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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 12:18

Wé, en ville c'est vite de la gadoue immonde. Enfin, je comprends que ceux qui n'ont jamais eu à déblayer des m3 de neige pour le Smic trouvent ça charmant.
*c'était la minute lutte des classes, merci de votre (in)attention ^^ *

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Message par Pola Lun 19 Déc 2016 - 12:26

Rooo la bataille de boules de neige Hourra !

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Message par soto² Lun 19 Déc 2016 - 12:27

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Message par Kass Lun 19 Déc 2016 - 12:27

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 12:29

Pola a écrit: boules de neige Hourra !

Ca te fait fondre, ça, chez un mec ? Dent pétée

@Kass : pour Vincent, ce doit être juste de la blanche ^^

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 12:34

Moi je le fais gratos, car j'aime la neige, en plus je l'aime tellement que je la déblaye flocon par flocon pour pas l'abimer ! Dent pétée

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Message par Pola Lun 19 Déc 2016 - 12:37

Quand j'ai les boules et que ca ne dure pas, j'me dit que le climat est plus clément.

Pola

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 12:41

Ouaip, c'est la saison des boules, des clémentines, un climat à se faire enguirlander ! Dent pétée

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Message par Pola Lun 19 Déc 2016 - 12:44

Suce ces p'tits Bleus ! a écrit:Ouaip, c'est la saison des boules, des clémentines...

Pété de rire

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 17:43

Je n'avais pas de rhum, j'ai fait mon grog à l'armagnac... je vous en dirai des nouvelles...

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 18:52

Ça marche pas ...

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Message par Chuna Lun 19 Déc 2016 - 18:56

Faut tripler la dose d'Argmagnac ^^
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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 19:01

Je viens de trouver une jolie citation sur l'amour :
"L'amour est la bienveillance inlassablement maintenue."
In La dame blanche de Bobin

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 19:19

Cuicui a écrit:Je viens de trouver une jolie citation sur l'amour :
"L'amour est la bienveillance inlassablement maintenue."
In La dame blanche de Bobin

Putain, le nombre de modos qu'il faudrait dans mon couple ! Dent pétée

Pour L'armagnac, t'as pensé à enlever le bouchon quand tu verses, parce que des fois on est tellement préoccupé par des choses compliquées, qu'on en oublie les choses simples !

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Message par Invité Lun 19 Déc 2016 - 19:25

Suce ces p'tits Bleus ! a écrit:
Cuicui a écrit:Je viens de trouver une jolie citation sur l'amour :
"L'amour est la bienveillance inlassablement maintenue."
In La dame blanche de Bobin

Putain, le nombre de modos qu'il faudrait dans mon couple ! Dent pétée
C'est toi qui les pique à zc ? Dent pétée

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 9:36

Bulletin mets tes hauts
Il pleut, il fait froid mais il ne neige pas. Il faudra que je demande des esseplications à ti bleu.

Bulletin sans thé :
Je n'ai plus de courbatures.
L'Armagnac est un mauvais placebo.

Hier j'ai parfait ma culture générale, j'ai regardé La reine des glaces.
Je n'ai aimé que le renne et les trolls. 
Même chez Disney, les princes charmants se transforment en PN.
Pffff... tout fout le camp.

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 9:53

Il pleut ici aussi, mais je vais aller courir un peu qd même.

Ahhhh la reine des neiges...
Spoiler:
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 9:56

C'est la première fois que je m'ennuie devant un Disney...
J'ai peut-être enfin vieilli ? Dent pétée

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 10:00

Te réjouis pas trop vite tongue
T'es pas la seule ^^
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 10:04

Ne critiquez jamais devant ma fille la reine des neiges, sinon elle vous jette de la glace en faisant " Pschitt " avec sa main !

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 10:07

Et moi, eh bé, j'y envoie du Picard en réplique ! namého !

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Message par Kass Mar 20 Déc 2016 - 10:17

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 10:24

Merci Kass, ma fille va t'adorer !

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 10:26


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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 10:38

Là c'est moi qui te dis merci, j'adore regarder les jambes des patineuses ! Bave

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 13:12

scpb:

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 13:13

Cuicui:

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 13:25

SCPB:

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 14:23

Cuicui:

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 17:24

Bouhouhou Bouhouhou Bouhouhou

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 17:45

Ben pourquoi tu pleures ?

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 18:51

J'peux pas dire.

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 18:59

Console

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 19:34

Long hug
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 19:46

Rougit 
Heu...

Trinquons
On verra demain pour mes secrets existentiels ...

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 20:56

Dis Cuicui, tu crois que ça s'apprend d'écrire des mots sur des photos ?
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 21:09

Oui, ça s'appelle un roman photo, mais je ne suis pas Cuicui ! Dent pétée

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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 21:10

Je ne sais pas.
C'est un truc qui me vient tout seul.
Pour ta photo de chevaux, un titre m'est venu tout seul : pas très poétique : "queues de cheval".


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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 21:20

lol Pti Bleu ^^

Mouais, Cuicui, je peux pas t'engager lol ?

Me suis offerte ce jour ci une page facebook pour mettre mes photos, j'en avais marre du bordel de mon profil, besoin de ranger un peu Dent pétée
Mais du coup, sans texte, ça fait vraiment vide...

Et voui, sacré panache ces bestioles ^^
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 21:28

J'ai un compte facebook depuis qqs mois qui n'arrête pas de me mailer que j'ai plus d'amis que ce que je crois... 
Si tu veux je viens te suggérer ce que m'envoie ma bonne fée. Souvent, c'est en lien avec un souvenir concernant le moment ou le lieu où j'ai pris la photo. Alors je ne sais pas si ça marche pour des photos que je n'ai pas prises. On peut essayer.

J'ai même ouvert un compte tumblr ce we que je voulais transformer en galerie virtuelle. J'ai déjà oublié mon mdp ! Dent pétée

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 21:32

ahhnnn c'était trumblr et pas flickr Dent pétée

écoute, à l'occasion, je veux bien que tu testes.

Je suis super bavarde, mais dès qu'il s'agit de mes photos, je ne sais plus quoi dire... Je buggue ^^
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 21:39

Ok, envoie-moi ton compte face de chèvre et je viendrai.

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Message par Chuna Mar 20 Déc 2016 - 21:42

oké Wink

édit : ça m'a lait vraiment sympa comme interface, tumblr...
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Message par Invité Mar 20 Déc 2016 - 23:07

Des beaux yeux se sont fermés aujourd'hui:

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Message par Invité Mer 21 Déc 2016 - 9:50

Hier, elle avait meilleure mine. Lui, non. Il était essoufflé. Ils étaient allés tous les deux chez le coiffeur.
Sur la table, alignés, il y avait 3 sacs. Dans chaque sac, il y avait deux pots de confiture de groseille. Sur chaque sac un prénom, celui de ma soeur, celui de mon frère et le mien.

