Conte rendu d'errance
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Conte rendu d'errance
Bon, au final, je me décide ...
Je ne sais pas si j'aurais la persévérance de le faire durablement ni quel sera le rythme des publications ...
Je me propose de tenir ce carnet de voyage, et je vous propose de le lire.
Je lirai avec plaisir vos commentaires, ils seront tous les bienvenus et j'y répondrai.
Le mieux serait de le faire sous spoiler afin que le fil garde une apparence de cohérence.
Je ne sais pas si j'aurais la persévérance de le faire durablement ni quel sera le rythme des publications ...
Je me propose de tenir ce carnet de voyage, et je vous propose de le lire.
Je lirai avec plaisir vos commentaires, ils seront tous les bienvenus et j'y répondrai.
Le mieux serait de le faire sous spoiler afin que le fil garde une apparence de cohérence.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
On commence par un récap pour ceux qui ne suivent pas.
Nous voyageons avec le Camion, un vieux Toy LandCuiser.
M. et moi sommes partis pour errer à la surface de la planète durant les cinq prochains mois.
La situation étant ce qu'elle est nous avons modéré nos ambitions, le projet était la Mongolie, nous nous contenterons de Roumanie dans un premier temps, la suite reste à définir, nous n'avons jamais vu Kiev, nous avons une obligation à Varna (Bulgarie), des amis très proches nous attendent à Istanbul, M. rêve du Péloponnèse, on a beaucoup rigolé et picolé en Albanie dans le passé, etc.
Ne pas avoir de plan afin d'être certain de le respecter.
On a traversé vite fait en deux jours, Italie, Slovénie, Croatie, Serbie.
C'est une route que nous connaissons si bien pour l'avoir parcourue des dizaines de fois. Dans le passé on y sentait encore la poudre, celle des guerres des Balkans. Les bords de l'autoroute étaient encombrés de véhicules militaires incendiés ou de chars montrant sans pudeur leurs tripes à l'air, le canon en berne à moitié planté dans le sol. Et puis les façades sud des immeubles percées des orifices laissés par les roquettes laissaient entrevoir les restes d'une cuisine ou les carreaux bleus des mers du sud d'une salle de bain dévastée.
Aux barrages, des hommes en armes militaires ou miliciens, l'haleine chargée, grommelaient quelques mots en inspectant nos passeports.
Nos enfants étaient jeunes mais comprenaient bien.
Tout est désormais si différent.
La Slovénie est un spot de tourisme sport et nature. La vie y est aussi chère qu'en France, mais les ours plus nombreux.
La côte Croate attend tous les gagnants de la mondialisation avec de la musique techno et de la MDAM. Dans l'intérieur des terres on espère l'entrée en Europe afin de quitter la misère rurale. S'ils savaient ...
La Serbie est restée plus fun, elle s'est rapprochée des Russes, surjoue la slavitude afin de mieux se démarquer des ses voisins. On y boit plus qu'ailleurs, on y est plus volontiers raciste, sexiste ou homophobe. C'est une forme d'exotisme.
Et nous découvrons la Roumanie depuis avant hier.
Nous sommes rentrés par un minuscule poste frontière au nord est de Belgrade. Je n'ai pas le souvenir d'avoir franchi une frontière si rapidement, nous qui avons parfois patienté 24 heures pour rentrer en Bulgarie depuis la Turquie aux moments de la grande transhumance des immigrés.
Première ville Orovista. Nous sommes dans le sud ouest du pays. Une zone de parcs naturels (forêt mixte) dans les petites montagnes et de campagne de polyculture vivrière façon années 50 en France sur les plateaux ou dans les vallées.
Première impression tous est pété comme dans tous ces pays, nous ne sommes pas dépaysés.
La bière est moins chère que l'eau minérale, pour trois euros on a un demi-cochon grillé dans son assiette.
Mais il semble qu'on y soit plus aimable que dans l'ex-Yougoslavie, plus souriant et détendu. Les Roumains sont si paresseux qu'ils n'ont même pas su faire la guerre après la chute du communisme. C'est peut-être la raison ?
Les villages de campagne sont étrangement alignés sur une rue principale afin que chacun ait accès à un potager à l'arrière. Ils sont désertés, restent les vieux et quelques irréductibles, mais beaucoup de maisons ont les volets clos, leurs habitants ont émigré à l'Ouest et rentrent quelques semaines par an.
En dehors des grands axes, les routes sont de bonnes pistes améliorées.
Hier nous avons trainé dans les alpages, traversé une vieille mine d'uranium et ses déchets toxiques. Aujourd'hui, une petite route très sinueuse mais goudronnée nous a conduit à travers le parc Cheile Nerei-Beusnita. Au milieu du bois une clairière et un établissement hospitalier plus de première fraîcheur. Alors que j'observais la façade, un patient est venu nous saluer et nous taper des clopes. Pas de bol nous avons arrêté de fumer, il a dû se contenter de quelques billets de banque, c'est tout de suite moins convivial. Dans un souci de /.../ je ne sais pas si je ne recommencerai pas /.../ (nan ! j'déconne).
Plus loin alors que nous commencions à nous lasser de ce sous bois très obscur, le paysage s'ouvre et je découvre au loin quelques bâtiments pétés et des cicatrices dans la montagne. J'ai toujours aimé les friches industrielles, à l'époque le mot "urbex" n'avait pas été inventé. Je me sens bien plus fier désormais lorsque je rode dans ces lieux dévastés ...
Nous poursuivons afin de découvrir un site deux étoiles au guide Vert Michelin. Une vague et dérisoire cascade puante au bord de la route. On y vend des magnets fabriqués en Chine, de la junk-food et on peut faire un selfie devant un énorme ours en peluche moyennant un demi euro.
Dans l'après-midi nous avons visité des moulins à eau installés sur un ruisseau. Pas mal.
Puis à nouveau une longue traversée de forêt sur une piste chaotique afin de rejoindre les bords du Danube. Les Portes de Fer un défilé que nous avons déjà parcouru sur la rive d'en face, en Serbie.
Nous avons trouvé un bon bivouac dans un pré fauché, J'ai partagé un verre de vin avec un berger qui rentait ses chèvres. Il sentait aussi fort qu'elles.
C'est la pleine lune, il fait étrangement frais, environ 17 degrés. Au loin quelques chiens gueulent d'amour ou de désespoir (mais est-ce si différent ?).
Nous ne mettrons pas en fonctionnement le chauffage qui nous a donné tant de soucis d'installation avant le départ afin d'avoir le plaisir de se serrer l'un contre l'autre dans nos duvets.
Nous voyageons avec le Camion, un vieux Toy LandCuiser.
M. et moi sommes partis pour errer à la surface de la planète durant les cinq prochains mois.
La situation étant ce qu'elle est nous avons modéré nos ambitions, le projet était la Mongolie, nous nous contenterons de Roumanie dans un premier temps, la suite reste à définir, nous n'avons jamais vu Kiev, nous avons une obligation à Varna (Bulgarie), des amis très proches nous attendent à Istanbul, M. rêve du Péloponnèse, on a beaucoup rigolé et picolé en Albanie dans le passé, etc.
Ne pas avoir de plan afin d'être certain de le respecter.
On a traversé vite fait en deux jours, Italie, Slovénie, Croatie, Serbie.
C'est une route que nous connaissons si bien pour l'avoir parcourue des dizaines de fois. Dans le passé on y sentait encore la poudre, celle des guerres des Balkans. Les bords de l'autoroute étaient encombrés de véhicules militaires incendiés ou de chars montrant sans pudeur leurs tripes à l'air, le canon en berne à moitié planté dans le sol. Et puis les façades sud des immeubles percées des orifices laissés par les roquettes laissaient entrevoir les restes d'une cuisine ou les carreaux bleus des mers du sud d'une salle de bain dévastée.
Aux barrages, des hommes en armes militaires ou miliciens, l'haleine chargée, grommelaient quelques mots en inspectant nos passeports.
Nos enfants étaient jeunes mais comprenaient bien.
Tout est désormais si différent.
La Slovénie est un spot de tourisme sport et nature. La vie y est aussi chère qu'en France, mais les ours plus nombreux.
La côte Croate attend tous les gagnants de la mondialisation avec de la musique techno et de la MDAM. Dans l'intérieur des terres on espère l'entrée en Europe afin de quitter la misère rurale. S'ils savaient ...
La Serbie est restée plus fun, elle s'est rapprochée des Russes, surjoue la slavitude afin de mieux se démarquer des ses voisins. On y boit plus qu'ailleurs, on y est plus volontiers raciste, sexiste ou homophobe. C'est une forme d'exotisme.
Et nous découvrons la Roumanie depuis avant hier.
Nous sommes rentrés par un minuscule poste frontière au nord est de Belgrade. Je n'ai pas le souvenir d'avoir franchi une frontière si rapidement, nous qui avons parfois patienté 24 heures pour rentrer en Bulgarie depuis la Turquie aux moments de la grande transhumance des immigrés.
Première ville Orovista. Nous sommes dans le sud ouest du pays. Une zone de parcs naturels (forêt mixte) dans les petites montagnes et de campagne de polyculture vivrière façon années 50 en France sur les plateaux ou dans les vallées.
Première impression tous est pété comme dans tous ces pays, nous ne sommes pas dépaysés.
La bière est moins chère que l'eau minérale, pour trois euros on a un demi-cochon grillé dans son assiette.
Mais il semble qu'on y soit plus aimable que dans l'ex-Yougoslavie, plus souriant et détendu. Les Roumains sont si paresseux qu'ils n'ont même pas su faire la guerre après la chute du communisme. C'est peut-être la raison ?
Les villages de campagne sont étrangement alignés sur une rue principale afin que chacun ait accès à un potager à l'arrière. Ils sont désertés, restent les vieux et quelques irréductibles, mais beaucoup de maisons ont les volets clos, leurs habitants ont émigré à l'Ouest et rentrent quelques semaines par an.
En dehors des grands axes, les routes sont de bonnes pistes améliorées.
Hier nous avons trainé dans les alpages, traversé une vieille mine d'uranium et ses déchets toxiques. Aujourd'hui, une petite route très sinueuse mais goudronnée nous a conduit à travers le parc Cheile Nerei-Beusnita. Au milieu du bois une clairière et un établissement hospitalier plus de première fraîcheur. Alors que j'observais la façade, un patient est venu nous saluer et nous taper des clopes. Pas de bol nous avons arrêté de fumer, il a dû se contenter de quelques billets de banque, c'est tout de suite moins convivial. Dans un souci de /.../ je ne sais pas si je ne recommencerai pas /.../ (nan ! j'déconne).
Plus loin alors que nous commencions à nous lasser de ce sous bois très obscur, le paysage s'ouvre et je découvre au loin quelques bâtiments pétés et des cicatrices dans la montagne. J'ai toujours aimé les friches industrielles, à l'époque le mot "urbex" n'avait pas été inventé. Je me sens bien plus fier désormais lorsque je rode dans ces lieux dévastés ...
Nous poursuivons afin de découvrir un site deux étoiles au guide Vert Michelin. Une vague et dérisoire cascade puante au bord de la route. On y vend des magnets fabriqués en Chine, de la junk-food et on peut faire un selfie devant un énorme ours en peluche moyennant un demi euro.
Dans l'après-midi nous avons visité des moulins à eau installés sur un ruisseau. Pas mal.
Puis à nouveau une longue traversée de forêt sur une piste chaotique afin de rejoindre les bords du Danube. Les Portes de Fer un défilé que nous avons déjà parcouru sur la rive d'en face, en Serbie.
Nous avons trouvé un bon bivouac dans un pré fauché, J'ai partagé un verre de vin avec un berger qui rentait ses chèvres. Il sentait aussi fort qu'elles.
C'est la pleine lune, il fait étrangement frais, environ 17 degrés. Au loin quelques chiens gueulent d'amour ou de désespoir (mais est-ce si différent ?).
Nous ne mettrons pas en fonctionnement le chauffage qui nous a donné tant de soucis d'installation avant le départ afin d'avoir le plaisir de se serrer l'un contre l'autre dans nos duvets.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Localisation : Drôme
Confiteor- Messages : 9190
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Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
- sous spoiler donc:
- L'exode des jeunes roumains ce n'est donc pas une légende. Remarque ça peut être sympa, c'est un pays où l'on peut passer encore pour "jeune".
