Surmontant ma mélancolie, je vous offre à lire quelques doses de prose poétique

Sempre Vivace a écrit:
Une des choses que je vais avoir du mal à accepter sur ce forum, c'est une fréquente expression de l'acceptation de l'état des choses...  Je ne suis pas meilleur ni plus fort...

DesperateRobot a écrit:
On ne change pas la mentalité des neurotypiques avec des coups. Cela n'est pas digne de ma façon de voir les choses. Ce serait déchoir.

DesperateRobot a écrit:
Ils ne comprennent pas parce qu'ils ne ressentent pas la portée de vos mots.

DesperateRobot a écrit:
Le décalage est bien trop grand et il s'amplifie au fur et à mesure que j'étends mes ailes.

DesperateRobot a écrit: J'espère, jmd, que ce message apparaît comme une réponse acceptable et un peu plus nuancée que les deux blocs monolithiques.

DesperateRobot a écrit: c'est d'accepter les données de son intuition-instinct-inconscient ou toute pensée non maîtrisable et d'accepter l'information qui en découle.

DesperateRobot a écrit: Ils ne comprennent pas parce qu'ils ne ressentent pas la portée de vos mots.

majorette a écrit:Poser le mot aimer sur une relation semble très simple pour beaucoup, mais me concernant est bien trop difficile.
L'amitié forme détournée de l'amour ?
Liens sont indéfectibles, on ne se juge pas, le temps n'existe plus tant les échanges sont intenses.
La confiance est là, l'oreille est toujours attentive, pas de complaisance, tout est si simple.
Le partage est constructif, et apporte bienveillance et sérénité sur le chemin de mes tourments.
L'évitement des autres "nocifs" devient une obligation, dans une relation conflictuelle l'énergie dépensée est trop importante, et souvent inutile.

DesperateRobot a écrit:Nouvellette n°58
Le clan de JMB

Encore une fois ma maladresse me joue des tours. « Hé ho ! » ai-je salué de loin une silhouette familière. Je me précipitai et accélérai le pas, avec des gestes de sémaphore.

Misère ! Ce n’était pas ma fille. Une autre avec la même silhouette aux jambes minces, le même jeans, le même T Shirt, les mêmes bottines, les mêmes cheveux lissés, le même trait exagéré autour des yeux, la même couleur de peau. Elle était à deux doigts d’être ma fille sauf qu’il y avait un je ne sais quoi qui lui manquait.

Les sourcils ! Ceux qu’elle avait déjà à sa naissance. Deux arcs jumeaux gracieux et bondissants.

Misère, je confonds ma fille avec une autre ! Dans le clan des Jeunes Minces Belles, on en compte une flopée sur ce modèle qui sort par paquets de dix des magasins à la mode des centres commerciaux.

Je me suis jurée de ne pas recommencer. A présent, j’évolue sur le trottoir, soit en accrochant mes yeux dans les nuages, soit en les laissant aller sur l’asphalte souvent peu appétissant lors de la sortie des chiens du quartier. Je frôle les murs. Je porte ma tête de déterrée au dessus de mes épaules de bouc émissaire. Un certain genre quand même… Je fais en sorte d’être invisible. Ca ne marche pas. Mon modèle est moins courant que celui des autres. Je ne me promène pas par groupe de deux ou trois. Le pire, c’est qu’on me salue souvent avec grand respect… parce qu’on me prend pour quelqu’un d’autre.

Quand ma fille m’interroge d’un « c’est qui ? » je lui réponds avec la naïveté qui me caractérise « je ne vois absolument pas qui c’est. Mais je ne tiens pas à ce que l’autre se fâche avec la personne qu’il croit avoir saluée. Alors je réponds et je salue à mon tour, avec un certain enthousiasme, en espérant n’avoir pas de conversation à tenir ! »

Ma fille commence à avoir ce tic de plus en plus répétitif lorsqu’elle me scrute. Elle tapote sa tempe de l’index droit, à plusieurs reprises, comme si elle avait oublié quelque chose. J’espère qu’elle ne l’oublie pas, ce serait ennuyeux.

La dernière fois que je suis revenue chez moi, je suis entrée en collision avec une boule de colère, ah non, c’était bien ma fille cette fois, qui morigénait.

« Non mais je t’ai dit bonjour dix fois dans la rue, et tu ne m’as pas remarquée ! Tu aurais pu m’embrasser quand même ! La honte, la honte ! Mes amies m’ont demandé si je ne m’étais pas trompée de mère ! »

- Eh bien, peut-être que j’étais quelqu’un d’autre à ce moment-là ? Tu aurais dû en saluer une autre de plus convenable.

Elle poussa un énorme soupir.

- Si c’est ainsi, pas la peine de te saluer.
- Il faudrait savoir. Un jour, tu ne souhaites pas que je te parle dans la rue. Une autre fois, je suis censée montrer une jubilation extrême et  t’embrasser devant tes amies. Ce n’est jamais le bon moment, ni l’attitude que tu attends, ni la mère que tu aurais désiré comme mère.
-  Je te déteste.

C’est déjà un bon point, pensais-je. L’indifférence est pire. Il suffira de multiplier ce sentiment par un coefficient moins 1 et on y est.
De plus nul n’est pas obligé d’aimer sa mère. Ma fille ne passera pas toute sa vie en ma compagnie. Heureusement pour elle. Alors que, moi, je dois me supporter en permanence.

Depuis ce temps, malgré mon envie de communiquer, je garde un silence prudent. Je n’agite plus aucune main. Je vais par les rues en retenant mes larmes, cachée derrière un mouchoir, faisant semblant d’éternuer. Surtout ne pas avoir l’air d’être triste, passer pour allergique sera de bon aloi.

Je suis consciente d’un de mes plus cuisants échecs existentiels.
Je ne sais pas su transmettre à ma fille l’essentiel.

Etre humain, c’est avant tout aimer les hommes plus que soi-même. Etre indulgent. Manifester cent fois plus sa bonté que son intelligence. Ne pas juger autrui sur sa position sociale, son physique ou même son intelligence scolaire. Ne jamais mépriser. Toujours tenter de comprendre.

Que savons-nous de ce qui nous attend ?
Rien. Nous sommes des ignorants.

Et ces êtres que certains ont méprisés autrefois, sont  devenus plus lumineux que le premier soleil de printemps.

DesperateRobot a écrit:
.../... A mes yeux, l'amour est un poème; on le récite, on le ressent, on l'apprend par cœur. On ne le dissèque pas. Si on s'y essaie, il déserte la place..../...

DesperateRobot a écrit:Pourquoi vouloir tout comprendre, toujours, à tout bout de champ? Pourquoi appliquer les outils de la rationalité à ce qui est le plus irrationnel du monde?En tant que scientifique, je renonce à comprendre ce qui m'échappera toujours. A mes yeux, l'amour est un poème; on le récite, on le ressent, on l'apprend par cœur. On ne le dissèque pas. Si on s'y essaie, il déserte la place.