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Message par Chuna Mer 21 Déc 2016 - 10:01

Vacances...
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Message par Chuna Mer 21 Déc 2016 - 13:02

Bises chère amie Bisous

Joyeux Noël Smile
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Message par Invité Lun 26 Déc 2016 - 13:54

Ayé... On a fait le plus dur...
Je viens de passer les 3 jours les plus languissants depuis bien longtemps...
Ciel... qu'il est bon de buller quelques heures avant de remettre les rennes à l'attelage.

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Message par Invité Lun 26 Déc 2016 - 16:47

Victor Hugo a écrit:Discours à l’Assemblée nationale
(1848-1871)
Victor H UGO
Séance du 15 janvier 1850, Présidence de M. D UPIN
Le parti catholique, en France, avait obtenu de M. Louis B ONAPARTE que le ministère de l’ins-
truction publique fût confié à M. de F ALLOUX .
L’assemblée législative, où le parti du passé arrivait en majorité, était à peine réunie que M.
de F ALLOUX présentait un projet de loi sur l’enseignement. Ce projet, sous prétexte d’organiser
la liberté d’enseigner, établissait, en réalité, le monopole de l’instruction publique en faveur du
clergé. Il avait été préparé par une commission extra - parlementaire choisie par le gouverne-
ment, et où dominait l’élément catholique. Une commission de l’assemblée, inspirée du même
esprit, avait combiné les innovations de la loi de telle façon que l’enseignement laïque dispa-
raissait devant l’enseignement catholique.
La discussion sur le principe général de la loi s’ouvrit le 14 janvier 1850.
Toute la première séance et la moitié de la seconde journée du débat furent occupées par le
très habile discours de M. B ARTHÉLEMY S AINT - H ILAIRE .
Après lui, M. P ARISIS , évêque de Langres, vint à la tribune donner son assentiment à la loi
proposée, sous quelques réserves toutefois, et avec certaines restrictions.
M. Victor H UGO , dans cette même séance, répondit au représentant du parti catholique.
C’est dans ce discours que le mot droit de l’enfant a été prononcé pour la première fois.
Note de l’éditeur des Œuvres complètes de Victor Hugo en 1882.
M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. VICTOR HUGO contre le projet.
M. VICTOR HUGO. Messieurs, l’heure est avancée, je tâcherai de donner à ce que j’ai à dire la
forme la plus abrégée ; je pense cependant que l’Assemblée, dans une question si importante, vou-
dra bien m’accorder le temps nécessaire pour exposer mes idées ; mais je serai court. (Oui ! oui ! —
Parlez !)
Messieurs, quand une discussion est ouverte, qui touche à ce qu’il y a de plus sérieux dans les
destinées du pays, il faut aller tout de suite, et sans hésiter, au fond de la question. Je commence par
dire ce que je voudrais ; je dirai tout à l’heure ce que je ne veux pas.
A mon sens, le but lointain sans doute, et difficile à atteindre, j’en conviens, mais auquel il faut
tendre dans cette grande question de l’enseignement, le voici : l’instruction gratuite et obligatoire.
(Vives exclamations à droite.)
(A gauche. Très bien ! très bien !)
M. VICTOR HUGO. L’instruction gratuite et obligatoire, obligatoire seulement au premier degré,
gratuite à tous les degrés. (Nouvel assentiment à gauche.)
L’enseignement primaire obligatoire, c’est le droit de l’enfant qui, ne vous y trompez pas, est plus
sacré encore que le droit du père, et qui se confond avec le droit de l’État.
1Voici donc, selon moi, le but auquel il faut tendre dans un temps donné : instruction gratuite et
obligatoire dans la mesure que je viens de marquer ; un immense enseignement public donné et ré-
glé par l’État, partant de l’école de village, et montant de degré en degré jusqu’au collège de France,
plus haut encore, jusqu’à l’Institut de France ; les portes de la science toutes grandes ouvertes à
toutes les intelligences. (Vive approbation à gauche.)
Partout où il y a un esprit, partout où il y a un champ, qu’il y ait un livre ! Pas une commune sans
une école ! pas une ville sans un collège ! pas un chef-lieu sans une faculté ! Un vaste ensemble, ou,
pour mieux dire, un vaste réseau d’ateliers intellectuels, gymnases, lycées, collèges, chaires, biblio-
thèques. . . (Rires à droite et au centre. — Approbation à gauche), gymnases, lycées, collèges, chaires,
bibliothèques . . .
A gauche. Oui ! oui ! — Très bien ! très bien ! (Nouveaux rires à droite.)
Voix à gauche. Monsieur le président, empêchez donc que l’orateur soit interrompu.
M. LE PRÉSIDENT. Vous, voulez-vous que je vous empêche d’applaudir ? C’est vous qui inter-
rompez en applaudissant.
M. VICTOR HUGO. Je ferai remarquer à ce côté de l’Assemblée (la droite) qu’il y a quelque chose
de grave à interrompre ainsi, d’une façon qui peut paraître systématique, un orateur avant qu’il ait
pu expliquer sa pensée.
A droite. Mais ce sont vos amis qui vous applaudissent et qui vous interrompent.
M. VICTOR HUGO. J’ai dit quel était le but à atteindre, j’ajoute qu’il faut que la France entière
présente un vaste ensemble, ou, pour mieux dire, un vaste réseau d’ateliers intellectuels : gymnases,
lycées, collèges, chaires, bibliothèques, échauffant partout les vocations, éveillant partout les apti-
tudes. En un mot, je veux que l’échelle de la science soit fermement dressée par les mains de l’État,
posée dans l’ombre des masses les plus sombres et les plus obscures, et aboutisse à la lumière ; je
veux qu’il n’y ait aucune solution de continuité et que le cœur du peuple soit mis en communica-
tion avec le cerveau de la France. (Approbation à gauche — Exclamations ironiques à droite. ) Voilà
comment je comprends l’instruction.
Je le répète, c’est le but auquel il faut tendre ; mais ne vous en troublez pas, vous n’êtes pas près de
l’atteindre. La solution du problème contient une question financière considérable comme tous les
autres problèmes sociaux de notre temps ; ce but, il était nécessaire de l’indiquer, car il faut toujours
dire où l’on tend. Si l’heure n’était pas aussi avancée, je développerais devant vous les innombrables
points de vue qu’il présente, et les interrupteurs eux-mêmes seraient obligés de s’arrêter devant la