Berger en Roumanie... c'est certainement le métier le plus bas dans l'échelle sociale européenne, ça doit demander une certaine dose d'abnégation ou de poésie (l'ancêtre qui m'a donné mon nom était berger). Parait qu'il y a des fromages tout à fait typiques, qui survivent malgré une législation européenne un peu trop drastique pour ces productions locales.
Pour tes dernières photos, c'est certainement un transformateur électrique ou un poste de répartition HT. Cela me fait me poser une question: Comment la Roumanie, si pauvre, a t'elle pu traiter tout le PCB de ses transformateurs électriques? Je pense qu'une bonne partie à dû s'échapper dans la nature, avec conséquences.
T'as pas fait de selfie avec l'ours géant en peluche? Dommage, pour le prix ça valait le coup
Pour le climat, j'ai vérifié la météo et tu as bien choisi ta destination, ici on crève de chaud, même si la pluie de la semaine prochaine va rafraichir un peu, là où tu es c'est grand soleil pour un moment apparemment.
J'aime bien la première tof, ce joli bleu avec tout ce bordel tout autour, le lampadaire qui parle à la parabole, y'aurait pas le panneau qu'on pourrait dire d'où ça vient.
Bun "voyajul"
La revedere
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Bon reprenons avec un peu de retard puisque nous n'avions pas de réseau ces derniers soir.
Déso pour le style et l’orthographe, je tape au fil de ma pensée et j’ai la femme de relire et pas trop le temps.
Petite journée pas ambitieuse mais plaisante.
Un café dans un village en descendant du bivouac, 40 centimes d’euros. Tu m’étonnes que les Roumains viennent bosser trois mois sur les chantiers et ensuite rentrent au calme buller le reste de l’année dans leur campagne. Leur tonton (ou leur femme) a gardé les deux vaches, les trois chèvres et le cochon, cultivé un demi hectare de terre afin de disposer de maïs pour les poules. Et roule la petite vie. Est-ce si con ? Dans le fond, n’est-ce pas ça le non développement durable ? Une vieille Golf dont les Allemands ne veulent plus et on est un prince.
Bon, nous ne sommes pas Roumains. Ce matin jolie balade en bateau sur la Danube avec un ranger du parc naturel, nous sommes allés sur une île sur laquelle vivent des chevaux en liberté et pas mal d’oiseaux. Une jeune Roumaine accompagnée de son compagnon Autrichien ont assuré la conversation et traduit les commentaires du guide.
Je ne savais pas que les cygnes pouvaient vivre en colonie de plusieurs centaines d’individus. Etonnant spectacle.
Dans les années ’50 Yougoslavie et Roumanie se sont mis d’accord pour réaliser un important barrage sur le fleuve afin d’apaiser les rapides qui limitaient la navigation dans le défilé des Portes de Fer (une gorge d’environ 50 km). De nombreux villages ont été engloutis le paysage a été bouleversé et les points hauts sont devenus des îles sur le lac qu’est devenu le Danube.
Les eaux sont troubles et très poissonneuses. La route est étroite, sinueuse, construite entre falaise et rive. Dans chaque recoin accessible sont installés d’improbables campements de pêcheurs. Quelques bâches accrochées sur le hayon d’un vieux break servent de moustiquaire, quelques chaises pliantes et un camping gaz complètent l’installation. L’homme surveille les cannes à carpe, jour et nuit, une bière à la main, semblant préoccupé par la noble tâche, la femme cuisine ou tricote à quatre aiguilles des chaussettes pour l’hiver. Ils semblent installés là durablement, le matériel de pêche est très moderne avec des détecteurs de touche électronique, des cannes en fibre de carbone. La concurrence est rude. On parle semble-t-il peu entre voisins. Sur des dizaines de kilomètres au milieu des ronces et des mauvaises herbes du talus allant de la route à l’eau ce n’est qu’une succession de cannes et de regards affairés et préoccupés.
Peut-être aurais-je été plus apaisé si j’avais été pêcheur ?
Plus en aval, nous avons traversé la Riviera roumaine, des maisons d’hôte ou de petites pensions de famille coincés entre falaise et fleuve au bord de la route dans lesquels la classe moyenne supérieure passe une semaine de vacances. On doit s’y ennuyer ferme, manger beaucoup, et boire pas moins. Parfois une piscine à l’eau verdie par une filtration défaillante complète les activités.
Nous avons choisi le restaurant le plus luxueux, un ponton sonorisé, avec serveuses accortes afin d’y manger une darne de carpe grillée. Fade et insipide, mais luxueux.
En s’éloignant du fleuve vers le nord nous atteignons Baile Herculea une cité thermale étonnante. Depuis l’antiquité on vient y prendre les eaux sulfureuses. Au XIXème, du temps des splendeurs de l’empire Austro-Hongrois on y construisit une cité luxueuse où se retrouvait toute la jet set de l’Europe de l’Est. On y menait grand train et sans doute grande débauche … Des hôtels somptueux avec des façades prétentieuses, des jardins publics avec kiosque en fer forgé, bassins et statues à l’antique, de vastes allées permettant d’afficher sa toilette, tout était réuni afin que les puissants s’amusent. Et puis les temps du communisme. Et ces lieux sont devenus maudits (haram ?) et laissés à l’abandon. Ils se sont ruinés, se sont dévastés, des façades décrépies, des toitures percées, des rambardes en fonte ornementée rouillées donnant sur de glauques fossés qui furent des canaux d’eau claire.
Dans l’après-guerre on a construit de vastes immeubles en béton, ils accueillaient les travailleurs méritants et dociles pour un séjour balnéaire. Tout ne s’est pas toujours passé comme dans le Plan au pays des communistes. L’entretien de ces bâtiment a peut-être été un peu négligé. Et puis ce fut la chute, et désormais ce furent ces lieux qui sont devenus honnis et laissés à l’abandon ! Les herbes folles poussent sur les balcons, les ferraillages du béton armé pleurent leur rouille sur les façades, quelques fenêtres aux vitre brisées claquent encore parfois au vent, la plupart sont closes.
Désormais, des hôtels bon marché, des galeries commerciales vendant des produits chinois, des étalages de kiosque proposant de la junk-food ou des robes en cotonnade bariolée attendent la classe moyenne.
Tout au long de cette vallée trône la stratigraphie étrangement horizontale des derniers siècles.
Vous connaissez ma passion pour le thermalisme, mais je n’étais pas dans le trip. Du coup je ne me suis pas laissé aller à l’abandon du sauna, du hammam et des eaux. Et puis l'ambiance dans la ville ne me faisait pas envie.
Nous avons quitté la grande route et très vite avons retrouvé la ruralité, un petit pré bien fauché loin du village, nous dormirons au calme encore ce soir.
Pas de réseau, pas même de téléphone.
En contrebas du pont de l'image précédente, en plein milieu de la ville, les eaux d'une source secondaire sont captées et libre d'accès, elles s'écoulent dans la rivière.
Déso pour le style et l’orthographe, je tape au fil de ma pensée et j’ai la femme de relire et pas trop le temps.
Petite journée pas ambitieuse mais plaisante.
Un café dans un village en descendant du bivouac, 40 centimes d’euros. Tu m’étonnes que les Roumains viennent bosser trois mois sur les chantiers et ensuite rentrent au calme buller le reste de l’année dans leur campagne. Leur tonton (ou leur femme) a gardé les deux vaches, les trois chèvres et le cochon, cultivé un demi hectare de terre afin de disposer de maïs pour les poules. Et roule la petite vie. Est-ce si con ? Dans le fond, n’est-ce pas ça le non développement durable ? Une vieille Golf dont les Allemands ne veulent plus et on est un prince.
Bon, nous ne sommes pas Roumains. Ce matin jolie balade en bateau sur la Danube avec un ranger du parc naturel, nous sommes allés sur une île sur laquelle vivent des chevaux en liberté et pas mal d’oiseaux. Une jeune Roumaine accompagnée de son compagnon Autrichien ont assuré la conversation et traduit les commentaires du guide.
Je ne savais pas que les cygnes pouvaient vivre en colonie de plusieurs centaines d’individus. Etonnant spectacle.
Dans les années ’50 Yougoslavie et Roumanie se sont mis d’accord pour réaliser un important barrage sur le fleuve afin d’apaiser les rapides qui limitaient la navigation dans le défilé des Portes de Fer (une gorge d’environ 50 km). De nombreux villages ont été engloutis le paysage a été bouleversé et les points hauts sont devenus des îles sur le lac qu’est devenu le Danube.
Les eaux sont troubles et très poissonneuses. La route est étroite, sinueuse, construite entre falaise et rive. Dans chaque recoin accessible sont installés d’improbables campements de pêcheurs. Quelques bâches accrochées sur le hayon d’un vieux break servent de moustiquaire, quelques chaises pliantes et un camping gaz complètent l’installation. L’homme surveille les cannes à carpe, jour et nuit, une bière à la main, semblant préoccupé par la noble tâche, la femme cuisine ou tricote à quatre aiguilles des chaussettes pour l’hiver. Ils semblent installés là durablement, le matériel de pêche est très moderne avec des détecteurs de touche électronique, des cannes en fibre de carbone. La concurrence est rude. On parle semble-t-il peu entre voisins. Sur des dizaines de kilomètres au milieu des ronces et des mauvaises herbes du talus allant de la route à l’eau ce n’est qu’une succession de cannes et de regards affairés et préoccupés.
Peut-être aurais-je été plus apaisé si j’avais été pêcheur ?
Plus en aval, nous avons traversé la Riviera roumaine, des maisons d’hôte ou de petites pensions de famille coincés entre falaise et fleuve au bord de la route dans lesquels la classe moyenne supérieure passe une semaine de vacances. On doit s’y ennuyer ferme, manger beaucoup, et boire pas moins. Parfois une piscine à l’eau verdie par une filtration défaillante complète les activités.
Nous avons choisi le restaurant le plus luxueux, un ponton sonorisé, avec serveuses accortes afin d’y manger une darne de carpe grillée. Fade et insipide, mais luxueux.
En s’éloignant du fleuve vers le nord nous atteignons Baile Herculea une cité thermale étonnante. Depuis l’antiquité on vient y prendre les eaux sulfureuses. Au XIXème, du temps des splendeurs de l’empire Austro-Hongrois on y construisit une cité luxueuse où se retrouvait toute la jet set de l’Europe de l’Est. On y menait grand train et sans doute grande débauche … Des hôtels somptueux avec des façades prétentieuses, des jardins publics avec kiosque en fer forgé, bassins et statues à l’antique, de vastes allées permettant d’afficher sa toilette, tout était réuni afin que les puissants s’amusent. Et puis les temps du communisme. Et ces lieux sont devenus maudits (haram ?) et laissés à l’abandon. Ils se sont ruinés, se sont dévastés, des façades décrépies, des toitures percées, des rambardes en fonte ornementée rouillées donnant sur de glauques fossés qui furent des canaux d’eau claire.
Dans l’après-guerre on a construit de vastes immeubles en béton, ils accueillaient les travailleurs méritants et dociles pour un séjour balnéaire. Tout ne s’est pas toujours passé comme dans le Plan au pays des communistes. L’entretien de ces bâtiment a peut-être été un peu négligé. Et puis ce fut la chute, et désormais ce furent ces lieux qui sont devenus honnis et laissés à l’abandon ! Les herbes folles poussent sur les balcons, les ferraillages du béton armé pleurent leur rouille sur les façades, quelques fenêtres aux vitre brisées claquent encore parfois au vent, la plupart sont closes.
Désormais, des hôtels bon marché, des galeries commerciales vendant des produits chinois, des étalages de kiosque proposant de la junk-food ou des robes en cotonnade bariolée attendent la classe moyenne.
Tout au long de cette vallée trône la stratigraphie étrangement horizontale des derniers siècles.
Vous connaissez ma passion pour le thermalisme, mais je n’étais pas dans le trip. Du coup je ne me suis pas laissé aller à l’abandon du sauna, du hammam et des eaux. Et puis l'ambiance dans la ville ne me faisait pas envie.
Nous avons quitté la grande route et très vite avons retrouvé la ruralité, un petit pré bien fauché loin du village, nous dormirons au calme encore ce soir.
Pas de réseau, pas même de téléphone.
