La peur de la folie

Un sujet sensible ??
Oui et Non...Jadis, chaque roi avait son fou...
la société n'est t 'elle pas la fabrique des fous par excellence?
serais je un peu fou pour croire en la Norme ou au contraire la refuser?
- ne plus maitriser?
- virer ailleurs?
Et quelle folie au juste?
la sienne? la leur?

le surdoué n'est il pas un dérangé normal à défaut d'être un normal dérangé?
le monde est il suffisamment fou au point où seul un fou semblerait apte à le sauver, du moins à se sauver lui même?
Combien d'entre vous ont/ont eu peur de devenir fou? et comment cela se caractérise-t il?

suis je assez fou pour aborder ce sujet?

Pour ma part la folie des autres m'attire, la différence, l'écart à la norme...
La mienne en revanche m'effraie, j'ai souvent pensé être folle.
Je pense que 4 particularités orientaient cette pensée.

- L'hyperconscientisation,qui donne un peu l'impression d'une déconnexion du réel, d'un vécu intérieur autre, parfois je me suis demandée si les psychotiques n'étaient pas simplement des personnes qui avaient accès à d'autres sphères, inaccessibles pour la plupart.

- Les coupures de pensée aussi, tout à coup un besoin de déconnecter qui peut me faire partir si loin que ça déconcerte parfois les autres.
Ce qui se retrouve aussi dans la psychose, les fameux "barrages", avec évidemment des mécanismes sous jacents autres.

- La dysharmonie "cognitivo-émotionnelle", le décalage temporel entre ce que je vis, pense et ressens. Quand j'ai lu dans un ouvrage sur le cerveau que c'était un signe dysfonctionnel, ça m'a renforcée dans mon sentiment d'anormalité.
J'ai aussi pensé à la tumeur au cerveau...parce que je sentais bien que c'était là haut que ça se passait.

- Enfin, et surtout, l'incompréhension mutuelle. Comprendre la forme mais pas le fond, c'est déroutant.
Je comprends chaque mot de cette phrase, j'en comprends le sens, mais tout ça dit ensemble dans ce contexte je ne comprends pas...

Le fait d'en savoir davantage sur le fonctionnement cérébral, sur le déficit d'inhibition latente par exemple, m'a beaucoup aidée. Pouvoir se dire "je ne suis pas folle", c'est tout de même un put... de soulagement...

Sujet sensible, mais si intéressant, merci!

c'est le sujet qui fait peur?
peut être que nous ne sommes que deux à se poser ce type de questions....bref

en tout merci pour ta réponse.

Pour ma part, j'ai longtemps attendu ma décompensation psychotique....comme une fatalité.

j'ai pris conscience de la folie assez tôt..je me souviens de mes habituelles soirées d'insomnie où je me mettais à penser intensément aux autres, leur réactions, leur regards, leur interactions et les miennes par la même occasion. j'avais le sentiment que toutes ces danses relationnelles n'avait aucune texture, étaient irréel...je me rememorrais des situations et , me rendant compte de leur absurdité, j'en arrivais a me dire que les autres étaient fous....C'était tellement angoissant pour moi à l'époque car j'étais tiraillé entre deux pensées permanente et simultanée. Tout en m'observant songer à la folie des autres, je me demandais si je n'étais pas moi même fou de penser à cela. Parallèlement, je me demandais jusqu'à quand j'allais continuer à observer tout ça sans virer cinglé. Ainsi, une de mes pensées obsédante fut pendant très longtemps de me dire que j'allais droit vers la schyzophrenie....la seule inconnue était le jour, le lieu, l'heure du début de la première bouffée délirante. Souvent, je me disais que pour le moment, je resiste, je fais semblant mais ca viendra, c'est inévitable car trop de pensée étrange m'envahissent...Je ne vous préciserais pas ce qui se passait dans mon crane lorsque j'avais 3 pétards dans le cerveau !!! alors, j'ai laissé tomber les psychotropes....car à mon niveau, c'est certain qu'ils feraient figure de détonateur....
je pensais souvent à ça, comme si je savais au fond que ca arriverait, que je finirais par péter les plombs..Visiblement, ça n'est toujours pas arrivé...
j'ai de moins en moins ces pensées, ces peurs de virer fou...
j'ai par moment des petites angoisses de sombrer paranoïaque mais je me soigne...en essayant de dormir davantage...et me rasurant que ma parano est davantage a assimiler à un trop plein de lucidité.