grandeur d’un tel but national.
De toutes parts. Parlez ! parlez !
M. VICTOR HUGO. Je veux ménager les instants de l’Assemblée. . . (Parlez ! parlez !) Je circonscris
le sujet, et j’aborde immédiatement la question dans sa réalité positive actuelle ; je la prends où elle
en est aujourd’hui, au point où la raison publique d’une part, et les événements d’autre part, l’ont
amenée.
Eh bien, messieurs, à ce point de vue restreint, mais pratique, de la situation actuelle, je veux, je le
déclare, la liberté de l’enseignement ; mais je veux la surveillance de l’État ; et comme je veux cette
surveillance effective, je veux l’État laïque, purement laïque, exclusivement laïque. L’honorable M.
G UIZOT l’a dit avant moi dans les assemblées : l’État, en matière d’enseignement, n’est, ne peut être
autre chose que laïque. Je veux donc la liberté d’enseignement sous la surveillance de l’Etat, et je
n’admets, pour personnifier l’État dans cette surveillance si délicate et si difficile, qui exige toutes
les forces vives du pays, je n’admets que des hommes appartenant sans doute aux carrières les plus
graves, mais n’ayant aucun intérêt, soit de conscience, soit de politique, distinct de l’unité nationale.
A gauche. C’est cela ! Très bien !
2M. VICTOR HUGO. C’est vous dire que je n’introduis, soit dans le conseil supérieur de surveillance,
soit dans les conseils secondaires, ni évêques, ni délégués d’évêques.
(Nouvel assentiment à gauche.)
J’entends maintenir, quant à moi, cette antique et salutaire séparation de l’église et de l’État, qui
était la sagesse de nos pères, et cela, dans l’intérêt de l’Église comme dans l’intérêt de l’État.
Messieurs, je viens de vous dire ce que je voudrais ; voici maintenant ce que je ne veux pas.
Je ne veux pas de la loi qu’on vous apporte. Pourquoi ? Messieurs, cette loi est une arme. Une
arme n’est rien par elle-même ; elle n’existe que par la main qui la saisit. Or, qu’elle est la main qui
se saisira de cette loi ? Là est toute la question. Messieurs, c’est la main du parti clérical. (Mouvement
à droite.)
À gauche. Voilà la vérité !
M. VICTOR HUGO. Eh bien, je redoute cette main, je veux briser l’arme, je repousse le projet.
J’entre maintenant tout à fait dans la discussion, et j’aborde, tout de suite, et sans hésiter, une
objection qu’on nous fait à nous, opposants, placés au point de vue où je suis.
On nous dit : C’est la seule objection qui ait quelque apparence de gravité : on nous dit : Vous vou-
lez exclure le clergé du conseil de surveillance de l’État : vous voulez donc proscrire l’enseignement
religieux ?
Messieurs, je m’explique. Loin que je veuille proscrire l’enseignement religieux, entendez-vous
bien, il est selon moi plus nécessaire aujourd’hui qu’il n’a jamais été. (Marques d’approbation à
droite.) Plus l’homme grandit, plus il doit croire. Il y a un malheur dans notre temps, je dirai presque
il n’y a qu’un malheur : c’est une certaine tendance à tout mettre dans cette vie. (Approbation géné-
rale.) A qui la faute ? Chacun se la rejette, je ne récrimine pas.
En donnant à l’homme pour fin et pour but la vie terrestre, la vie matérielle, on aggrave toutes
les misères par la négation qui est au bout ; on ajoute à l’accablement des malheureux le poids in-
supportable du néant, et de ce qui n’est que la souffrance, c’est-à-dire une loi de Dieu, on fait le
désespoir. (Bravos !)
Voix diverses. C’est très beau et très vrai !
M. VICTOR HUGO. De là des profondes convulsions sociales. Messieurs, certes, je suis de ceux
qui veulent, et personne n’en doute dans cette enceinte, je suis de ceux qui veulent, je ne dis pas
avec sincérité, le mot est trop faible, je veux, avec une inexprimable ardeur et par tous les moyens
possibles, améliorer dans cette vie le sort matériel de ceux qui souffrent ; mais je n’oublie pas que
la première des améliorations, c’est de leur donner l’espérance. (Marques générales d’assentiment.)
Combien s’amoindrissent de misères bornées, limitées, finies après tout, quand il s’y mêle une es-
pérance infinie !
Notre devoir à tous, législateurs ou évêques, prêtres ou écrivains, publicistes ou philosophes,
notre devoir à tous, c’est de répandre, c’est de dépenser, c’est de prodiguer, sous toutes les formes
toute l’énergie sociale, pour combattre et détruire la misère, et en même temps de faire lever toutes
les têtes vers le ciel. (Vives et nombreuses marques d’approbation.) C’est de diriger toutes les âmes,
c’est de tourner toutes les attentes vers une vie ultérieure où justice sera faite, et où justice sera
rendue. (Nouvelles marques d’approbation.)
Disons-le bien haut : personne n’aura injustement ni inutilement souffert. La mort est une resti-
tution. La loi du monde matériel, c’est l’équilibre ; la loi du monde moral, c’est l’équité. (Très bien !
très bien !) ; Dieu se retrouve à la fin de tout. Ne l’oublions pas, et enseignons-le à tous ; il n’y aurait
aucune dignité à vivre, et cela n’en vaudrait pas la peine, si nous devions mourir tout entiers.
Ce qui allège la souffrance, ce qui sanctifie le travail, ce qui fait l’homme bon, fort, sage, patient,
bienveillant, juste, à la fois, humble et grand, digne de l’intelligence, digne de la liberté, c’est d’avoir
devant soi la perpétuelle vision d’un monde meilleur rayonnant à travers les ténèbres de cette vie.
3Messieurs, quant à moi, j’y crois profondément à ce monde meilleur, et, je le déclare ici, c’est la
suprême certitude de ma raison, comme c’est la suprême joie de mon âme. (Marques nombreuses
d’assentiment.)
Je veux donc sincèrement, je dis plus, je veux ardemment l’enseignement religieux. Mais je veux
l’enseignement religieux de l’Église, et non l’enseignement religieux d’un parti. Je le veux sincère et
non hypocrite. (Approbation à gauche.) Je le veux ayant le ciel pour but et non la terre. (Marques
générales d’approbation.)
Je ne veux pas qu’une chaire envahisse l’autre ; je ne veux pas mêler le prêtre au professeur, ou si
je tolère ce mélange, si j’y consens, moi législateur, je le surveille.
J’ouvre sur les séminaires, sur les congrégations enseignantes l’œil de l’État, et de l’État laïque, j’y
insiste, de l’État laïque, jaloux uniquement de sa grandeur et de son unité. Jusqu’au jour, jour que