En contrebas du pont de l'image précédente, en plein milieu de la ville, les eaux d'une source secondaire sont captées et libre d'accès, elles s'écoulent dans la rivière.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Ce matin nous regagnons la grande route et allons faire quelques courses dans un gros village. Par hasard nous y croisons le maire fraichement élu. Il nous invite à boire un café afin de nous faire part de son désarroi face à l’exode de toute la jeunesse et l’impossibilité de voir son pays se développer puisqu’il se vide de toutes ses forces.
Nous nous approvisionnons dans un étrange magasin ancien, vieux poêle en faïence, fresque murale et vendeuse désabusée. Très peu de produits, les affaires ne doivent pas être florissantes, en face une supérette est installée. Comme souvent ici, les rares vitrine de façade sont recouvertes de vastes autocollants, il faut presque chercher la porte d’entrée et néanmoins l’intérieur est assez bien achalandé.
Nous poursuivons en direction du parc naturel de Domoleg-Valea Cernei. Belle balade de 3 h AR en direction d’une cascade. On est un peu difficile en la matière, pour savoir ce que sont les chutes d’eau en Afrique … Mais c’était plaisant aussi de suer un peu dans la moiteur de la hêtraie. Le pays est très humide, il fait toujours un peu orageux depuis que nous sommes arrivés.
Nous y croisons un ingénieur réseau qui rejoint le spot d’escalade autour de la cascade. Il est très satisfait de la pandémie. Il est habituellement posté en Belgique et depuis la crise sanitaire remplit les mêmes fonctions en télétravail pour le même salaire dans sa ville natale.
Ce matin nous avons acheté 12 œufs pour 1 euro et 2 kg de pommes de terre pour 50 centimes … Il n’a jamais été aussi riche !
Une route goudronnée très détériorée traverse le parc. Sur le GPS nous repérons une petite piste qui s’enfonce dans la montagne. Les premiers kilomètres sont corrects, la suite est très dégradée, nous montons lentement au réducteur au milieu de fortes ornières dans un terrain caillouteux détrempé par l’averse qui vient de finir. Un renard s’indigne que nous dérangions sa tranquillité. Nous espérons atteindre les hauts plateaux herbeux au-dessus de la forêt pour trouver un « bivouac de rêve ».
C’est très pentu, très raviné. Après une grosse heure de route nous découvrons avec surprise la fin de Les hypothèses vont bon train, du braconnier au randonneur en passant par le ramasseur de champignons. C’est modérément permis de circuler sur les pistes forestières du parc, en fait, nous ne savons pas très bien … La réglementation semble un brin complexe et je ne suis pas certain qu’elle soit très respectée.
Nous installons le Camion en mode nuit et je prépare un sauté de cochon aux pommes de terre et aux oignons. J’ai déjà fini le reste de la bouteille de rouge d’hier soir et ouvert la suivante lorsque descendent de la montagne trois hommes et une femme chargés de sacs à dos. Je les invite à partager un verre avec nous. Ils acceptent sous condition que je m’abreuve longuement à une flasque de gnôle de prune acre. La femme parle italien. Ils descendent de l’alpage qui est à une petite heure de marche chargés de fromage. Nous papotons un peu, ils approuvent notre choix de bivouac, nous partageons sans doute les mêmes plaisirs face à la nature.
Le programme de la matinée est fait, nous monterons sur le plateau !
Nous nous approvisionnons dans un étrange magasin ancien, vieux poêle en faïence, fresque murale et vendeuse désabusée. Très peu de produits, les affaires ne doivent pas être florissantes, en face une supérette est installée. Comme souvent ici, les rares vitrine de façade sont recouvertes de vastes autocollants, il faut presque chercher la porte d’entrée et néanmoins l’intérieur est assez bien achalandé.
Nous poursuivons en direction du parc naturel de Domoleg-Valea Cernei. Belle balade de 3 h AR en direction d’une cascade. On est un peu difficile en la matière, pour savoir ce que sont les chutes d’eau en Afrique … Mais c’était plaisant aussi de suer un peu dans la moiteur de la hêtraie. Le pays est très humide, il fait toujours un peu orageux depuis que nous sommes arrivés.
Nous y croisons un ingénieur réseau qui rejoint le spot d’escalade autour de la cascade. Il est très satisfait de la pandémie. Il est habituellement posté en Belgique et depuis la crise sanitaire remplit les mêmes fonctions en télétravail pour le même salaire dans sa ville natale.
Ce matin nous avons acheté 12 œufs pour 1 euro et 2 kg de pommes de terre pour 50 centimes … Il n’a jamais été aussi riche !
Une route goudronnée très détériorée traverse le parc. Sur le GPS nous repérons une petite piste qui s’enfonce dans la montagne. Les premiers kilomètres sont corrects, la suite est très dégradée, nous montons lentement au réducteur au milieu de fortes ornières dans un terrain caillouteux détrempé par l’averse qui vient de finir. Un renard s’indigne que nous dérangions sa tranquillité. Nous espérons atteindre les hauts plateaux herbeux au-dessus de la forêt pour trouver un « bivouac de rêve ».
C’est très pentu, très raviné. Après une grosse heure de route nous découvrons avec surprise la fin de Les hypothèses vont bon train, du braconnier au randonneur en passant par le ramasseur de champignons. C’est modérément permis de circuler sur les pistes forestières du parc, en fait, nous ne savons pas très bien … La réglementation semble un brin complexe et je ne suis pas certain qu’elle soit très respectée.
Nous installons le Camion en mode nuit et je prépare un sauté de cochon aux pommes de terre et aux oignons. J’ai déjà fini le reste de la bouteille de rouge d’hier soir et ouvert la suivante lorsque descendent de la montagne trois hommes et une femme chargés de sacs à dos. Je les invite à partager un verre avec nous. Ils acceptent sous condition que je m’abreuve longuement à une flasque de gnôle de prune acre. La femme parle italien. Ils descendent de l’alpage qui est à une petite heure de marche chargés de fromage. Nous papotons un peu, ils approuvent notre choix de bivouac, nous partageons sans doute les mêmes plaisirs face à la nature.
Le programme de la matinée est fait, nous monterons sur le plateau !
Confiteor- Messages : 9190
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Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Et bien c’était une bonne idée !
Trois heures et demi de montée un peu rude dans un hêtraie spectaculaire qui donne accès à la prairie alpine couverte de myrtilles. Je n’avais plus vu une telle abondance depuis mon enfance lorsque j’arpentais les alpages d’une Haute Savoie qui connaissait si peu le ski et encore moins le tourisme estival.
Superbe vue en dépit d’un soleil voilé et de passages nuageux, l’alpage s’étend à perte de vue jusqu’à 2000 mètres et bien entendu pas un promeneur.
A la descente nous rencontrons trois hommes chargés de plus de 50 kg de myrtilles dans de gros bidons. Nous papotons un peu avec leurs quelques mots d’allemand ou d’italien. Ils nous donnent moult conseils, des plans de ballade.
Laborieuse descente de la piste d’hier, c’est moins rude la route est sèche et moins glissante, les ornières sont vides de l’eau boueuse qui les rendaient imprévisibles hier. Certaines étaient très profondes, j’ai eu raison d’être prudent.
Nous rejoignons la route principale qui traverse le parc naturel (environ 75 km de long). Nous disposons d’une carte détaillée et précise qui nous a été donnée au bureau d’accueil dans la ville de Baile Herculana (la ville balnéaire). Nous prévoyons de dépasser un vaste lac de barrage et de trouver une pension (hôtel modeste) pour y passer la nuit. La route indiquée comme une départementale revêtue est en fait une très mauvaise piste et il nous faut deux heures sportives pour parcourir 25 km. La pension attendue est abandonnée. Nous poursuivons un peu jusqu’à une source afin de refaire de l’eau. Et au final trouvons un très beau coin au confluent de la rivière principale qui parcourt toute la longueur du parc et un fort torrent qui descend de la montagne. La vallée s’élargit un peu, on imagine aisément que le lieu a été cultivé il y a peu, les arbres n’ont pas encore reconquis l’espace.
Au bord du torrent une grosse cabane semble avoir été aménagée en résidence de vacances. Tout contre celle-ci on trouve un moulin à céréales d’un modèle un peu plus évolué que ceux visités l’autre jour. Une roue à godet d’axe horizontal avec un renvoi d’angle qui actionne la meule de pierre.
En me baladant, je m’aperçois que ce torrent est en fait une résurgence d’un débit impressionnant. Intéressant, mais pas surprenant nous sommes dans un karst.
Le torrent est entièrement issu d'une résurgence située une centaine de mètres plus haut. La cabane est le moulin.
Dans la prairie, la température est plus douce qu’hier.
Nous dinons d’un reste de sauté de porc et quelques pâtes au comté.
A nouveau pas de réseau ni de téléphone.
Demain, sur les conseils des cueilleurs de myrtilles nous partirons vers l’est sur une petite piste qui conduit à un alpage, si j’ai bien compris nous pourrons monter jusqu’à environ 1800 m en bagnole. Mais c’est peut-être et si ce n’est pas possible nous poursuivrons à pied.
Il ne fait jamais vraiment beau soleil voilé et temps lourd. Pas terrible pour faire des photos de paysage.
C'est grand, c'est vert, c'est désert. Parfois des effets de texture intéressants.
Trois heures et demi de montée un peu rude dans un hêtraie spectaculaire qui donne accès à la prairie alpine couverte de myrtilles. Je n’avais plus vu une telle abondance depuis mon enfance lorsque j’arpentais les alpages d’une Haute Savoie qui connaissait si peu le ski et encore moins le tourisme estival.
Superbe vue en dépit d’un soleil voilé et de passages nuageux, l’alpage s’étend à perte de vue jusqu’à 2000 mètres et bien entendu pas un promeneur.
A la descente nous rencontrons trois hommes chargés de plus de 50 kg de myrtilles dans de gros bidons. Nous papotons un peu avec leurs quelques mots d’allemand ou d’italien. Ils nous donnent moult conseils, des plans de ballade.
Laborieuse descente de la piste d’hier, c’est moins rude la route est sèche et moins glissante, les ornières sont vides de l’eau boueuse qui les rendaient imprévisibles hier. Certaines étaient très profondes, j’ai eu raison d’être prudent.
Nous rejoignons la route principale qui traverse le parc naturel (environ 75 km de long). Nous disposons d’une carte détaillée et précise qui nous a été donnée au bureau d’accueil dans la ville de Baile Herculana (la ville balnéaire). Nous prévoyons de dépasser un vaste lac de barrage et de trouver une pension (hôtel modeste) pour y passer la nuit. La route indiquée comme une départementale revêtue est en fait une très mauvaise piste et il nous faut deux heures sportives pour parcourir 25 km. La pension attendue est abandonnée. Nous poursuivons un peu jusqu’à une source afin de refaire de l’eau. Et au final trouvons un très beau coin au confluent de la rivière principale qui parcourt toute la longueur du parc et un fort torrent qui descend de la montagne. La vallée s’élargit un peu, on imagine aisément que le lieu a été cultivé il y a peu, les arbres n’ont pas encore reconquis l’espace.
Au bord du torrent une grosse cabane semble avoir été aménagée en résidence de vacances. Tout contre celle-ci on trouve un moulin à céréales d’un modèle un peu plus évolué que ceux visités l’autre jour. Une roue à godet d’axe horizontal avec un renvoi d’angle qui actionne la meule de pierre.
En me baladant, je m’aperçois que ce torrent est en fait une résurgence d’un débit impressionnant. Intéressant, mais pas surprenant nous sommes dans un karst.
Le torrent est entièrement issu d'une résurgence située une centaine de mètres plus haut. La cabane est le moulin.
Dans la prairie, la température est plus douce qu’hier.
Nous dinons d’un reste de sauté de porc et quelques pâtes au comté.
A nouveau pas de réseau ni de téléphone.
Demain, sur les conseils des cueilleurs de myrtilles nous partirons vers l’est sur une petite piste qui conduit à un alpage, si j’ai bien compris nous pourrons monter jusqu’à environ 1800 m en bagnole. Mais c’est peut-être et si ce n’est pas possible nous poursuivrons à pied.
Il ne fait jamais vraiment beau soleil voilé et temps lourd. Pas terrible pour faire des photos de paysage.
C'est grand, c'est vert, c'est désert. Parfois des effets de texture intéressants.
Dernière édition par Confiteor le Ven 30 Juil 2021 - 17:53, édité 1 fois
Confiteor- Messages : 9190
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Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Parfois il faut accepter un relatif échec ! A quelques kilomètres du départ la route était coupée.