Je suis egalement quelque peu attiré par la marge, au point où j'en ai fait mon métier....je travaille auprès de marginaux de tout ordre (sdf, toxicomane, malade psy...).....je travaille dans la double contradiction de permettre à des personnes d'assumer ce qu'elles sont tout en m'efforcant de faire en sorte qu'ils ne éloignent pas trop de la norme...Cette même norme qui me débecte, qui me semble folle....
mais bon, comme on dit, la marge c'est ce qui tient les feuilles du cahier..
on dit egalement que les déviants heureux rendront déviants ceux dont ils étaient les deviants..

j'ai trouvé ce court article d'un psy nommé Jérôme Vermeulen

Les pensées intrusives sont des pensées qui s'imposent à notre esprit, qui font irruption dans le champ de notre conscience, sans que nous arrivions à les contrôler.

C'est cette impression de non contrôle qui est généralement très mal vécue. La personne à qui un tel phénomène arrive, me signale être très inquiète concernant sa santé mentale. Plus précisément, on se demande carrément si on n'est pas en train de devenir fou ou folle...

Ces pensées intrusives, loin d'être totalement folles (comme elles le prétendent pourtant) disent et racontent quelque chose. Plus techniquement, elles reposent sur un phénomène dont les psychanalystes parleraient en terme de retour du refoulé.
Personnellement, comme pour grand nombre de mes collègues psychologues, l'approche est différente (bien que parlant probablement un peu de la même chose).

Un grand principe de la psychologie cognitive, en effet, est qu'une information qui n'est pas traitée va avoir tendance à se représenter encore et encore à notre esprit. L'objectif: recevoir le traitement requis pour être 'archivée'.

Or, certaines informations sont un petit peu trop complexes pour être traitées, ou sont affectivement difficiles à accepter ou appréhender. Elles ne sont donc pas traitées. Et elles vont revenir pour se rappeler à notre bon souvenir. De façon fort désagréable, d'autant plus désagréable et tonitruante qu'elles sont porteuses de sens par rapport à notre vie.

Non Beaufasupa, ce sujet est extrêmement intéressant !!!
... il est tout autant compliqué ... et si vaste
La première difficulté est la définition de la folie, multiples définitions à mon sens, un ensemble constitué de plusieurs sous-ensembles

Pour ma part, cela a toujours été une réflexion récurrente mais étant profane en la matière, j'en arrivais très vite à tourner en rond...

Il est vrai que lorsque l'on se crois seul (e) à fonctionner de la façon dont on fonctionne, on arrive vite à se poser la question de la folie
ici, folie = différence par rapport à la norme, déviance par rapport au mode "normal" de fonctionnement d'un cerveau

Que penser de ces pensées toujours présentes qui, partant d'un point de départ souvent banal, s'envolent dans de multiples directions, se ramifient, se re-croisent, s'entrechoquent et noient sous leur foisonnement l'idée de départ

Comment comprendre cet hypersensibilité à tout son, odeur, détail en tout genre qui apparaissent sans répit, entêtants et insupportables (tic tac fait l'horloge ...)

"Enfin, et surtout, l'incompréhension mutuelle. Comprendre la forme mais pas le fond, c'est déroutant.
Je comprends chaque mot de cette phrase, j'en comprends le sens, mais tout ça dit ensemble dans ce contexte je ne comprends pas."

C'est tellement vrai !!

Comme toi, Luciole, je "déconnecte souvent, ou je reste figée sur une parole et mon esprit se met à partir "en arbre" ... déroutant pour l'entourage ...

Comme toi également la connaissance du déficit d'inhibition latente m'a rassurée

La découverte de l'existence de la pensée en arborescence a été une véritable délivrance
Je pense qu'il est important de mettre un mot sur nos propres fonctionnements
..; afin de ne pas se croire fou ou folle

Tout a fait d'accord sur le fait que poser des mots permet déjà de se sentir moins lourd avec ces angoisses. toutefois, comme l'intelligence crée le doute, on ne se refait pas une confiance en soi totalement...