j’appelle de tous mes vœux, où la liberté de l’enseignement, la liberté complète et entière pourra
être proclamée... Et tenez, je m’interromps. Il y a lieu de placer ici une observation importante qui
complète l’exposition de mes idées. Si j’obtenais, si j’obtenais du progrès naturel, du progrès du
temps, des esprits, si j’obtenais ce que je vous disais dans mes premières paroles, l’instruction gra-
tuite à tous les degrés, obligatoire au premier degré, je mettrais à côté de ce grand enseignement
donné par l’État, de cette magnifique instruction gratuite, dont je vous ai fait le tableau, normale,
française, chrétienne, libérale, offrant à tous pour rien les meilleurs maîtres et les meilleures mé-
thodes, sollicitant les esprits de tout ordre, qui serait un modèle en science et de discipline, et qui
élèverait, sans nul doute, le génie national à sa plus haute somme d’intensité, je mettrais à côté de
ce magnifique enseignement la liberté de l’enseignement complète, entière, absolue, liberté pour
les établissements privés, liberté pour les établissements religieux, soumise seulement aux lois gé-
nérales, aux lois générales qui gouvernent toutes les libertés ; et je n’aurais pas le souci, et je n’aurais
pas le besoin de donner à cette liberté le pouvoir inquiet de l’État pour surveillant, parce que je lui
donnerais l’enseignement gratuit de l’État pour contrepoids.
Eh bien, jusqu’au jour où cette liberté complète de l’enseignement pourra être établie à côté de
l’enseignement gratuit de l’État, jusqu’à ce jour-là, je veux l’enseignement de l’Église, mais je veux
l’enseignement de l’Église au dedans de l’Église et non au dehors.
Surtout je considère comme une dérision de faire surveiller, au nom de l’Etat, par le clergé, l’en-
seignement du clergé. Je veux, je le répète et je le résume en un mot, ce que voulaient nos pères :
l’Eglise chez elle, et l’État chez lui.
Voix diverses à droite. Qui ? nos pères ? — Où cela ?
M. VICTOR HUGO. L’Assemblée voit déjà clairement pourquoi je repousse le projet de loi. J’achève
de m’expliquer.
Messieurs, le projet de loi qui vous est soumis, le projet de la commission, ainsi que je vous l’in-
diquais tout à l’heure, c’est à celui-là surtout que je m’attache, car c’est le seul qui soit sérieusement
en discussion ; le projet de la commission est quelque chose de plus, de pire, si vous voulez, qu’une
loi politique ; c’est une loi stratégique. (Bruits divers.) Je m’adresse, non pas, certes, au vénérable
évêque de Langres, ni à quelque personne que ce soit dans cette Assemblée ; je m’adresse au parti
qui a, sinon rédigé, du moins inspiré le projet de loi à ce parti à la fois éteint et ardent, au parti cléri-
cal. Je ne sais pas s’il est dans le Gouvernement, je ne sais pas s’il est dans l’Assemblée, je le sens un
peu partout (Rire général), et comme il a l’oreille fine, il m’entendra. (Nouveaux rires.)
Je m’adresse donc au parti clérical et je lui dis : Cette loi est votre loi. Je me défie de vous ; instruire
c’est construire ; je me défie de ce que vous construisez. Je ne veux pas vous confier l’enseignement
de la jeunesse, l’âme des enfants, le développement des intelligences neuves qui s’ouvrent à la vie,
l’esprit des générations nouvelles, c’est à dire l’avenir de la France. Je ne veux pas vous confier l’ave-
nir de la France, parce que vous le confier, ce serait vous le livrer. (Mouvement.) Il ne me suffit pas
4que les générations nouvelles nous succèdent ; je suis de ceux qui veulent qu’elles nous continuent.
(Mouvements divers.)
Voilà pourquoi, hommes du parti clérical, je ne veux ni de votre main, ni de votre souffle sur elles ;
je ne veux pas que ce qui a été fait par nos pères soit défait par vous. Après cette gloire, je ne veux
pas de celle honte ! (Vive approbation à gauche. — A droite : Oh ! oh !)
Votre loi est une loi qui a un masque. Elle dit une chose et elle en fait une autre. (Mouvement.)
C’est une pensée d’asservissement qui prend les allures de la liberté ; c’est une confiscation intitulée
donation. (Rires approbatifs à gauche.) Je n’en veux pas. Du reste, c’est votre habitude : toutes les fois
que vous forgez une chaîne vous dites : Voici une liberté. (Nombreux rires à gauche.) Toutes les fois
que vous faites une proscription, vous criez : Voilà une amnistie. (Vive approbation à gauche.)
Ah ! sur ce point, je suis pleinement de l’avis du vénérable évêque de Langres, je ne vous confonds
pas, vous parti clérical, avec l’Église, pas plus que je ne confonds le gui avec le chêne. Vous êtes les
parasites de l’Église, vous êtes la maladie de l’église. (Mouvements en sens divers.)
Oui, vous êtes la maladie de l’Église ; Ignace est l’ennemi de Jésus. Vous êtes non les croyants,
mais les sectaires d’une religion que vous ne comprenez pas. (A gauche : Très bien ! — A droite : Oh !
oh !)
Cessez de mêler l’Église à vos affaires, à vos stratégies, à vos combinaisons, à vos doctrines, à vos
ambitions. Ne l’appelez pas votre mère pour en faire votre servante. (Applaudissements à gauche.)
Surtout ne l’identifiez pas avec vous ; voyez le mal que vous lui faites. M. l’évêque de Langres vous l’a
signalé. (Mouvement.) Voyez comme elle dépérit depuis qu’elle vous a ! Vous vous faites si peu aimer
que vous finiriez par la faire haïr. En vérité, je vous le dis, elle se passera fort bien de vous ; laissez-la
en repos ; dès que vous n’y serez plus, on y viendra. Laissez-la cette vénérable Église, cette vénérable
mère, dans sa solitude, dans son abnégation, dans son humilité, tout cela compose sa grandeur, sa
solitude lui attirera la foule ; c’est son abnégation qui est sa puissance ; c’est son humilité qui est sa
majesté.
Vous parlez de l’enseignement religieux ? L’enseignement religieux véritable, l’enseignement re-
ligieux suprême, celui devant lequel il faut se prosterner, celui qu’il ne faut pas troubler, le voici...
(Mouvement.) C’est la sœur de charité au chevet du mourant ; c’est le frère de la Merci rachetant l’es-
clave ; c’est Vincent de Paul ramassant l’enfant trouvé ; c’est l’évêque de Marseille au milieu des pes-
tiférés ; c’est l’archevêque de Paris affrontant avec un sourire sublime le faubourg Saint-Antoine ré-