Nous avons donc poursuivi la traversée du parc par la piste principale jusqu’à un col.
De l’autre côté la végétation est différente, les feuillus sont remplacés par des conifères.
Nous descendons dans la vallée, elle s’ouvre et les terres sont cultivées à nouveau. Quelques aires de camping à la ferme, des familles qui jouent et pique-niquent au bord du ruisseau, montrent que nous assistons au début des vacances en moyenne montagne. On se croirait en Savoie dans les années 60-70.
Plus loin, nous atteignons une vallée industrielle dévastée, une ancienne zone minière, les chevalets tout rouillés sont encore debout ainsi que les vastes « combinats ». Dans les petites villes qui se succèdent ce ne sont que logements collectifs qui tombent en ruine, on sent la misère suer jusque sur les trottoirs, l’absence d’espoir. Très déprimant.
Pour me remonter le moral je visite un vendeur de militaria, j'ai failli acheter ce sympathique petit canon. J'ai hésité avec un camion 6x6 russe.
Nous continuons par une bonne route goudronnée dans une vallée serrée jusqu’à la ville de Targu Jiu, environ 80 000 habitants. Ce lieu n’est pas choisi par hasard, nous sommes venus y contempler une installation de Brancusi (flemme de raconter tout est ici :https://fr.wikipedia.org/wiki/Ensemble_sculptural_de_Constantin_Br%C3%A2ncu%C8%99i_%C3%A0_T%C3%A2rgu_Jiu ).
Je révère cet artiste, il fait partie de mes tous premiers émois lorsque jeune prolétaire provincial inculte j’ai découvert son œuvre et son atelier qui venait d’y être reconstitué à Beaubourg dans la fin des années 70.
Ce fut une des révélations qui ont fait que je suis tombé dans l’art moderne et environ dix ans plus tard dans le contemporain. Je n’aurais jamais imaginé à l’époque voir la Colonne sans fin » in situ, la Roumanie était alors sous la coupe des communistes les plus féroces.
Et bien, j’ai été très ému ! Et je suis fier de réussir à l’être encore.
Beaucoup connaissent "Le Baiser" (voir ici) moins "la Porte du Baiser" qui lui rend hommage.
La colonne sans fin
Le centre-ville est assez beau, des bâtiments XIXème restaurés, des places bétonnées un peu trop grandes avec des fontaines un peu trop majestueuses, comme souvent à l’est de l’Europe. Un reste du goût réaliste soviétique !
Nous dinons dans le meilleur restaurant de la ville d’un sauté de porc accompagné de polenta et papotons avec un avocat dont le frère est prof sur le plateau de Palaiseau. Ses enfants, très mal éduqués, nous ont pourri l’instant …
Le luxe succède au luxe ! Après des bivouacs en altitude, hôtel confortable, piscine hammam, sauna, jacuzzi.
Nous avons donc poursuivi la traversée du parc par la piste principale jusqu’à un col.
De l’autre côté la végétation est différente, les feuillus sont remplacés par des conifères.
Nous descendons dans la vallée, elle s’ouvre et les terres sont cultivées à nouveau. Quelques aires de camping à la ferme, des familles qui jouent et pique-niquent au bord du ruisseau, montrent que nous assistons au début des vacances en moyenne montagne. On se croirait en Savoie dans les années 60-70.
Plus loin, nous atteignons une vallée industrielle dévastée, une ancienne zone minière, les chevalets tout rouillés sont encore debout ainsi que les vastes « combinats ». Dans les petites villes qui se succèdent ce ne sont que logements collectifs qui tombent en ruine, on sent la misère suer jusque sur les trottoirs, l’absence d’espoir. Très déprimant.
Pour me remonter le moral je visite un vendeur de militaria, j'ai failli acheter ce sympathique petit canon. J'ai hésité avec un camion 6x6 russe.
Nous continuons par une bonne route goudronnée dans une vallée serrée jusqu’à la ville de Targu Jiu, environ 80 000 habitants. Ce lieu n’est pas choisi par hasard, nous sommes venus y contempler une installation de Brancusi (flemme de raconter tout est ici :https://fr.wikipedia.org/wiki/Ensemble_sculptural_de_Constantin_Br%C3%A2ncu%C8%99i_%C3%A0_T%C3%A2rgu_Jiu ).
Je révère cet artiste, il fait partie de mes tous premiers émois lorsque jeune prolétaire provincial inculte j’ai découvert son œuvre et son atelier qui venait d’y être reconstitué à Beaubourg dans la fin des années 70.
Ce fut une des révélations qui ont fait que je suis tombé dans l’art moderne et environ dix ans plus tard dans le contemporain. Je n’aurais jamais imaginé à l’époque voir la Colonne sans fin » in situ, la Roumanie était alors sous la coupe des communistes les plus féroces.
Et bien, j’ai été très ému ! Et je suis fier de réussir à l’être encore.
Beaucoup connaissent "Le Baiser" (voir ici) moins "la Porte du Baiser" qui lui rend hommage.
La colonne sans fin
Le centre-ville est assez beau, des bâtiments XIXème restaurés, des places bétonnées un peu trop grandes avec des fontaines un peu trop majestueuses, comme souvent à l’est de l’Europe. Un reste du goût réaliste soviétique !
Nous dinons dans le meilleur restaurant de la ville d’un sauté de porc accompagné de polenta et papotons avec un avocat dont le frère est prof sur le plateau de Palaiseau. Ses enfants, très mal éduqués, nous ont pourri l’instant …
Le luxe succède au luxe ! Après des bivouacs en altitude, hôtel confortable, piscine hammam, sauna, jacuzzi.
Dernière édition par Confiteor le Ven 30 Juil 2021 - 18:07, édité 1 fois (Raison : Ajout photos)
Confiteor- Messages : 9190
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Re: Conte rendu d'errance
Visite du petit musée d’art de Targu Jiu. Quelques bons tableaux et une sculpture en céramique intéressante. La caissière, qui n’est pas débordée par l’affluence, parle un bon français, ses enfants vivent à Grenoble, elle nous fait une visite guidée ultra agréable. Elle est manifestement cultivée, connait la vie des plasticiens et c’est un vrai plaisir.
Ambiance futuriste (vue d'ici)
Dans le goût de Poliakov
Une étrange vacuité, bien onirique
Post surréalisme
La vie de voyageur est parfois prosaïque, nous allons dans un hypermarché Carrefour fort bien achalandé faire provision de pinard (et autres nécessités), puis chez Décathlon renouveler mes godasses de marche qui ont rendu l’âme. Parfois c’est cool d’être dans un pays où tout nous est accessible.
Trois Roumanies au moins : les paysans à l’ancienne vivant dans l’autosubsistance – les urbains miséreux des zones industrielles abandonnées – les gagnants de la mondialisation et de l’Europe dans les villes dynamiques. Ces populations sont distantes de quelques dizaines de kilomètre et ne doivent sans doute pas beaucoup se mélanger !
Nous partons ensuite vers la maison natale de Brancusi dans une campagne profonde. C’est stupéfiant que celui qui a été un des « inventeurs » et théoriciens de la sculpture moderne ait passé son enfance dans une telle atmosphère, une petite maison en poutres de bois assemblées façon chalet savoyard, dans une plaine agricole sans doute fertile mais densément peuplée, les villages sont très proches les uns de autres, et donc, les propriétés devaient être si petites que les ressources étaient nécessairement maigres. On se demande par quel étrange destinée il a eu accès à la culture dans les toutes premières années du XXème et on ne doute pas de son immense intelligence pour avoir su en profiter à ce point !
Maison natale de Brancusi
Papoti papota avec une jeune prof de français de Timisoara en vacances qui a bénéficié d’un programme Erasmus en France. Agréable et souriante elle est accompagnée de ses gosses et de son mec ingénieur.
Direction le monastère orthodoxe de Tismana (XIVème – XXIème, voir ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Monast%C3%A8re_de_Tismana). Il a intérêt à bien se tenir nous sommes experts pour avoir traîné dans tant de pays de radis noirs. En travaux ! Il sera bientôt tout neuf en béton et placo, comme il est d’usage dans ce type de lieux. Faut savoir que le plus souvent les fresques du XIVème ont été repeintes tous les 50 ans afin de garder une éternelle jeunesse …
C’est une vaste enceinte fermée au milieu de laquelle est implantée l’église avec ses multiples reliques (souvent des extrémités, doigt, oreilles, etc ( ?)) dans de somptueuses chasses en argent parfois dorées incrustées d’émaux ou de pierres semi-précieuses.
Une none nous surveille avec son drôle de petit calot qui tient avec une longue écharpe nouée sour le cou. Elle porte une austère robe noire que nous nommerions abaya si etc .. ( !)
Elle fait la gueule. De ce que nous avons observé en Serbie, Arménie, Bulgarie etc. c’est une constante chez ces peuplades. Entre temps elle passe l’aspirateur ou asperge les icônes et autres objets de dévotion de solution désinfectante afin que les fidèles puissent les embrasser et les lichouiller en toute sécurité. Le Covid est passé par Tismana. Je vole quelques photos à sa vigilance.
Je contemple avec effroi la fresque de la pesée des âmes, je crains d’être relégué du côté gauche celui de l’enfer, ça ne semble pas très confortable même si on doit tout de même y rigoler entre temps. Un peu comme dans ce bas monde, non ?
Tout l’extérieur de l’église est en chantier, échafaudages, grues, bétonnières, etc. Les fidèles indifférents au vacarme traversent le bazar restent cinq minutes dans l’église, le temps de tripatouiller le matos qui donne bonne chance, de se signer à l’envers, et après un selfie devant la porte ils s’en vont. Et moi, comme un con, je me bats avec ma mémoire pour reconnaître les scènes bibliques, espérant qu’on m’en saura gré de Là-Haut …
Nous découvrons derrière des palettes d’enduit à façade l’entrée d’un petit cimetière. Une none s’y livre à son activité favorite : broyer du noir. Les croix sont récentes, à croire qu’ils déménagent les tombes anciennes ? Elles portent tout un baratin, Google Trad est mon ami, mais c’est un peu le bazar car la calligraphie est un peu complexe. La none vient à mon secours de fort mauvais gré. Je sens bien qu’elle n’a rien contre moi mais tout contre la vie ici-bas dans l’attente de futures félicités sans doute. Une jeune jeune et belle gosse pose des bougies devant une tombe. Je l’interpelle pour savoir s’il s’agit d’une personne de sa famille. Elle parle un anglais parfait, celui que je comprends ! Il s’agit de la tombe d’une ermite qui vivait dans la montagne et qui est décédée il y a quelques années et qu’elle avait l’habitude de consulter. Elle pense qu’il s’agit d’une future sainte. Probable, les orthodoxes sont généreux avec la sainteté. Petite causerie, elle traduit pour la none qui s’en mêle. Suis-je un bon catholique ? Pas facile de répondre, je ne voudrais pas décevoir leurs espoirs et ainsi les blesser mais dans le même temps, c’est moche de mentir dans un lieu saint …
Tant d’années de voyage m’ont appris à gérer ces dilemmes …
J’apprends que lorsqu’une moniale décède, la mère supérieure se met en prière et que lui tombe à l’esprit l’inspiration du texte qui servira d’épitaphe à la défunte.
Je laisse ZC s’en occuper le jour venu !
Nous allons sortir lorsque par une porte ouverte sur les bâtiments qui entourent l’église nous apercevons des fresques qui n’ont pas été ripolinées et datent du XIV ou du XV ème. Les ouvriers nous invitent à circuler dans le chantier. Au final c’est une chance nous avons accès à ce qui sera la zone privative lorsque la rénovation sera terminée. Nous traînons partout, sereins ? C’est fort l’imagination humaine en matière de cruauté : si on en juge par les représentations, les martyrs semblent avoir été proches de l’orgasme lorsqu’ils ont été décapités, brûlés vifs, noyés, dévorés par les fauves, etc.
Je vais quelques photos. Pas eu le temps de trier ni même de regarder. Je crois un ou deux trucs sympas avec les rouleaux de cuivre destinés à la couverture du monastère.
