

l'article a écrit:Il convient de souligner que les premières études sur l'EMDR ont été critiquées en raison d'aspects liés à la méthodologie utilisée64 . Il s'agit principalement de l'absence de groupe de contrôle pour isoler l'éventuel effet placebo de l'intervention25, 65 , de l'absence d'évaluations en double aveugle45 , de l'utilisation exclusive de mesures fournies par des auto-rapports et de l'ambiguïté concernant la sévérité et le diagnostic de l'ESPT. Les cliniciens spécialisés dans l'EMDR11 ont également souligné certains facteurs susceptibles d'avoir entravé l'observation des effets positifs du traitement. Il s'agit notamment du nombre insuffisant de séances d'EMDR25, 43, 66 et/ou de l'administration de la psychothérapie par des professionnels qui manquent de formation41 ou qui n'ont pas suivi correctement le protocole. Des études plus récentes ont tenté de surmonter ces problèmes méthodologiques et la qualité méthodologique s'est améliorée en général, de même que les critères proposés dans des domaines de plus en plus cliniques pour l'EMDR. Des branches de comparaison avec des techniques spécifiques sont désormais incluses, ainsi que des entretiens cliniques et des rapports standardisés auto-complétés pour évaluer les symptômes51, 53 , des évaluateurs aveugles quant aux conditions d'intervention49, 50 et des professionnels qualifiés ayant une formation et des années d'expérience dans l'utilisation de l'EMDR.44

Comme toute technique nouvelle elle s'améliore avec le temps avec l'expérience des thérapeutes.

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Message par My_illusion Lun 11 Mar 2024 - 17:06

Le temps (et/ou un simple changement de vie) à lui tout seul diminue le PTSD…

EMDR ne serait efficace que pour des traumas uniques très précis dans le temps, pas sur la durée, et pas pour un trauma complexe, pas pour des traumas ayant façonné la personnalité de l’enfant.

Les thérapeutiques proposées ne prennent pas des années à être tentées.

Faut pas tout mettre dans un même sac, c’est plus compliqué que de parler « du trauma ».

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Message par câlin Lun 11 Mar 2024 - 18:59

My_illusion a écrit:Les thérapeutiques proposées ne prennent pas des années à être tentées.

Soit la thérapie est profondément inefficace et dans ce cas elle sera arrêtée assez rapidement, dans ce cas ça vaut le coup de changer de type de thérapie ou de réessayer la même avec un autre psy. Soit la thérapie est efficace rapidement et dans ce cas c'est gagné. Soit la thérapie est moyennement efficace et dans ce cas c'est toujours bon de continuer tant que ça progresse, et alors c'est tout à fait possible de faire une vingtaine ou une trentaine de séances d'EMDR, à raison de une toutes les deux à quatre semaines, ça peut durer plus d'un an. C'est pareil pour une thérapie comportementale et cognitive, et si on essaye les 7 types de thérapies non-médicamenteuses, comme ça prend du temps de trouver le bon psy, et que c'est aussi intéressant de temps en temps de faire des pauses de psy, ça peut largement durer plusieurs années avant d'avoir épuisé les possibilités.

En tout cas je n'ai jamais croisé personne qui ait tout essayé.

My_illusion a écrit:EMDR ne serait efficace que pour des traumas uniques très précis dans le temps, pas sur la durée, et pas pour un trauma complexe, pas pour des traumas ayant façonné la personnalité de l’enfant.

L'EMDR est jugé moins efficace pour les traumas complexes, mais il est efficace tout de même. On a un peu moins de recul par rapport aux traumas complexes, il y a encore des recherches pour savoir quelle serait la manière optimale d'effectuer la thérapie, mais la plupart des études tendent à montrer que ça fonctionne.

Par exemple dans cette revue de la littérature ils disent :

The Current Status of EMDR Therapy Involving the Treatment of Complex Posttraumatic Stress Disorder

https://connect.springerpub.com/content/sgremdr/13/4/284.full

l'article a écrit:Plus récemment, une étude sur l'efficacité du traitement de l'ESPT centré sur le traumatisme chez les patients atteints de schizophrénie ou de psychose a montré que la thérapie EMDR était efficace (Van den Berg et al., 2015). Des antécédents d'abus sexuels ont été signalés par 67 % de l'échantillon, et 36,4 % des personnes traitées par EMDR ont identifié de multiples incidents d'abus sexuels dans l'enfance avant l'âge de 12 ans. À l'issue des huit séances de traitement, 60 % des participants à l'EMDR ont perdu leur diagnostic d'ESPT. Ces effets sont restés stables après 12 mois de suivi (Van den Berg et al., 2018).

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