volté, levant son crucifix au-dessus de la guerre civile et s’inquiétant peu de recevoir la mort, pourvu
qu’il apporte la paix. Voilà le véritable enseignement religieux. (Très bien ! très bien !)
Voix à droite. Mais c’est précisément là le fruit de l’enseignement religieux.
M. VICTOR HUGO. Voilà l’enseignement religieux réel, profond, efficace, universel, populaire,
celui qui, heureusement pour l’humanité et pour la religion, fait encore plus de chrétiens que vous
n’en défaites.
Ah ! nous vous connaissons. Nous connaissons le parti clérical ; c’est un parti ancien et qui a des
états de services. (On rit à gauche.) C’est lui qui, depuis des siècles, garde jalousement, indiscrète-
ment et fatalement la porte de l’Église. C’est lui qui a trouvé pour la vérité ces deux étais merveilleux :
l’ignorance et l’erreur. (Rumeurs à droite.) C’est lui qui fait défense à la science et au génie d’aller
au delà du missel, et qui veut cloîtrer la pensée dans le dogme. (Nouvelles rumeurs.) Tous les pas
qu’a faits l’intelligence de l’Europe, elle les a faits sans lui et malgré lui. Son histoire est écrite dans
l’histoire du progrès humain, mais au verso.
Il s’est opposé à tous. (Murmures.) C’est lui, c’est le parti clérical qui a fait battre de verges P RI -
NELLI pour avoir dit que les étoiles ne tomberaient pas. C’est lui qui a fait appliquer C AMPANELLA
sept fois à la question pour avoir entrevu le secret de la création et affirmé que le nombre des
mondes était infini. C’est lui qui a persécuté H ARVEY , pour avoir prouvé que le sang circulait. De
5par Josué, il a enfermé G ALILÉE ; de par saint Paul, il a emprisonné Christophe C OLOMB . Découvrir
la loi du ciel, c’était une impiété ; trouver un monde, c’était une hérésie. C’est lui, c’est le parti cléri-
cal, qui a anathématisé Pascal, au nom de la religion ; Montaigne, au nom de la morale ; Molière, au
nom de la morale et de la religion. Oui, certes, qui que vous soyez, qui vous dites le parti catholique,
et qui êtes le parti clérical, nous vous connaissons. Voilà longtemps déjà que la conscience humaine
vous demande : Qu’est-ce que vous me voulez ? Voilà longtemps déjà que vous essayez de mettre un
bâillon à l’esprit humain.
A gauche. Très bien ! très bien !
M. VICTOR HUGO. Et vous voulez être les maîtres de l’enseignement ! Et il n’y a pas un écrivain,
pas un poète, pas un philosophe, pas un penseur que vous acceptiez, et tout ce qui a été écrit, trouvé,
rêvé, déduit, imaginé, illuminé, inventé par les génies, le trésor de la civilisation, l’héritage séculaire
des générations, le patrimoine commun des intelligences, vous le rejetez ! Si le cerveau de l’huma-
nité était là devant vos yeux, à votre discrétion, ouvert comme la page d’un livre, vous y feriez des
ratures, convenez-en ! (Rires approbatifs à gauche.)
Tenez, nierez-vous ceci, et accueillerez-vous ce que je vais dire, de ce côté de l’Assemblée (le coté
droit), avec des sourires ? Il y a un livre, un livre qui semble d’un bout à l’autre une émanation su-
périeure, un livre qui contient toute la sagesse humaine éclairée par toute la sagesse divine, un livre
que la vénération des peuples appelle le livre, la Bible : eh bien, votre censure a monté jusque-là !
chose inouïe ! il y a eu des papes qui ont proscrit la Bible !
Voix à droite. Les papes sont aussi le parti clérical ? Ils ne sont plus l’Eglise ?
M. VICTOR HUGO. Quel étonnement pour les esprits sages, quelle épouvante pour les cœurs
simples de voir l’index de Rome posé sur le livre de Dieu ! (Marques de dénégation.) Et vous ne crai-
gnez pas de déconcerter la foi ! et vous réclamez la liberté de l’enseignement, la liberté d’enseigner !
Tenez, entendons-nous, soyons sincères : voulez-vous que je vous dise quelle est la liberté que vous
réclamez ? C’est la liberté de ne pas enseigner. (Rires approbatifs à gauche.)
Ah ! le parti clérical veut, vous voulez qu’on vous donne des peuples à instruire ! Fort bien ! Voyons
vos élèves, voyons vos produits.
A droite. Oh ! oh !
M. DÉMAREST. Mais vous les avez dits vous-mêmes : ce sont les sœurs de charité, saint Vincent
de Paul.
M. VICTOR HUGO. Voyons vos élèves, dis-je. Qu’est-ce que vous avez fait de l’Italie ? Qu’est-ce
que vous avez fait de l’Espagne ? Depuis des siècles, vous tenez dans vos mains, à votre discrétion,
à votre école, sous votre férule, ces deux grandes nations, illustres parmi les plus illustres. Qu’en
avez-vous fait ? Je vais vous le dire. Grâce à vous, l’Italie, dont aucun homme qui pense ne peut
plus prononcer le nom aujourd’hui qu’avec une inexprimable douleur filiale ; l’Italie, cette mère
des nations et des génies, qui a répandu sur l’univers toutes les plus éblouissantes merveilles de la
poésie et des arts ; l’Italie qui a appris à lire au genre humain ; l’Italie aujourd’hui ne sait pas lire !
(Approbation à gauche.)
Oui, de tous les Etats de l’Europe, l’Italie est celui où il y a le moins de natifs sachant lire.
L’Espagne, l’Espagne si magnifiquement dotée, qui avait reçu des Romains sa première civilisa-
tion, des Arabes sa seconde civilisation, de la Providence, et, malgré vous, un monde, l’Amérique ;
l’Espagne a perdu, grâce à vous, grâce à votre joug d’abrutissement qui est un joug de dégradation
et d’amoindrissement. . . (Bravos à gauche) ; l’Espagne a perdu, grâce à vous, ce secret de la puis-
sance qu’elle tenait des Romains, ce génie des arts qu’elle tenait des Arabes, ce monde qu’elle tenait
de Dieu ; et en échange de tout ce que vous lui avez fait perdre, elle a reçu de vous l’inquisition.
(Marques très vives d’approbation à gauche.)
6Oui, l’inquisition. Eh bien, je vais vous parler de l’inquisition, l’inquisition que certains d’entre
vous essayent de réhabiliter aujourd’hui. . . (Vives dénégations à droite.) A gauche. Oui ! oui !
Voix diverses. Ce sont des calomnies. . . Rappelez l’orateur à l’ordre, monsieur le président.
M. LE PRÉSIDENT. Vous avez tort de dire : quelques-uns d’entre vous. Attaquez les partisans de-
hors, mais pas ici. Vous ne pouvez imputer à personne dans cette Assemblée un dessein prémédité
de ce genre-là.
(Rires ironiques à gauche.)