Lorsque nous sortons un vieux pope fait des câlins à M. en guise de bénédictions. Elle ne semble pas apprécier le geste à sa juste valeur. Il se laisse volontiers photographier sous condition de pouvoir continuer à la tripoter un peu. A ma demande elle cède, vous aurez le portrait du vieux sage un autre jour …
Maps.Me est mon copain. En poursuivant la vallée après le monastère, une petite piste grimpe dans la montagne, nous y aurons frais et serons tranquilles pour la nuit.
Parfait, quelques cabanes et un espace plat au bord des épicéas, en contrebas des prés.
Alors que je commence à rédiger ma chronique du soir arrivent un vieux 4x4 avec une remorque et 4 mecs. Ils farfouillent dans leur cabane puis s’approchent et je vais les saluer et les convie à boire un coup de rouge avec nous. Il reste un peu de saucisson de France, nous partageons. Il s’agit de deux frères accompagné de leur père et du gosse de l’un d’eux qui parle deux mots d’anglais.
On picole, on sympathise, ils nous font visiter ce qu’ils nomment leur konak et qui est une sorte de résidence secondaire en rondins, rustique mais fort bien aménagée.
Nous goûtons leur production viticole. Le Saint Joseph n’a qu’à bien se tenir. C’est si étrange que je n’aurais pas pensé à nommer cette boisson « vin ».
On déconne un peu, en vrai leur langue avec un peu de bonne volonté c’est gérable, pas bien plus loin du français que ne l’est l’italien.
Ils se barrent, à la recherche de leurs vaches qui errent dans le coin afin de les traire.
Nous sommes à 10 km d’un hameau, en altitude, on peut espérer la paix de la nuit.
Moins d’une heure plus tard passent deux mecs en 4x4 qui viennent nous brancher. Je suis obligé d’ouvrir une nouvelle bouteille. Parfois, c’est une nécessité (n’est-ce-pas My_Illusion ?).
L’un a bossé un peu en France l’autre en Allemagne ils parlent trois mots de langues normales.
On déconne un peu (à nouveau).
Ils sortent un gros bout de fromage dégueu et trop salé dont ils ont le secret, un gros bout de lard gras fumé et un quart de litre de gnôle. On passe assez de temps ensemble pour prononcer le mot fraternité avec des trémolos dans la voix.
Pendant que nous bavardons un renard passe, s’arrête, se fout un peu de notre gueule parce que nous n’avons pas de fusil et qu’il le sait bien. Puis il se barre méprisant.
Il me donne son téléphone et nous invite dans son village plus bas dans la vallée. Pas de bol la saison de la chasse et des champis n’a pas commencée sinon, il m’aurait emmené.
Nous reviendrons en septembre peut-être.
A peine le temps de me remettre, le vieux de la première bande est remonté à pied de sa maison située « km en contre-bas avec un seau de fromage qui peu et une grande bouteille de lait encore tiède du pis.
Je lui donne (à contre cœur …) une tablette de Lindt 70% de cacao qu’il n’appréciera pas, il aimerait mieux une merde sucrée à l’huile de palme.
Si je n’avais pas à tenir ce putain de carnet, je me serais douché et je dormirais.
En attendant ça craque de partout dans le bois, chais quelle bestiole me surveille.
Les photos, une autre fois
Ambiance futuriste (vue d'ici)
Dans le goût de Poliakov
Une étrange vacuité, bien onirique
Post surréalisme
La vie de voyageur est parfois prosaïque, nous allons dans un hypermarché Carrefour fort bien achalandé faire provision de pinard (et autres nécessités), puis chez Décathlon renouveler mes godasses de marche qui ont rendu l’âme. Parfois c’est cool d’être dans un pays où tout nous est accessible.
Trois Roumanies au moins : les paysans à l’ancienne vivant dans l’autosubsistance – les urbains miséreux des zones industrielles abandonnées – les gagnants de la mondialisation et de l’Europe dans les villes dynamiques. Ces populations sont distantes de quelques dizaines de kilomètre et ne doivent sans doute pas beaucoup se mélanger !
Nous partons ensuite vers la maison natale de Brancusi dans une campagne profonde. C’est stupéfiant que celui qui a été un des « inventeurs » et théoriciens de la sculpture moderne ait passé son enfance dans une telle atmosphère, une petite maison en poutres de bois assemblées façon chalet savoyard, dans une plaine agricole sans doute fertile mais densément peuplée, les villages sont très proches les uns de autres, et donc, les propriétés devaient être si petites que les ressources étaient nécessairement maigres. On se demande par quel étrange destinée il a eu accès à la culture dans les toutes premières années du XXème et on ne doute pas de son immense intelligence pour avoir su en profiter à ce point !
Maison natale de Brancusi
Papoti papota avec une jeune prof de français de Timisoara en vacances qui a bénéficié d’un programme Erasmus en France. Agréable et souriante elle est accompagnée de ses gosses et de son mec ingénieur.
Direction le monastère orthodoxe de Tismana (XIVème – XXIème, voir ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Monast%C3%A8re_de_Tismana). Il a intérêt à bien se tenir nous sommes experts pour avoir traîné dans tant de pays de radis noirs. En travaux ! Il sera bientôt tout neuf en béton et placo, comme il est d’usage dans ce type de lieux. Faut savoir que le plus souvent les fresques du XIVème ont été repeintes tous les 50 ans afin de garder une éternelle jeunesse …
C’est une vaste enceinte fermée au milieu de laquelle est implantée l’église avec ses multiples reliques (souvent des extrémités, doigt, oreilles, etc ( ?)) dans de somptueuses chasses en argent parfois dorées incrustées d’émaux ou de pierres semi-précieuses.
Une none nous surveille avec son drôle de petit calot qui tient avec une longue écharpe nouée sour le cou. Elle porte une austère robe noire que nous nommerions abaya si etc .. ( !)
Elle fait la gueule. De ce que nous avons observé en Serbie, Arménie, Bulgarie etc. c’est une constante chez ces peuplades. Entre temps elle passe l’aspirateur ou asperge les icônes et autres objets de dévotion de solution désinfectante afin que les fidèles puissent les embrasser et les lichouiller en toute sécurité. Le Covid est passé par Tismana. Je vole quelques photos à sa vigilance.
Je contemple avec effroi la fresque de la pesée des âmes, je crains d’être relégué du côté gauche celui de l’enfer, ça ne semble pas très confortable même si on doit tout de même y rigoler entre temps. Un peu comme dans ce bas monde, non ?
Tout l’extérieur de l’église est en chantier, échafaudages, grues, bétonnières, etc. Les fidèles indifférents au vacarme traversent le bazar restent cinq minutes dans l’église, le temps de tripatouiller le matos qui donne bonne chance, de se signer à l’envers, et après un selfie devant la porte ils s’en vont. Et moi, comme un con, je me bats avec ma mémoire pour reconnaître les scènes bibliques, espérant qu’on m’en saura gré de Là-Haut …
Nous découvrons derrière des palettes d’enduit à façade l’entrée d’un petit cimetière. Une none s’y livre à son activité favorite : broyer du noir. Les croix sont récentes, à croire qu’ils déménagent les tombes anciennes ? Elles portent tout un baratin, Google Trad est mon ami, mais c’est un peu le bazar car la calligraphie est un peu complexe. La none vient à mon secours de fort mauvais gré. Je sens bien qu’elle n’a rien contre moi mais tout contre la vie ici-bas dans l’attente de futures félicités sans doute. Une jeune jeune et belle gosse pose des bougies devant une tombe. Je l’interpelle pour savoir s’il s’agit d’une personne de sa famille. Elle parle un anglais parfait, celui que je comprends ! Il s’agit de la tombe d’une ermite qui vivait dans la montagne et qui est décédée il y a quelques années et qu’elle avait l’habitude de consulter. Elle pense qu’il s’agit d’une future sainte. Probable, les orthodoxes sont généreux avec la sainteté. Petite causerie, elle traduit pour la none qui s’en mêle. Suis-je un bon catholique ? Pas facile de répondre, je ne voudrais pas décevoir leurs espoirs et ainsi les blesser mais dans le même temps, c’est moche de mentir dans un lieu saint …
Tant d’années de voyage m’ont appris à gérer ces dilemmes …
J’apprends que lorsqu’une moniale décède, la mère supérieure se met en prière et que lui tombe à l’esprit l’inspiration du texte qui servira d’épitaphe à la défunte.
Je laisse ZC s’en occuper le jour venu !
Nous allons sortir lorsque par une porte ouverte sur les bâtiments qui entourent l’église nous apercevons des fresques qui n’ont pas été ripolinées et datent du XIV ou du XV ème. Les ouvriers nous invitent à circuler dans le chantier. Au final c’est une chance nous avons accès à ce qui sera la zone privative lorsque la rénovation sera terminée. Nous traînons partout, sereins ? C’est fort l’imagination humaine en matière de cruauté : si on en juge par les représentations, les martyrs semblent avoir été proches de l’orgasme lorsqu’ils ont été décapités, brûlés vifs, noyés, dévorés par les fauves, etc.
Je vais quelques photos. Pas eu le temps de trier ni même de regarder. Je crois un ou deux trucs sympas avec les rouleaux de cuivre destinés à la couverture du monastère.
Lorsque nous sortons un vieux pope fait des câlins à M. en guise de bénédictions. Elle ne semble pas apprécier le geste à sa juste valeur. Il se laisse volontiers photographier sous condition de pouvoir continuer à la tripoter un peu. A ma demande elle cède, vous aurez le portrait du vieux sage un autre jour …
Maps.Me est mon copain. En poursuivant la vallée après le monastère, une petite piste grimpe dans la montagne, nous y aurons frais et serons tranquilles pour la nuit.
Parfait, quelques cabanes et un espace plat au bord des épicéas, en contrebas des prés.
Alors que je commence à rédiger ma chronique du soir arrivent un vieux 4x4 avec une remorque et 4 mecs. Ils farfouillent dans leur cabane puis s’approchent et je vais les saluer et les convie à boire un coup de rouge avec nous. Il reste un peu de saucisson de France, nous partageons. Il s’agit de deux frères accompagné de leur père et du gosse de l’un d’eux qui parle deux mots d’anglais.
On picole, on sympathise, ils nous font visiter ce qu’ils nomment leur konak et qui est une sorte de résidence secondaire en rondins, rustique mais fort bien aménagée.
Nous goûtons leur production viticole. Le Saint Joseph n’a qu’à bien se tenir. C’est si étrange que je n’aurais pas pensé à nommer cette boisson « vin ».
On déconne un peu, en vrai leur langue avec un peu de bonne volonté c’est gérable, pas bien plus loin du français que ne l’est l’italien.
Ils se barrent, à la recherche de leurs vaches qui errent dans le coin afin de les traire.
Nous sommes à 10 km d’un hameau, en altitude, on peut espérer la paix de la nuit.
Moins d’une heure plus tard passent deux mecs en 4x4 qui viennent nous brancher. Je suis obligé d’ouvrir une nouvelle bouteille. Parfois, c’est une nécessité (n’est-ce-pas My_Illusion ?).
L’un a bossé un peu en France l’autre en Allemagne ils parlent trois mots de langues normales.
On déconne un peu (à nouveau).
Ils sortent un gros bout de fromage dégueu et trop salé dont ils ont le secret, un gros bout de lard gras fumé et un quart de litre de gnôle. On passe assez de temps ensemble pour prononcer le mot fraternité avec des trémolos dans la voix.
Pendant que nous bavardons un renard passe, s’arrête, se fout un peu de notre gueule parce que nous n’avons pas de fusil et qu’il le sait bien. Puis il se barre méprisant.
Il me donne son téléphone et nous invite dans son village plus bas dans la vallée. Pas de bol la saison de la chasse et des champis n’a pas commencée sinon, il m’aurait emmené.
Nous reviendrons en septembre peut-être.
A peine le temps de me remettre, le vieux de la première bande est remonté à pied de sa maison située « km en contre-bas avec un seau de fromage qui peu et une grande bouteille de lait encore tiède du pis.
Je lui donne (à contre cœur …) une tablette de Lindt 70% de cacao qu’il n’appréciera pas, il aimerait mieux une merde sucrée à l’huile de palme.
Si je n’avais pas à tenir ce putain de carnet, je me serais douché et je dormirais.
En attendant ça craque de partout dans le bois, chais quelle bestiole me surveille.
Les photos, une autre fois
Dernière édition par Confiteor le Ven 30 Juil 2021 - 18:26, édité 1 fois (Raison : Photos)
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
- ah:
- première fois que j'entends parler d'un renard avec un téléphone
Se doucher et dormir, c'est d'un vulgaire.