Pour ma part, je définis ma potentielle propre folie au fait que je puisse un jour perdre le contrôle, la maitrise....me déconnecter finalement.

Au delà de ça, ce serait un bon sujet d'étude que de recenser la proportion d'Hqi étant passé par la psychiatrie...
- soit par incompréhension de l'entourage qui ont préféré faire taire le problème plutôt que d'écouter ce qu'il voulait dire.
- soit tout simplement parceque le surdoué à réellement dérouillé...

http://gappesm.net/test/Articles/Depistage-patients-psychiatrie-surdoues/these.pdf

“Quand la coutume de regarder les choses en face tourne à la manie, on pleure le fou qu’'on a été et qu'’on n’'est plus.” CIORAN

Ca faisait un petit moment que je n'étais plus venue sur le forum, et en parcourant quelques sujets, je me dis qu'il faut probablement être suffisamment détachée de sa folie pour pouvoir la reconnaître (et l'assumer!)...
J'avais également vu cette thèse à laquelle tu fais référence, il semble que c'est bien la difficulté dans le rapport aux autres qui génèrent des symptômes et pas la douance en elle-même. JSF dit par ailleurs que les HQI sont moins concernés par la maladie mentale.
Peut-être que chez certains, la crainte de déconnecter pour de bon est un moteur qui puise dans les ressources intellectuelles en permanence, et les épuise...alors que chez d'autres, elle les entretient et les potentialise?

C'est vrai que c'est difficile de se livrer sur ce sujet...

ouai, je crois aussi que c'est un sujet difficile..

pourtant, je me dis qu'à un moment, faut arrêter de tourner autour du pot et de se dire: "on est zebres, tenons nous la main dans nos souffrances partagés"
je pense sincèrement qu'il faut commencer à attaquer de front ce qui nous rebutes, nous fait peur.....faut regarder notre propre démon dans les yeux...et lui signifier qu'on sait qu'il existe et qu'il fait partie de soi...

je crois que l'effet "Barnum "prive beaucoup d'une belle occasion de "devenir qui ils sont"....

c'est dommage, y'aurait tant matière a creuser..

mais bon.....peut etre que ca viendra.

La folie...
Douloureux sujet en ce qui me concerne.
Moi la reine du doute qui fut un temps n'ai rien trouvé de mieux que de remettre en question ma propre vision de la réalité...
Je ne vais pas détailler mon "parcours" maintenant, je tenais simplement à dire que les pensées intrusives je connais bien. Elles ont commencé pour moi au tout début de l'adolescence après une enfance que je qualifierais de trop "sage" (à me conformer sans cesse aux attentes des uns et des autres). Elles ne m'ont quittée que lorsque j'ai su assumer certaines particularités de mon fonctionnement que j'avais bien trop longtemps étouffées.

merci Duna pour ton témoignage.

je retiendrais deux choses que tu dis :

- les pensées intrusives surgissant après une enfance trop sage(à me conformer sans cesse aux attentes des uns et des autres).
Putain de conformisme !!!croyance où l' intelligence s'est endormie dans nos habitudes !!!
- Elles ne m'ont quittée que lorsque j'ai su assumer certaines particularités de mon fonctionnement que j'avais bien trop longtemps étouffées

je me reconnais bien la dedans..
après, comment assumer? j'ai cru une fraction de seconde, que l'idée même de me croire surdoué etait une nouvelles manifestation de mes pensées intrusives !!!! C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai rapidement fait le choix de passer le WAIS.

Oui comment assumer?
Si j'assume mieux qui je suis c'est loin d'être facile. Avant je me conformais afin de ne pas paraitre trop étrange et désormais je m'affirme davantage même si on me suit rarement...
Je me heurte régulièrement à des "ouais, mais tu te prends trop la tête, dans ce cas là c'est sans fin! On s'en fout!" mais j'ai eu beau essayer, non, rien ne m'est égal à moi... Alors tanpis, je souffre beaucoup de ces situations, mais j'ai choisi. Je tiens bon et j'évite de me prendre la tête du moins par rapport à ça ^^´
je garde ma position et me sents bien souvent très seule...