M. VICTOR HUGO. J’ai dit que je m’adressais au parti clérical tout entier ; c’est lui qui est en
question, et non pas quelques membres de cette Assemblée ; c’est au parti clérical que je m’adresse,
parce qu’il est un danger public, parce qu’il nous envahit. (A gauche. C’est vrai !) Je dis donc, et l’on
pourra vous citer les livres si vous le voulez, que certains d’entre vous, hommes du parti clérical, ont
essayé de réhabiliter aujourd’hui l’inquisition, et j’ajoute qu’ils l’ont fait avec une timidité pudique
dont je les honore. (Hilarité à gauche.)
Une voix à droite. C’est encore une calomnie que vous ramassez dans le passé de vos nouveaux amis.
M. VICTOR HUGO. Oui, ils ont essayé de réhabiliter l’inquisition, l’inquisition qui a fait périr dans
les flammes cinq millions d’hommes ! (Exclamations à droite.) C’est de l’histoire...
Plusieurs voix. C’est de la poésie !
M. VICTOR HUGO. C’est de l’histoire ! Allez à la bibliothèque, ouvrez le premier livre d’histoire.
M. DE LARCY. L’inquisition, nous la maudissons autant que nous maudissons les crimes de la
révolution.
Voix nombreuses à droite. Oui ! oui ! nous la maudissons comme vous.
M. VICTOR HUGO. Mon Dieu, messieurs, vous voulez, je veux, comme vous, la liberté de l’ensei-
gnement (Exclamations à droite) ; mais tâchez de vouloir aussi la liberté de la tribune. (Approbation
à gauche.)
Je maintiens mon droit : je répète que le parti clérical est en question ; je répète que c’est lui qui a
donné à l’Espagne l’inquisition. . .
A droite. A la question !
M. VICTOR HUGO. ...Et je répète que j’ai le droit de dire ce que c’est que l’inquisition.
A droite. A la question !
A gauche. C’est bien la question ! — Parlez !
M. VICTOR HUGO. Il est un détail que vous pouvez trouver encore dans votre bibliothèque : l’in-
quisition déclarait les enfants des hérétiques, jusqu’à la deuxième génération, infâmes et incapables
d’aucuns honneurs publics, excepté ceux qui avaient dénoncé leurs pères !
M. DE LARCY. A la question ! (Exclamations à gauche.)
A gauche. On veut vous mettre à la question !
M. VICTOR HUGO. C’est la question ! Vous n’avez pas le droit de m’indiquer le mode de discus-
sion que je dois suivre.
A droite. Mais cela n’a pas trait à la loi en discussion.
M. DE LARCY. A la question !
M. VICTOR HUGO. Tenez, monsieur de L ARCY , vous qui m’interrompez, ceci est tout à fait dans la
question : l’inquisition tient encore, à l’heure qu’il est, au moment où je parle, dans la bibliothèque
du Vatican, les manuscrits de G ALILÉE , clos et sous les scellés de l’index. (Rires bruyants à gauche.)
M. DE LARCY. Cela n’empêche pas la terre de tourner. (Nouvelle hilarité.)
M. VICTOR HUGO. Voilà comment le parti clérical entend l’enseignement.
Je disais, et je reprends : Oui, voilà les dons que l’Espagne a reçus du parti clérical ; il est vrai
qu’en échange, et pour la consoler de ce que vous lui ôtiez et de ce que vous lui donniez, vous l’avez
surnommée la Catholique. (Interruptions nombreuses à droite.)
7Une voix. Nous ne lui ôtons rien.
M. DÉMAREST. Nous ne sommes pas ces gens-là ; à qui parlez-vous ?
Un membre à l’orateur. Parlez en général, ne vous adressez pas à quelques personnes ici.
A gauche. A l’ordre les interrupteurs !
M. LE PRÉSIDENT. II n’y a pas à rappeler à l’ordre, mais à rappeler un peu à la question.
A gauche. L’orateur est dans la question.
M. VICTOR HUGO. Messieurs, si les interruptions ne rompaient pas le fil des idées de l’orateur
qui est à la tribune, vous verriez jusqu’à quel point ce que je dis est dans la question. Qu’est-ce que
je veux dire et prouver ? que le parti clérical a tenu dans ses mains deux des plus grands peuples
du monde ; qu’en a-t-il fait ? Ce foyer qu’on appelle l’Italie, il l’a éteint ; ce colosse qu’on appelle
l’Espagne, il l’a miné : l’une est en cendres, l’autre est en ruines. Voilà ce qu’il a fait de deux grands
peuples. Eh bien, qu’est-ce qu’il veut faire de la France ? Tenez, le parti clérical vient de Rome ; je lui
fais compliment : il a eu là un beau succès, il vient de bâillonner le peuple romain. (Réclamations à
droite. — A gauche. C’est vrai ! c’est vrai !)
A droite. Non ! non !
A gauche. Oui ! oui !
M. VICTOR HUGO. Oui, hommes du parti clérical, vous venez de bâillonner le peuple romain ;
maintenant, vous voulez bâillonner le peuple français ; cela est tentant, j’en conviens ; mais, prenez-
y garde, cela est malaisé !
Une voix. Vous savez bien que c’est impossible.
M. VICTOR HUGO. A qui en voulez-vous donc ? Je vais vous le dire. Vous en voulez, vous, membres
du parti clérical, à la raison humaine. Pourquoi ? Parce qu’elle fait le jour.
Voulez-vous que je vous dise ce qui vous importune ? C’est cette énorme quantité de lumière
libre que la France dégage depuis trois siècles, lumière toute faite de raison, lumière plus éclatante
aujourd’hui que jamais, lumière qui fait de la nation française la nation éclairante, de telle sorte
qu’on aperçoit la clarté de la France sur la face de tous les peuples de l’univers. Eh bien, cette clarté
de la France, cette lumière libre, cette lumière directe, cette lumière qui ne vient pas de Rome, qui
vient de Dieu, voilà ce que vous voulez éteindre, voilà ce que nous voulons conserver ! (Acclamations
à gauche. — Rires ironiques à droite.)
Je repousse votre loi. Je la repousse, parce qu’elle confisque l’enseignement primaire, parce qu’elle
dégrade l’enseignement secondaire, parce qu’elle abaisse le niveau de la science, parce qu’elle di-
minue mon pays. Je repousse votre loi parce que je suis de ceux qui ont un serrement de cœur et la
rougeur au front toutes les fois que, par une cause quelconque, la France subit une diminution, que
ce soit une diminution de territoire, comme par les traités de 1815, ou une diminution de grandeur
intellectuelle, comme par votre loi. (Nouvelles acclamations à gauche.)
M. VICTOR HUGO. Messieurs, en terminant, permettez-moi d’adresser au parti clérical, au parti
qui nous envahit, je le répète, un conseil sérieux.
Certes, ce n’est pas l’habileté qui lui manque. Quand les circonstances l’aident, il est fort, très
fort, je dirai même trop fort. Il sait l’art de maintenir une nation dans un état mixte et déplorable,