Et toujours pas d'ours.
En allant "voir Brancusi", j'ai constaté qu'il avait malgré lui fait avancer la définition juridique de l'art (notamment à cause de taxes, de pognon) qui reste aussi compliquée que sa définition pure, et que l'endroit d'où il vient (fruste) dispose néanmoins d'une tradition de sculpture sur bois.
Petit veinard.
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Pas le temps de lire (qq "petits" souci familiaux) mais je pose ça ici pour suivre et y revenir plus tard.
En tous cas, cool que vous soyez repartis !
En tous cas, cool que vous soyez repartis !
fift- Messages : 8877
Date d'inscription : 26/04/2016
Age : 48
Localisation : Paris
Re: Conte rendu d'errance
- se sortir d'une ornière:
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
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Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Journée technique …
Une de ces saloperies de tiques s’est accrochée à mon mollet. Premier chantier, traîner les pharmacies des villages à la recherche d’un tire-tique. Après quelques échecs, je comprends que c’est en vain, je n’ai qu’à faire comme tout le monde, aller au dispensaire me la faire enlever. Un peu d’attente mais une toubib super sympa, on a rigolé ensemble, elle n’a pas voulu être payée en dépit de mon insistance.
Grosse réaction locale, zone infestée de Lyme du coup je préfère me taper de la doxycycline en prévention.
Nous devons rouler un peu vers l’est afin de rejoindre une autre zone, environ 100 km.
Au total, nous roulons chaque jour assez peu et donc participons moins à la destruction de la planète que certains me l’ont reproché ...
Lorsque je bossais il m’est arrivé durant des années de me taper 200 km par jour … Et sans alternative possible.
Obligé de repasser par Targu Jiu. Juste sur notre route Carrefour nous attend, nous refaisons le plein de pinard.
Petite campagne tranquille. Nous arrivons Dans une vallée qui s’enfonce dans les montagnes et visitons une grotte minable … C’est une zone de tourisme familial en moyenne montagne avec beaucoup de pensions de famille et quelques zones de camping. Paisible.
En sortant de la grotte nous passons une bonne heure avec un habitant de Timisoara qui a décidé de tout plaquer en ville pour s’installer dans ce coin tranquille. Il a vendu tous ses biens afin de réunir assez de fonds pour construire un lieu de vacances. Il rêve d’acheter un 4x4 dans le genre du Camion afin d’emmener promener ses touristes dans les alpages. C’est sur ce sujet que la conversation s’est engagée. Il me raconte dans les détails ses motivations, ses espoirs, ses déceptions. Ce qu’il a déjà construit a de la gueule, au vu des photos, c’est de bon goût et bien pensée, il a mille idées pour des démarquer de la concurrence en proposant des activités un peu fun à sa clientèle.
Nous passons un agréable moment en sa compagnie et n’est pas avare de ses opinions sur le pays et son évolution. Intéressant.
Il me fournit le plan du lendemain en nous indiquant un canyon super dans la vallée suivante, un plan « exclusif » que les happy few se réservent.
Il nous invite à traverser le hameau de Roms qui est un peu plus loin. Et nous raconte l’étrange relation qu’il entretient avec « ces gens ». Il est plutôt bienveillant à leur égard, et nous répète plusieurs fois, « Ils ne sont pas du tout dangereux, ce sont seulement des sauvages qui veulent le rester quelle que soit les efforts d’intégration du gouvernement. Faut tout de même pas laisser traîner de bricoles, s’ils en ont besoin ils se servent. ». Les enfants vont à l’école lorsque ça les chante, lorsqu’on embauche un adulte on ne sait jamais s’il viendra bosser le lendemain, dès qu’ils ont trois sous ils se posent et glandent. Leur habitat oscille du merdique au sordide, ils sont d’une apparence plus que négligée.
C’était le petit soir, l’orage menaçait et il fallait trouver un coin de bivouac, je n’ai pas rôdé assez dans le village Rom pour le lancer à faire des photos.
Nuit tranquille dans un pré fauché.
Une de ces saloperies de tiques s’est accrochée à mon mollet. Premier chantier, traîner les pharmacies des villages à la recherche d’un tire-tique. Après quelques échecs, je comprends que c’est en vain, je n’ai qu’à faire comme tout le monde, aller au dispensaire me la faire enlever. Un peu d’attente mais une toubib super sympa, on a rigolé ensemble, elle n’a pas voulu être payée en dépit de mon insistance.
Grosse réaction locale, zone infestée de Lyme du coup je préfère me taper de la doxycycline en prévention.
Nous devons rouler un peu vers l’est afin de rejoindre une autre zone, environ 100 km.
Au total, nous roulons chaque jour assez peu et donc participons moins à la destruction de la planète que certains me l’ont reproché ...
Lorsque je bossais il m’est arrivé durant des années de me taper 200 km par jour … Et sans alternative possible.
Obligé de repasser par Targu Jiu. Juste sur notre route Carrefour nous attend, nous refaisons le plein de pinard.
Petite campagne tranquille. Nous arrivons Dans une vallée qui s’enfonce dans les montagnes et visitons une grotte minable … C’est une zone de tourisme familial en moyenne montagne avec beaucoup de pensions de famille et quelques zones de camping. Paisible.
En sortant de la grotte nous passons une bonne heure avec un habitant de Timisoara qui a décidé de tout plaquer en ville pour s’installer dans ce coin tranquille. Il a vendu tous ses biens afin de réunir assez de fonds pour construire un lieu de vacances. Il rêve d’acheter un 4x4 dans le genre du Camion afin d’emmener promener ses touristes dans les alpages. C’est sur ce sujet que la conversation s’est engagée. Il me raconte dans les détails ses motivations, ses espoirs, ses déceptions. Ce qu’il a déjà construit a de la gueule, au vu des photos, c’est de bon goût et bien pensée, il a mille idées pour des démarquer de la concurrence en proposant des activités un peu fun à sa clientèle.
Nous passons un agréable moment en sa compagnie et n’est pas avare de ses opinions sur le pays et son évolution. Intéressant.
Il me fournit le plan du lendemain en nous indiquant un canyon super dans la vallée suivante, un plan « exclusif » que les happy few se réservent.
Il nous invite à traverser le hameau de Roms qui est un peu plus loin. Et nous raconte l’étrange relation qu’il entretient avec « ces gens ». Il est plutôt bienveillant à leur égard, et nous répète plusieurs fois, « Ils ne sont pas du tout dangereux, ce sont seulement des sauvages qui veulent le rester quelle que soit les efforts d’intégration du gouvernement. Faut tout de même pas laisser traîner de bricoles, s’ils en ont besoin ils se servent. ». Les enfants vont à l’école lorsque ça les chante, lorsqu’on embauche un adulte on ne sait jamais s’il viendra bosser le lendemain, dès qu’ils ont trois sous ils se posent et glandent. Leur habitat oscille du merdique au sordide, ils sont d’une apparence plus que négligée.
C’était le petit soir, l’orage menaçait et il fallait trouver un coin de bivouac, je n’ai pas rôdé assez dans le village Rom pour le lancer à faire des photos.
Nuit tranquille dans un pré fauché.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Le canyon, c’est de la bombe !
Au niveau d’un pont nous descendons d’une cinquantaine de mètres par un mauvais sentier abrupt afin d’atteindre le cours d’un ruisseau à sec. Il est encombré d’arbres emportés par les crues du printemps, et d’énormes blocs de granit polis. Il fait agréablement frais. Les falaises se resserrent progressivement et après une grosse demi-heure de marche on arrive à une succession de résurgences qui génèrent un petit torrent. Etrangement l’eau n’est pas du tout froide, sans doute dans les 15 degrés, on peut imaginer que quelques sources hydrothermales la réchauffe lors de son parcours sous-terrain.
M. ne souhaite pas poursuivre, le canyon devient très étroit, parfois moins de deux mètres, il fait presque nuit tant les falaises sont hautes et l’eau résonne entre les parois. C’est un poil oppressant. Elle m’attend au sec sur une banquette confortable. Je poursuis seul, les résurgences alimentent le torrent qui devient plus profond, j’ai parfois de l’eau à mi-cuisse, et je dois contourner de petits rapides. Belle ambiance. Je suis accompagné de bergeronnettes des ruisseaux et de cingles plongeurs. Je progresse une petite demi-heure jusqu’à ce que la gorge s’ouvre un peu et que le canyon soit remplacé par une vallée un peu plus large. Des coteaux herbeux succèdent aux falaises.
Je fais demi-tour afin de rejoindre rapidement M. qui m’attend plus haut.
Petit café dans un bistrot épicerie de village très coquet. La patronne est sympa et nous fait la causette dans un anglais fort acceptable.
Nous atteignons le monastère de Horesu dans une chaleur intense.
C’est une splendeur du XVIIème en très bon état d’origine. L’église magnifiquement ornée trône au milieu d’une vaste cour fermée. C’est très bien entretenu, pelouses vertes, balcons des galeries couvertes couverts de géranium, façades impeccablement blanches.
L’église est agréablement fraîche, les fresques superbes et les reliques disposées dans les habituels coffres en argent couverts de pierreries.
Toujours plaisant.
Le lieu est très calme, pas de touristes. Durant de longs moments la cour fermée est déserte. L’église est seulement occupée de quelques nones qui passent les icônes au désinfectant ou compte la recette de la vente des bougies.
Entre un pope accompagné de deux ou trois fidèles, peut-être des membres de sa famille, ils se livrent à quelques rapides cérémoniels, génuflexions, prosternation et embrassade des reliquaires ou des icônes importantes et bien vite quittent les lieux. On les sent presque pressés d’en finir avec une nécessité incontournable qui semble ne leur occasionner ni plaisir ni désagrément. Un peu comme un travail qu’on se doit d’effectuer avec diligence et efficacité.
Je repère une petite piste qui part dans la montagne, on doit pouvoir atteindre 1500 m nous aurons frais cette nuit.
La route est bien tracée et serpente dans la forêt jusqu’à atteindre … une station de ski de deux pistes avec quelques bâtiments et un hôtel assez vaste. Plus loin, un grand monastère tout neuf surveille le plateau.
J’avais rêvé d’un coin tranquille et solitaire …
Nous poursuivons sur un chemin assez médiocre qui donne accès aux alpages et le paysage est un enchantement. Une succession de crêtes herbeuses mollement arrondies partent dans toutes les directions, leurs bords plongent dans des pentes abruptes couvertes de sapins qui donnent dans les vallées. Au loin d’autres montagnes avec le même schéma aussi loin que le regard peut porter. Le paysage est sillonné de petites pistes qui donnent accès aux bergeries.
Il fait très frais. Je cuisine un chou accompagné d’un joli morceau d’échine de porc fumée et salée. C’est super bon avec un verre de vin.
Cette nuit nous supporterons les duvets, le vent s’est levé et nous sommes à plus de 1500 m.
Demain, ballade sur les crêtes au gré de nos humeurs et de ce que le hasard des croisements décidera. Le secteur est très mal cartographié, tout au feeling nous finirons bien par trouver à redescendre de la montagne … Au pire nous avions plusieurs de jours de vivres et les sources ne manquent pas.
Nan, j’déconne, en étant pas trop con et en acceptant de faire parfois demi-tour, c’est sans doute assez facile de trouver son chemin, on voit loin.
Au niveau d’un pont nous descendons d’une cinquantaine de mètres par un mauvais sentier abrupt afin d’atteindre le cours d’un ruisseau à sec. Il est encombré d’arbres emportés par les crues du printemps, et d’énormes blocs de granit polis. Il fait agréablement frais. Les falaises se resserrent progressivement et après une grosse demi-heure de marche on arrive à une succession de résurgences qui génèrent un petit torrent. Etrangement l’eau n’est pas du tout froide, sans doute dans les 15 degrés, on peut imaginer que quelques sources hydrothermales la réchauffe lors de son parcours sous-terrain.
M. ne souhaite pas poursuivre, le canyon devient très étroit, parfois moins de deux mètres, il fait presque nuit tant les falaises sont hautes et l’eau résonne entre les parois. C’est un poil oppressant. Elle m’attend au sec sur une banquette confortable. Je poursuis seul, les résurgences alimentent le torrent qui devient plus profond, j’ai parfois de l’eau à mi-cuisse, et je dois contourner de petits rapides. Belle ambiance. Je suis accompagné de bergeronnettes des ruisseaux et de cingles plongeurs. Je progresse une petite demi-heure jusqu’à ce que la gorge s’ouvre un peu et que le canyon soit remplacé par une vallée un peu plus large. Des coteaux herbeux succèdent aux falaises.
