Suis je concernée ? Comment et où se faire diagnostiquer sérieusement sur Paris ?

Bonjour à tous,

Je me présente, je suis une jeune femme d'une trentaine d'années habitant à Paris et qui, depuis quelques mois, se demande si elle aussi, elle ne serait pas, vous voyez quoi ... Je m'étais intéressée il y a plus d'un an au sujet et je l'avais écarté mais j'y suis revenue récemment et j'ai vu les choses différemment, j'ai compris des choses que je n'avais peut-être pas réalisé jusqu'à lors. Je suis plutôt une dure à cuire donc je ne me suis jamais vue comme une "hypersensible", par exemple. Mais, en fait, si : il m'arrive très (très) souvent de voir et de remarquer des choses que les autres ne voient pas, à ma plus grande surprise ("ah bon, tu n'as pas vu que le serveur a fait un petit signe à son collègue ??", "comment ça tu n'as pas remarqué que.. ??", "tu n'as pas vu que le petit symbole correspondait à ça ??" etc.), de sentir des odeurs que personne ne sent, d'être gênée par des bruits répétitifs, des alarmes (il y a une alarme qui se déclenche parfois dans mon quartier et qui me rend dingue alors je note sur un papier les jours et les heures à laquelle elle sonne pour essayer de trouver d'où elle vient...). J'écris beaucoup et on me dit très souvent que mon style est très imagé, qu'on "s'y croit" en lisant mes descriptions parce que je relève plein de détails, de gestes, de couleurs particuliers. J'ai aussi une vision très globaliste, systémique des choses, j'ai un très grand sens du collectif car j'ai besoin que les gens autour de moi soient heureux et bien pour pouvoir être bien. Mais je ressens aussi très régulièrement le besoin d'être seule, sans personne qui me parle ni me sollicite, sans aucun stimuli sensoriel et je pars souvent en voyage seule, dans un pays étranger et, dans ces moments là, je me sens profondément libre et apaisée (enfin !).

Je m'intéresse très intensément à des choses pendant une période donnée et puis je passe à autre chose quand j'ai le sentiment d'avoir compris dans les grandes lignes (j'ai passé un été à lire et annoter la Bible pour essayer de "comprendre" ; j'ai eu une autre période pendant lesquelles je lisais des bouquins de physique quantique et, en ce moment, je lis plein de choses sur l'histoire de l'humanité, les rapports entre homo sapiens et Néandertal etc.). Je suis curieuse de tout à tel point que mes amis me charrient avec ça et je leur dis souvent que "tout est intéressant quand on s'y intéresse". J'ai aussi beaucoup de mal à comprendre le fonctionnement de la plupart des gens : ce qu'ils font ne me paraît pas logique, pas sensé et, pour tout dire, je les trouve souvent bêtes et mous. La plupart des conversations m'ennuient, dans les soirées par exemple, j'ai l'impression que les gens redécouvrent la lune et me la montrent et ça m'agace parce que moi, ça fait 15 ans que je l'ai remarqué. Je fais tout très vite, je suis très résiliente, je m'épanouis quand je suis sous pression et que j'ai dix mille trucs à faire en même temps.

Mais il y a aussi beaucoup de choses apparemment typiques de la précocité dans lesquelles je ne me reconnais pas du tout : je n'ai jamais eu de problème à l'école par exemple. Certes, je m'ennuyais un peu et je bavardais beaucoup mais j'étais heureuse dans le système scolaire, j'avais des copains et des notes plutôt bonnes sans trop travailler (autour de 13-15/20). J'ai aussi une bonne confiance en moi : je suis très exigeante et perfectionniste, les challenges me motivent, mais je connais mes limites, je suis lucide sur ce que je sais faire et sur ce que je ne sais pas faire et je ne me mets jamais la barre trop haute pour être ensuite déçue de moi. Je n'ai pas non plus besoin de changer de boulot tous les six mois, je suis dans la même boite depuis 10 ans et je fais le même métier (mais bon, en même temps, je suis journaliste donc généraliste et touche à tout et j'ai un poste à responsabilité, donc avec des challenges quotidiens...).

Bref, je suis un peu perdue ! En plus, je suis partagée sur le concept même d'adulte surdoué : je me dis d'un côté que c'est une étiquette un peu débile, un concept que les gens se sont inventés pour se mettre dans une case, se rassurer et se distinguer de la masse et que ça n'existe pas vraiment. Et, en même temps, depuis que j'y pense, ça m'obsède et je sens bien que ça m'apaise de me dire "ah mais en fait c'est normal, je suis comme ça, ça ne sert à rien de lutter tous les jours contre".

Est ce que la précocité est établie de manière biologique, certaine ? Est ce que, vraiment, quand on est précoce, on est fondamentalement différent des autres, dans les gènes, les cellules, l'ADN ? Est ce que ce n'est pas aussi une question d'éducation et d'expériences qu'on a pu avoir ?

L'un d'entre vous a-t-il des liens vers des références sérieuses, des articles de chercheurs ou de journalisme approfondi et enquêté ? Et, surtout, j'aimerais bien pouvoir en discuter avec un(e) psy vraiment spécialiste du sujet : auriez vous des professionnels sérieux et de confiance que vous pourriez me recommander ? Merci par avance pour vos réponses et conseils

Je réalise que mon message est en fait très long donc désolé et merci à ceux qui l'ont lu en entier !

Ce n'est pas ici qu'un message long dérangera, surtout quand il est fluide et plaisant à lire.