qui n’est pas la mort, mais qui n’est plus la vie ; il appelle cela gouverner. C’est le gouvernement par
la léthargie.
A gauche. C’est cela ! — C’est vrai !
M. VICTOR HUGO. Mais qu’il y prenne garde, rien de pareil ne convient à la France. C’est un jeu
redoutable que de laisser entrevoir, entrevoir seulement ! à cette France quelque chose de semblable
à l’idéal que voici : La sacristie souveraine, la liberté trahie, l’intelligence vaincue et liée, les livres
déchirés, le prône remplaçant la presse, la nuit faite dans les esprits par l’ombre des soutanes et les
génies matés par les bedeaux ! (Applaudissements à gauche. — Réclamations prolongées à droite.)
8Un membre au pied de la tribune. C’est là le parti clérical, les soutanes ? Mais alors, c’est le pape,
c’est le clergé tout entier que vous attaquez. (Vive agitation.)
M. LÉO DE LABORDE. Vous insultez le clergé catholique. C’est infâme !
A gauche. A l’ordre, l’interrupteur ! à l’ordre !
M. LÉO DE LABORDE. Je le répète, c’est infâme ! On doit parler avec plus de respect quand on
parle des soutanes. (A l’ordre ! à l’ordre !)
M. VICTOR HUGO. Certes, messieurs, le parti clérical est habile, mais cela ne l’empêche pas d’être
naïf. Quoi ! il redoute le socialisme, il voit monter le flot, à ce qu’il dit, et il oppose à ce flot qui monte,
je ne sais quel obstacle à claire-voie ! Il voit monter le flot, et il s’imagine que la France sera sauvée,
quand il aura combiné pour la défendre les hypocrisies sociales avec les résistances matérielles,
et qu’il aura mis un jésuite partout où il n’y aura pas un gendarme ! (Applaudissements répétés à
gauche. — Vives dénégations sur les bancs de la majorité.)
Voix à droite. C’est digne de l’Ambigu-Comique !
M. VICTOR HUGO. Je le répète, qu’il y prenne garde et qu’il écoute un conseil. Le XIX e siècle lui
est contraire ; qu’il renonce à vouloir maîtriser cette grande époque pleine d’instincts profonds et
nouveaux ; qu’il y renonce, ou sinon il ne réussira qu’à la courroucer. Il développera imprudemment
le côté redoutable et dangereux de notre temps, et il fera surgir des éventualités terribles.
Oui, avec ce système qui fait sortir l’éducation de la sacristie, et le Gouvernement du confession-
nal... (Réclamations bruyantes et nombreuses à droite. — C’est épouvantable ! — A l’ordre ! à l’ordre !)
Voix à droite. C’est donc l’Eglise que vous attaquez maintenant !
M. DENJOY. C’est de la vieille friperie d’il y a vingt ans !
M. LE PRÉSIDENT, s’adressant à l’orateur. Mais par ces expressions-là vous attaquez non seule-
ment ce que vous appelez le parti clérical, mais la religion elle-même.
M. PIDOUX à l’orateur. Allez à la porte Saint-Martin !
(Plusieurs membres de la droite interpellent avec vivacité l’orateur ; ces interpellations sont cou-
vertes par les applaudissements de la gauche. — Aux cris bruyants : A l’ordre ! à l’ordre ! partis de la
droite, répondent les bravos répétés de la gauche.)
M. DE DAMPIERRE, de sa place. Je demande qu’on rappelle l’orateur à l’ordre. (Vive agitation.)
M. LÉO DE LABORDE. Il a insulté une classe de citoyens tout entière.
A gauche. N’interrompez pas ! — A l’ordre !
M. VICTOR HUGO. Je croyais. . .
M. DENJOY. Vous avez insulté le culte catholique. . . (Agitation générale.)
Voix nombreuses à gauche. A l’ordre les interrupteurs !
M. LE PRÉSIDENT. Si vous continuez à interrompre, monsieur Léo de L ABORDE et monsieur
D ENJOY , je vous rappellerai à l’ordre.
J’ai donné à l’orateur l’avertissement que j’ai cru devoir lui donner, en lui disant qu’il employait
des expressions consacrées au culte, et qui impliquaient une attaque indirecte contre le culte même
et la religion : je l’ai engagé à s’abstenir de ces expressions.
M. DÉMAREST. Qu’il rétracte ses expressions !
Un membre à gauche, s’adressant au président. Vous avez dit vous-même qu’on ne confessait pas le
gouvernement.
M. LE PRÉSIDENT. L’Assemblée est partagée en deux camps, voilà ce que je vois. Les uns applau-
dissent, les autres critiquent ; il y a un milieu, c’est de laisser parler.
Un membre. Maintenez la liberté de la tribune !
M. LE PRÉSIDENT. La liberté de la tribune a des limites. Il n’y a que les excès qui n’ont pas de
limites, j’y suis accoutumé ; mais je déplore seulement quand je les vois se produire des deux côtés.
Un membre à droite. Il n’y a pas excès de ce côté-ci !
9M. LE PRÉSIDENT. Il y a excès, car il y a tumulte !
M. VICTOR HUGO. Je croyais avoir fait, et dès les premiers mots, une distinction comprise de
l’Assemblée.
A droite. Allons donc !
Un membre. C’est une distinction jésuitique !
M. VICTOR HUGO. Je croyais avoir fait, dis-je, une distinction comprise de l’Assemblée, et j’ajoute
applaudie par vous-mêmes, et le Moniteur le constatera demain. . . (Interruption à droite.)
M. LE PRÉSIDENT, s’adressant au côté droit. Vous voyez bien que le tumulte part de ce côté-là.
M. VICTOR HUGO. Le Moniteur constatera demain que vous-mêmes, de ce côté (la droite), avez
applaudi à la distinction que j’ai faite en commençant, entre la religion et le parti clérical.
A droite. Mais non ! mais non !
M. LE PRÉSIDENT, à l’orateur. Rapprochez-vous du projet de loi.
M. VICTOR HUGO. Eh bien, messieurs, cette distinction, j’y insiste, et j’ai le droit, en couvrant de
ma vénération l’Eglise, notre mère à tous. . . (Murmures à droite)
M. DRUET-DESVAUX. Ayez plutôt le courage de l’attaquer !
Un membre. Vous l’insultez par vos éloges !
M. LE PRÉSIDENT, se tournant vers la droite. Vous prenez le langage de vos adversaires ; vous
insultez l’orateur par vos termes.
(Agitation. — Plusieurs membres siégeant sur les derniers bancs de l’extrême droite se lèvent et
sortent de l’enceinte.)
M. LÉO DE LABORDE, au moment où il va franchir la porte. On ne peut pas continuer à se laisser
outrager ainsi. . . (Vives réclamations à gauche.)
M. LE PRÉSIDENT. Je vous rappelle à l’ordre, monsieur de L ABORDE . Quel rôle jouez-vous donc
là ? Voilà un quart d’heure que vous êtes debout, occupé à interrompre ! et à haranguer !
Plusieurs membres à gauche. Rappelez à l’ordre !
M. LE PRÉSIDENT. L’orateur s’est rappelé lui-même à l’ordre en sortant.
M. VICTOR HUGO. Je répète que le parti clérical est un danger public, c’est mon droit de législa-