Je fais demi-tour afin de rejoindre rapidement M. qui m’attend plus haut.
Petit café dans un bistrot épicerie de village très coquet. La patronne est sympa et nous fait la causette dans un anglais fort acceptable.
Nous atteignons le monastère de Horesu dans une chaleur intense.
C’est une splendeur du XVIIème en très bon état d’origine. L’église magnifiquement ornée trône au milieu d’une vaste cour fermée. C’est très bien entretenu, pelouses vertes, balcons des galeries couvertes couverts de géranium, façades impeccablement blanches.
L’église est agréablement fraîche, les fresques superbes et les reliques disposées dans les habituels coffres en argent couverts de pierreries.
Toujours plaisant.
Le lieu est très calme, pas de touristes. Durant de longs moments la cour fermée est déserte. L’église est seulement occupée de quelques nones qui passent les icônes au désinfectant ou compte la recette de la vente des bougies.
Entre un pope accompagné de deux ou trois fidèles, peut-être des membres de sa famille, ils se livrent à quelques rapides cérémoniels, génuflexions, prosternation et embrassade des reliquaires ou des icônes importantes et bien vite quittent les lieux. On les sent presque pressés d’en finir avec une nécessité incontournable qui semble ne leur occasionner ni plaisir ni désagrément. Un peu comme un travail qu’on se doit d’effectuer avec diligence et efficacité.
Je repère une petite piste qui part dans la montagne, on doit pouvoir atteindre 1500 m nous aurons frais cette nuit.
La route est bien tracée et serpente dans la forêt jusqu’à atteindre … une station de ski de deux pistes avec quelques bâtiments et un hôtel assez vaste. Plus loin, un grand monastère tout neuf surveille le plateau.
J’avais rêvé d’un coin tranquille et solitaire …
Nous poursuivons sur un chemin assez médiocre qui donne accès aux alpages et le paysage est un enchantement. Une succession de crêtes herbeuses mollement arrondies partent dans toutes les directions, leurs bords plongent dans des pentes abruptes couvertes de sapins qui donnent dans les vallées. Au loin d’autres montagnes avec le même schéma aussi loin que le regard peut porter. Le paysage est sillonné de petites pistes qui donnent accès aux bergeries.
Il fait très frais. Je cuisine un chou accompagné d’un joli morceau d’échine de porc fumée et salée. C’est super bon avec un verre de vin.
Cette nuit nous supporterons les duvets, le vent s’est levé et nous sommes à plus de 1500 m.
Demain, ballade sur les crêtes au gré de nos humeurs et de ce que le hasard des croisements décidera. Le secteur est très mal cartographié, tout au feeling nous finirons bien par trouver à redescendre de la montagne … Au pire nous avions plusieurs de jours de vivres et les sources ne manquent pas.
Nan, j’déconne, en étant pas trop con et en acceptant de faire parfois demi-tour, c’est sans doute assez facile de trouver son chemin, on voit loin.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
La nuit n'a pas été "Nuit câline, nuit de Chine" ...
Vers minuit le vent a tourné et il a beaucoup forci, le camion était mal orienté. Au moins 60 km/h. Ca secouait bien, obligé de sortir régler les problèmes d'auvents ou de moustiquaires qui faseillaient violemment.
Les petites nuisances.
On a traîné au lit. Petit déjeuner face aux montagnes. puis on est parti sur les plateaux. C'est un peu la merde comme prévu, des pistes qui sont coupées, obligé de faire demi-tour. Cependant super panorama et grosse ambiance. J'ai voulu insister un peu et j'ai dû faire quelques franchissements un peu rudes et flippants. J'ai déjà vu M. gueuler plus que ça d'autres fois. Elle se résigne aux nuisances avec le temps.
Rencontré deux bandes Roumains en 4x4 qui se baladaient. L'un d'entre-eux parlait assez bine français, il avait fait la Légion Étrangère et nous a raconté son histoire.
Croisé aussi un couple de jeunes Espagnols trop mignons et cool, papoté un bon moment.
Ce soir joli petit coin on est vers les 1000 m sur les premiers coteaux et on domine la plaine.
Des vaches nous ont tenu compagnie. Il a suffi que je me douche pour que passe le berger. Il était tordu de rire.
Chuis grave à la ramasse sur les photos. En plus j'y vois rien sur ce putain d'écran de Lenovo.
Demain on se fera peut-être une pansion histoire de se reposer un peu et de se laver dans de meilleures conditions. Si on est raisonnable on s'arrêtera plus tôt.
Vers minuit le vent a tourné et il a beaucoup forci, le camion était mal orienté. Au moins 60 km/h. Ca secouait bien, obligé de sortir régler les problèmes d'auvents ou de moustiquaires qui faseillaient violemment.
Les petites nuisances.
On a traîné au lit. Petit déjeuner face aux montagnes. puis on est parti sur les plateaux. C'est un peu la merde comme prévu, des pistes qui sont coupées, obligé de faire demi-tour. Cependant super panorama et grosse ambiance. J'ai voulu insister un peu et j'ai dû faire quelques franchissements un peu rudes et flippants. J'ai déjà vu M. gueuler plus que ça d'autres fois. Elle se résigne aux nuisances avec le temps.
Rencontré deux bandes Roumains en 4x4 qui se baladaient. L'un d'entre-eux parlait assez bine français, il avait fait la Légion Étrangère et nous a raconté son histoire.
Croisé aussi un couple de jeunes Espagnols trop mignons et cool, papoté un bon moment.
Ce soir joli petit coin on est vers les 1000 m sur les premiers coteaux et on domine la plaine.
Des vaches nous ont tenu compagnie. Il a suffi que je me douche pour que passe le berger. Il était tordu de rire.
Chuis grave à la ramasse sur les photos. En plus j'y vois rien sur ce putain d'écran de Lenovo.
Demain on se fera peut-être une pansion histoire de se reposer un peu et de se laver dans de meilleures conditions. Si on est raisonnable on s'arrêtera plus tôt.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Re: Conte rendu d'errance
- Sous spoiler donc:
- Ah oui, le tire tique, l'outil essentiel pour se balader dans les herbes, vais m'en procurer un et le laisser dans la bagnole. Pour lyme, j'imagine que la doc t'as briefé, mais sinon faut surveiller autour de la piqure s'il n'y pas un cercle rouge (un cercle, pas un rond) qui se développe dans les jours à venir, si oui faut consulter tout de suite (je connaissais pas le médic en préventif, cool). La pire tique étant celle du cheval qui peut poursuivre son hôte sur une centaine de mètres, et qui est bien plus balèze que les autres. Tiens? J'ai le pic épeichette qui est revenu taper sur le frêne ce matin... pendant que les mésanges font un carnage dans la pelouse ces petites voraces.
Je me demande ce qui ne pourrait pas être bon avec un verre de vin... surtout si le vin est mauvais.
C'est supportable au fait le vin roumain?
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
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Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Marrant je pensais à un truc ...
Ça fait bientôt deux semaines qu'on se balade. Et depuis le lendemain de notre départ (Serbie) nous avons vu seulement des blancs. Pas un Arabe ou un Noir, pas plus qu'un Asiatique d'un modèle ou d'un autre.
C'est étrange d'avoir à se souvenir qu'il existe des pays dans lesquels il règne une telle unicité d'apparence, si on exclut les Gypsies. Ils ne sont d'ailleurs largement pas tous typés, les plus fourbes passeraient inaperçus n'étaient une lueur particulière dans le regard.
Je n'en tire aucune conclusion. C'est un simple constat.
Honnêtement le vin roumain est très correct. Clair que je le choisis dans la gamme supérieure entre 6 et 10 € la bouteille ce qui est très cher pour le pays.
Pas de grand crus, souvent trop capiteux, mais tout à fait respectable. Sous condition de le choisir sec. Ici ils vinifient même le rouge en vin doux ou demi-sec. J'ai horreur de ça mais c'est une question de goût. Même le Sauterne ou les vendanges tardives alsaciennes n'ont pas grâce à mon palais.
Ça fait bientôt deux semaines qu'on se balade. Et depuis le lendemain de notre départ (Serbie) nous avons vu seulement des blancs. Pas un Arabe ou un Noir, pas plus qu'un Asiatique d'un modèle ou d'un autre.
C'est étrange d'avoir à se souvenir qu'il existe des pays dans lesquels il règne une telle unicité d'apparence, si on exclut les Gypsies. Ils ne sont d'ailleurs largement pas tous typés, les plus fourbes passeraient inaperçus n'étaient une lueur particulière dans le regard.
Je n'en tire aucune conclusion. C'est un simple constat.
Honnêtement le vin roumain est très correct. Clair que je le choisis dans la gamme supérieure entre 6 et 10 € la bouteille ce qui est très cher pour le pays.
Pas de grand crus, souvent trop capiteux, mais tout à fait respectable. Sous condition de le choisir sec. Ici ils vinifient même le rouge en vin doux ou demi-sec. J'ai horreur de ça mais c'est une question de goût. Même le Sauterne ou les vendanges tardives alsaciennes n'ont pas grâce à mon palais.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
bran
- Spoiler:
- Alors que moi, hier, je suis allé à l'épicerie du coin acheter un kil de rouge frelaté, ben j'ai pas croisé un blanc. Normal, j'habite dans les nouveaux
ghettosquartiers toulousains. Pour ce qui est des roms, y'a un campement en face de la déchetterie à 1km et quelques autres bidonvilles par ci par là.
Pas tirer de conclusions, c'est parce que ça écorche un peu la gueule?
J'y vois plusieurs raisons, le passé colonisateur de la France (que n'ont pas ces pays de l'Est), le fait qu'il n'y ait rien a gratter en Roumanie ou si peu, et que le peu qu'il y a a gratter l'est par des mafias déjà bien établies et un pouvoir corrompu de longue date (j'ai écrit Roumanie, mais je pense que ça vaut pour tous les Ex pays de l'Est, la N'drangheta n'est vraiment pas loin).
C'est compliqué d'expliquer à certaines personnes que si on veut pas que les gens se conduisent en animaux (et y'en a) faudrait déjà pas les traiter comme des animaux (même si des fois ça démange, au final ya toujours des étincelles d'humanité qu'on imaginerait même pas, surtout si on croit ça impossible dans ces conditions, ce qui est un biais cognitif)
Et bon, quand je vois qu'ici à Rennes cinq jeunes ont défoncé le crâne d'un intermittent du spectacle... je me demande qui c'est les barbares (parce que bon, les roumains c'est pas réputé être des tendres, la parité, c'est pas gagné encore chez eux, et ça c'est rien)
Ouais, ici il y a le Maury, le Banyuls ... c'est assez à la mode chez les gens qui en fait n'aiment pas le vin
Le problème d'un Sauternes ou d'un "vendanges tardives" , c'est que ce sont des vins assez chers et qu'en général ne sont accessibles que ceux dont le prix a été baissé pour de bonnes raisons.
Ici (ouais, même chez moi ces salauds, mériteraient la corde), on rajoute des saloperies dans le vin (ouais déjà que...) pour donner du "goût", du coup ce n'est plus du vin, mais du sirop, de vanille, de fraise, de parfums vomitifs pour d'autres...
Perso je préfère de l'authentique piquette à des assemblages pourris.
Normalement tu devrais tomber sur des cuvées "Dracula" si tu va dans des coins à touristes.
Si tu vas vers Brasov, t'as le château de Bran sur la route.
Un petit tour sur le Danube avec ça?
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Pas trop de réseau dans les bivouacs du soir ces temps. Et la journée flemme de sortir le note-book etc.
31-07
On a un peu trainé ce matin, l’air était agréablement frais, le petit déjeuner s’est un peu éternisé. Du café, des œufs, des tomates et du concombre avec beaucoup d’huile d’olive et un fromage qui ressemble un peu à la féta, des copeaux de lard gras fumé.
Nous roulons avec pour objectif Curtea de Arges dans laquelle une église renommée et un monastère doivent être visités. Nous avons des obligations vis-à-vis du guide Vert Michelin dont nous devons valider les appréciations.