Déjà, bienvenue à toi !
Pour répondre comme je peux à tes interrogations, et bien que ma réponse ne soit pas étayée par de grandes preuves scientifiques détaillées mais uniquement originaire de mes observations, voici : rien de ce que tu décrit va à l'encontre d'un fonctionnement zébré. La surefficience est une multiplication de bien des éléments présents de base plutôt qu'un ajout de quelque chose absent chez les autres. Comme chaque humain est différent cette multiplication va rendre chaque zèbre différent les uns des autres, et même s'il y a des points qu'on retrouve bien souvent ils ne sont pas absolu. Des zèbres heureux en cours et stables dans le monde du travail il y en a pas mal, y compris parmi ceux ayant parfaitement conscience de ce qu'ils sont : la douance n'est pas une modification qui les empêchent de faire comme les autres, mais un outil qui affecte leur façon d'agir sans altérer le résultat qu'ils peuvent obtenir.

Merci beaucoup pour ta réponse ! En fait, c’est ça que je trouve un peu perturbant : c’est que la surrefficience, la précocité ou peu importe comment on l’appelle peut être un dénominateur commun pour plein de gens qui se retrouveraient dedans mais peut en même temps s’exprimer de façons très différentes selon les personnes... C’est comme si on avait la même maladie mais avec chacun des symptômes un peu différents : comment être sûr alors que c’est bien de ça dont il s’agit ? J’imagine qu’il y a quand même des « symptômes » incontournables ... ?

C'est plus compliqué que ça. C'est plutôt une accumulation de petits facteurs qui donnent une forme générale, mais cette forme peut prendre n'importe quelle couleur et texture en plus de ses petites différences structurelles. Globalement la structure de pensée sera assez similaire, mais pour le reste... L'autre point absolu, c'est un QI mesuré assez haut s'il a été fait dans les conditions optimales (de mauvaises conditions amènent bien des hésitations et blocages, baissant sensiblement le score) ; et même là il y a une différence forte entre un surdoué mesuré à 129/130 et un autre mesuré à 160+.

On sait aussi qu'il y a un facteur génétique, car quand un cas est détecté dans une famille on en retrouve beaucoup parmi les frères et sœurs, enfants et dans au moins dans une branche parentale. On croise aussi pas mal d'autistes, surtout asperger. Je crois avoir vu une étude qui soupçonnait la présence d'un allèle sur le chromosome 1, mais je ne l'ai plus sous la main.

Merci ! Je vais essayer de regarder cette histoire d’allèle... et j’ai lu en effet que c'était souvent familial, je me demande si ma mère n’est pas aussi concernée, ce qui pourrait peut-être expliquer que je n’ai pas eu le sentiment d’être trop en décalage étant petite

Ma mère m'a appris à lire, et je suis entré en CP avec un an d'avance.
Mais quand cette suréficience n'est ni détectée ni assumée les dégats peuvent être importants. A son époque ma mère n'a rien vu de tous ces psy.

Bienvenue, Tinemar ! (si c'est du verlan, tu as un prénom que j'apprécie beaucoup ^^)

Comme le dit bien RoyJade, il n'y a pas vraiment de "profil type" de la douance (même si bien sûr il y a des grandes lignes et ce n'est pas un vaste fourre-tout).

En particulier sur l'hypersensibilité et l'échec scolaire, rien n'est automatique (pour la scolarité, la douance est plutôt un avantage qu'un handicap, comme on peut s'y attendre, et malgré l'image d’Épinal du surdoué cancre, qui vient de la surmédiatisation bien naturelle de ces cas : on s'inquiète plus pour un surdoué en difficulté que pour un surdoué qui suit tranquillement son chemin (et qui souvent ne saura jamais qu'il est surdoué)).

Par ailleurs, il y a une composante génétique importante, dont l'influence grandit avec l'âge (c'est pas que les gênes s'expriment plus, c'est que la part de l'éducation / du milieu de naissance devient de moins en moins importante quand on progresse dans l'âge adulte).

Pour plus de précisions sur tout ça, je te conseille vivement Les surdoués ordinaires de Nicolas Gauvrit qui est une revue vulgarisée de l'état des connaissances scientifiques sur plusieurs aspects de la douance (on en parle ici et là sur le forum, cf les liens dans le glossaire, cf ma signature pour ledit glossaire). Tu peux commencer par l'article http://www.scilogs.fr/ramus-meninges/la-pseudoscience-des-surdoues/ qui est une espèce de résumé étendu du bouquin (avec un ton un peu plus engagé contre les traits "apparemment typiques" mais parfois pas si typiques que ça).

En un peu plus pointu (mais partiellement accessible en ligne), il y a les articles du numéro spécial de l'ANAE paru l'an dernier, cf https://www.zebrascrossing.net/t35307-anae-n154-le-haut-potentiel-intellectuel-mise-au-point

N'hésite pas non plus à échanger sur les sujets dédiés et venir en parler avec nous sur le chat et le Discord ... puis IRL si le coeur t'en dit

Bonnes lectures, bons échanges, bonnes rencontres !

Pour trouver un psy pour le bilan:

Merci beaucoup pour ces infos et ces liens ! J’ai effectivement entendu parler de Nicolas Gauvrit et j’ai même écouté une de ses conférences dont j’avais trouvé le lien ici (je crois). Mais ça m’a apporté presque autant de confusions que d’éclairages Je vais lire l’article dont tu parles et me renseigner pour les psys, merci encore