teur et, au moment où il se présente une loi à la main, j’ai le droit d’examiner cette loi et d’examiner
ce parti.
A gauche. Très bien ! très bien !
M. VICTOR HUGO. Eh bien, messieurs, je maintiens qu’avec les doctrines, le système et l’histoire
que j’ai rappelés, partout où sera le parti clérical, il faut qu’il le sache, il engendrera des révolutions.
Partout, pour éviter T ORQUEMADA , on se jettera dans R OBESPIERRE ! et c’est en cela qu’il est un dan-
ger public. (Murmures à droite.)
Eh ! mon Dieu, messieurs (l’orateur se tourne vers la droite), est-ce que je vous suis suspect, par
hasard ?
Voix nombreuses à droite. Oui ! oui ! très suspect ! (Exclamations et rires à gauche.)
Un membre. Beaucoup plus que les montagnards !
M. VICTOR HUGO. Ah ! je vous suis suspect ! (Oui ! oui ! — Beaucoup !)
Eh bien, tenez, je finis par là, il faut s’expliquer sur ce point ; c’est en quelque sorte un fait person-
nel, et vous écouterez, je pense, une explication que vous avez vous-mêmes provoquée.
Je vous suis suspect ! (Oui ! oui !) Et de quoi ? Mais, l’an dernier, à cette tribune, ici, je défendais
l’ordre en péril, comme je défends aujourd’hui la liberté menacée. (Interruption à droite.)
M. LE PRÉSIDENT. Qu’est-ce qu’il y a de personnel dans ce que dit l’orateur maintenant ? Ecoutez
donc !
M. VICTOR HUGO. Comment ! vous m’avez provoqué à m’expliquer, et vous ne voulez pas m’écou-
ter ! (Parlez ! parlez !)
10Je défendais l’ordre en péril l’an dernier, à cette tribune, comme je défends aujourd’hui la liberté
menacée, comme je défendrais l’ordre demain si le danger revenait de ce côté-là.
Je vous suis suspect ! Mais, voyons, il faut bien que je vous rappelle ces faits : vous étais-je suspect
le 23 juin, quand, pour empêcher l’effusion du sang, je marchais aux barricades ?. . . (Exclamations
et interruptions diverses à droite.)
M. PEUPIN. Il ne s’agit pas de cela ; il s’agit de doctrines morales et religieuses, pas d’autre chose.
M. VICTOR HUGO. Comment est-il possible qu’il y ait quelqu’un dans cette enceinte qui doute de
ma conscience politique ? Je vous parle en honnête homme et non en agitateur. (Rumeurs à droite.)
Je vous suis suspect ! (Oui ! oui !)
M. LE PRÉSIDENT. C’est une longue personnalité ; gardez vos sentiments pour vous.
Vous avez eu certainement des torts, monsieur Victor H UGO , quelques expressions provocantes ;
mais on s’en est vengé avec usure sur vous, et on m’a dispensé de rien ajouter, car on s’est fait justice
à soi-même.
Un membre à droite. Vous n’avez pas assez fait, monsieur le président !
M. LE PRÉSIDENT. Je voudrais bien vous y voir, interlocuteur ! (Rire général.)
M. VICTOR HUGO. Messieurs, je n’insiste pas ; je suis de ceux qui ont en le bonheur de rendre,
dans des temps difficiles, dans un passé récent, quelques services obscurs à la cause de l’ordre....
(Nouvelles rumeurs à droite.)
Un membre. Où ?
M. VICTOR HUGO. On a pu les oublier, vous les avez oubliés ; je ne les rappelle pas ; mais j’ai le
droit de m’appuyer sur ce passé au moment où je parle.
Un membre. Il n’existe pas !
M. VICTOR HUGO. Eh bien, appuyé sur ce passé, sur ce passé tout récent, je vous le déclare, dans
ma conviction, ce qu’il faut à la France, c’est l’ordre, mais l’ordre vivant, qui est le progrès ; ce qu’il
faut à la France, c’est l’ordre, mais l’ordre vrai, qui résulte de l’éducation, de la croissance normale,
paisible, naturelle du peuple ; c’est l’ordre sérieux, profond, se faisant à la fois dans les faits et dans
les idées, par le plein rayonnement de l’intelligence nationale. C’est tout le contraire de votre loi.
(Approbation à gauche.)
Nous sommes plus d’un dans cette Assemblée, et le vote vous le prouvera, qui voulons pour ce
noble pays la liberté et non la compression, le mouvement pacifique et non la stagnation, la puis-
sance et non la servitude, la grandeur et non le néant. (Nouvelle approbation à gauche.)
Plusieurs membres à droite. Nous voulons cela aussi !
M. VICTOR HUGO. Quoi ! voilà les lois que vous nous apportez ! quoi ! vous, gouvernants, vous,
législateurs, vous voulez vous arrêter, vous voulez arrêter la France, vous voulez pétrifier la pensée
humaine, éteindre le flambeau divin, matérialiser l’esprit ! (Réclamations à droite.) Mais vous ne
connaissez donc pas, vous ne voyez donc pas les éléments mêmes du temps où vous êtes ! Mais vous
êtes donc dans votre siècle comme des étrangers ! Quoi ! c’est dans ce siècle, dans ce grand siècle des
nouveautés, des avènements, des conquêtes, des découvertes, que vous rêvez l’immobilité ! C’est
dans le siècle de l’espérance que vous proclamez le désespoir ! (Nouvelles réclamations à droite. —
Approbation à gauche.) Quoi ! vous jetez à terre, comme des hommes de peine fatigués, la gloire, le
génie, la pensée, l’intelligence, le progrès, l’avenir, et vous dites : C’est assez ! n’allons pas plus loin ;
arrêtons-nous ! (Mêmes mouvements.)
Mais vous ne voyez donc, pas que tout va, vient, se meut s’accroît, se transforme, et se renouvelle
autour de vous, au-dessus de vous, au-dessous de vous ! Ah ! vous voulez vous arrêter ! vous voulez
arrêter la nation !. . .
Au centre et à droite. Non ! non !
A gauche. Si ! si !
11M. SOUBIES. Puisque la commission trouve l’enseignement des écoles normales primaires trop
élevé !
M. VICTOR HUGO. Eh bien, je vous le répète avec une douleur profonde. . . (Rumeurs à droite.)
Moi qui déteste les écroulements et les catastrophes, et qui l’ai prouvé, je vous en avertis, la mort
dans l’âme. . . A droite. Oh ! oh I
M. VICTOR HUGO. Si vous ne voulez pas du progrès, vous aurez les révolutions !
Aux hommes assez insensés pour dire : « L’humanité ne marchera plus », Dieu répond par la terre
qui tremble !
Je repousse le projet. (Vive approbation et applaudissements à gauche.)
M. LE PRÉSIDENT. La suite de la délibération est renvoyée à demain.

Sources
• Vous pouvez le retrouver sur le Site de l’assemblée nationale

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Message par Invité Mer 28 Déc 2016 - 22:34


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Message par Invité Mer 28 Déc 2016 - 22:40


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