La route est encombrée de la circulation du week-end. Par distraction je rate l’embranchement du « périphérique » et nous rentrons dans la ville de Ramnicu Valea. Elle n’est citée par aucun guide, n’intéresse personne, il n’y a rien à y visiter et pourtant 100 000 personnes y vivent.
Je décide de lui donner une chance.
Il serait exagéré de dire que la vaste boulevard principal est coquet mais c’est loin d’être un désastre. Je gare le Camion et rentre en méditation devant un panneau d’instructions en roumain indiquant les modalités de paiement du stationnement. Un de ces moments de solitude du voyageur … Il nous est arrivé d’être facturé à la frontière, l’efficacité des systèmes de flicages est parfois désarmante. Une femme sort de sa boutique de tabac et dans un anglais correct nous fait savoir que nous sommes dans la semaine bénie de l’année durant laquelle le stationnement est gratuit pour cause de fête municipale. Je noue le contact, elle est charmante et nous invite à rentrer dans sa boutique climatisée, il fait une chaleur torride dans la rue. En résumé, elle a quitté un poste de clerc de notaire tant son patron était odieux, n’en a pas cherché un autre certaine que le climat dans les études est globalement détestable avec le petit personnel et a monté depuis un an sa boutique qui vend du tabac en vrac et des tubes à cigarette. Etrangement ce marché est distinct des clopes cousues machine. Les affaires sont correctes sans plus mais elle est libre. Son mari est en week-end, il est chauffeur routier et se tape des allers-retours en Allemagne. Elle offre un café afin de pouvoir nous raconter ses espoirs et ses déceptions, elle regrette le temps de Ceausescu. De quelle liberté parle-t-on à l’Ouest lorsque désormais la médecine est payante, que le système éducatif part à vau l’eau, que les appart HLM tombent en ruine ? A quoi bon une presse indépendante et critique du système politique si toutes les usines ont fermé et que les enfants n’ont que l’option de fuir vers l’Ouest ? Et dans l’ancien temps, pour chaque arbre coupé, on devait en planter deux, les enfants des écoles et le pionniers en étaient chargés durant les vacances. Aujourd’hui, des sociétés autrichiennes viennent couper des hêtres multi-centenaires dans les forêts primaires des parcs nationaux. Nous l’avons d’ailleurs vu les jours précédents, nos copains cueilleurs de myrtilles nous en ont parlé et nous ont montré des zones dévastées les années précédentes. Faut dire que les Autrichiens sont renommés pour être de fervents défenseurs des milieux naturels … chez eux. J’ai beaucoup admiré le soutien historique des gouvernements d’Autriche au peuple Palestinien, à Arafat, au FPLP, jusqu’à ce que je comprenne que c’était par antisémitisme.
Nous marchons au bord de la rivière sous un soleil accablant afin de rejoindre un parc public que nous a indiqué notre nouvelle copine.
Une fanfare en grande tenu joue des airs martiaux et, en alternance, des chansons populaires que les badauds fredonnent. A l’occasion des festivités de nombreux stands d’art populaire et d’artisanat proposent des babioles de toutes les régions. L’ambiance est familiale, bon enfant. Je m’arrête devant de la broderie à fil tiré particulièrement élaborée et de très belle qualité. Avec M. nous admirons le travail. La vendeuse nous aborde, une dame un peu âgée (même vue par moi …) souriante et affable. Elle nous explique être une sorte de Meilleur Ouvrier de France mais roumaine ( ?). Et nous montre une photo dédicacée par Barbara Bush lors d’une exposition à Washington. J’avais raison de l’extasier devant la qualité de son travail. Elle est si fière que je m’en sois aperçu qu’elle nous offre un mouchoir brodé.
Nous quittons la ville et rejoignons Curtea de Arges notre destination. Nous trouvons une pansion modeste mais confortable et propre. La patronne est super sympa, elle accepte de faire notre lessive.
Nous allons diner vers 18 h dans un super bon restaurant indiqué par la pansion. Une famille d’ouvriers Roumains vivant en France nous branche, ils sont en vacances et, le change aidant, sont les rois du pétrole. Ils ont pris la veille la route que nous suivrons et ont filmé des ours qui zonent au bord du goudron. C’est donc vrai !
De retour à la pansion nous faisons la connaissance d’une femme de la quarantaine qui est prof de fac en économie de la culture et qui a longtemps organisé des festivals de théâtre ou de musique de la nouvelle scène et des expos. Elle est accompagnée de son ami prof de philo. Nous passons la soirée ensemble jusqu’à une heure fort avancée en buvant du vin local.
Un de ces moments magique. Ils sont cultivés, fort intelligents, désinhibés et sans fausse pudeur, désireux d’échanger vite et intensément puisque nous n’aurons qu’une soirée pour le faire.
C’est la force de ces rencontres sans lendemain, on peut s’y livrer puisque aucun enjeu à venir n’est à craindre.
31-07
On a un peu trainé ce matin, l’air était agréablement frais, le petit déjeuner s’est un peu éternisé. Du café, des œufs, des tomates et du concombre avec beaucoup d’huile d’olive et un fromage qui ressemble un peu à la féta, des copeaux de lard gras fumé.
Nous roulons avec pour objectif Curtea de Arges dans laquelle une église renommée et un monastère doivent être visités. Nous avons des obligations vis-à-vis du guide Vert Michelin dont nous devons valider les appréciations.
La route est encombrée de la circulation du week-end. Par distraction je rate l’embranchement du « périphérique » et nous rentrons dans la ville de Ramnicu Valea. Elle n’est citée par aucun guide, n’intéresse personne, il n’y a rien à y visiter et pourtant 100 000 personnes y vivent.
Je décide de lui donner une chance.
Il serait exagéré de dire que la vaste boulevard principal est coquet mais c’est loin d’être un désastre. Je gare le Camion et rentre en méditation devant un panneau d’instructions en roumain indiquant les modalités de paiement du stationnement. Un de ces moments de solitude du voyageur … Il nous est arrivé d’être facturé à la frontière, l’efficacité des systèmes de flicages est parfois désarmante. Une femme sort de sa boutique de tabac et dans un anglais correct nous fait savoir que nous sommes dans la semaine bénie de l’année durant laquelle le stationnement est gratuit pour cause de fête municipale. Je noue le contact, elle est charmante et nous invite à rentrer dans sa boutique climatisée, il fait une chaleur torride dans la rue. En résumé, elle a quitté un poste de clerc de notaire tant son patron était odieux, n’en a pas cherché un autre certaine que le climat dans les études est globalement détestable avec le petit personnel et a monté depuis un an sa boutique qui vend du tabac en vrac et des tubes à cigarette. Etrangement ce marché est distinct des clopes cousues machine. Les affaires sont correctes sans plus mais elle est libre. Son mari est en week-end, il est chauffeur routier et se tape des allers-retours en Allemagne. Elle offre un café afin de pouvoir nous raconter ses espoirs et ses déceptions, elle regrette le temps de Ceausescu. De quelle liberté parle-t-on à l’Ouest lorsque désormais la médecine est payante, que le système éducatif part à vau l’eau, que les appart HLM tombent en ruine ? A quoi bon une presse indépendante et critique du système politique si toutes les usines ont fermé et que les enfants n’ont que l’option de fuir vers l’Ouest ? Et dans l’ancien temps, pour chaque arbre coupé, on devait en planter deux, les enfants des écoles et le pionniers en étaient chargés durant les vacances. Aujourd’hui, des sociétés autrichiennes viennent couper des hêtres multi-centenaires dans les forêts primaires des parcs nationaux. Nous l’avons d’ailleurs vu les jours précédents, nos copains cueilleurs de myrtilles nous en ont parlé et nous ont montré des zones dévastées les années précédentes. Faut dire que les Autrichiens sont renommés pour être de fervents défenseurs des milieux naturels … chez eux. J’ai beaucoup admiré le soutien historique des gouvernements d’Autriche au peuple Palestinien, à Arafat, au FPLP, jusqu’à ce que je comprenne que c’était par antisémitisme.
Nous marchons au bord de la rivière sous un soleil accablant afin de rejoindre un parc public que nous a indiqué notre nouvelle copine.
Une fanfare en grande tenu joue des airs martiaux et, en alternance, des chansons populaires que les badauds fredonnent. A l’occasion des festivités de nombreux stands d’art populaire et d’artisanat proposent des babioles de toutes les régions. L’ambiance est familiale, bon enfant. Je m’arrête devant de la broderie à fil tiré particulièrement élaborée et de très belle qualité. Avec M. nous admirons le travail. La vendeuse nous aborde, une dame un peu âgée (même vue par moi …) souriante et affable. Elle nous explique être une sorte de Meilleur Ouvrier de France mais roumaine ( ?). Et nous montre une photo dédicacée par Barbara Bush lors d’une exposition à Washington. J’avais raison de l’extasier devant la qualité de son travail. Elle est si fière que je m’en sois aperçu qu’elle nous offre un mouchoir brodé.
Nous quittons la ville et rejoignons Curtea de Arges notre destination. Nous trouvons une pansion modeste mais confortable et propre. La patronne est super sympa, elle accepte de faire notre lessive.
Nous allons diner vers 18 h dans un super bon restaurant indiqué par la pansion. Une famille d’ouvriers Roumains vivant en France nous branche, ils sont en vacances et, le change aidant, sont les rois du pétrole. Ils ont pris la veille la route que nous suivrons et ont filmé des ours qui zonent au bord du goudron. C’est donc vrai !
De retour à la pansion nous faisons la connaissance d’une femme de la quarantaine qui est prof de fac en économie de la culture et qui a longtemps organisé des festivals de théâtre ou de musique de la nouvelle scène et des expos. Elle est accompagnée de son ami prof de philo. Nous passons la soirée ensemble jusqu’à une heure fort avancée en buvant du vin local.
Un de ces moments magique. Ils sont cultivés, fort intelligents, désinhibés et sans fausse pudeur, désireux d’échanger vite et intensément puisque nous n’aurons qu’une soirée pour le faire.
C’est la force de ces rencontres sans lendemain, on peut s’y livrer puisque aucun enjeu à venir n’est à craindre.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Re: Conte rendu d'errance
1-08
Nous nous levons tard … Prenons un petit déjeuner plus que copieux et nous recouchons ….
La chaleur est terrible en ce début d’après-midi. Les roumains se plaignent d’une canicule historique.
Nous décidons néanmoins de partir à pied au centre ville afin de faire les visites de rigueur.
Une église du XIVème avec pas mal de réno du XVIIIème, de bonnes fresques dans leur jus.
Puis un monastère XVIème assez original dans son architecture, l’intérieur tout bien repeint à neuf.
C’est bien aussi parfois de ne rien foutre ou presque.
A nouveau un bon repas et une longue nuit en clim sur un bon lit bien plus large que celui du Camion …
Nous nous levons tard … Prenons un petit déjeuner plus que copieux et nous recouchons ….
La chaleur est terrible en ce début d’après-midi. Les roumains se plaignent d’une canicule historique.
Nous décidons néanmoins de partir à pied au centre ville afin de faire les visites de rigueur.
Une église du XIVème avec pas mal de réno du XVIIIème, de bonnes fresques dans leur jus.
Puis un monastère XVIème assez original dans son architecture, l’intérieur tout bien repeint à neuf.
C’est bien aussi parfois de ne rien foutre ou presque.
A nouveau un bon repas et une longue nuit en clim sur un bon lit bien plus large que celui du Camion …
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Re: Conte rendu d'errance
02-08
Nous partons pour un incontournable du pays la « Route Transfagarsan ». La traversée d’un massif de montagne avec un col à 2300. Bon, faudrait pas avoir circulé dans les Alpes pour être enthousiaste.
Mais la balade est sauvée puisque nous avons vu l’OURS ! Un glandu qui semble-t-il traine au bord du goudron et regarde goguenard les touristes. Il est d’ailleurs muni d’un collier émetteur avec GPS raison pour laquelle nous avons reçu un SMS nous mettant en garde contre sa présence.
Au col c’est une foire indicible avec parking payant, boutiques de souvenir en tous genres, le paysage est sympa sans plus. Nous fuyons.
Nous atteignons la plaine et cherchons à l’aide la cartographie numérique un accès au massif plus tranquille. Il pleut assez fort, nous trouvons une petit piste qui nous monte vers 1300 mètres. Difficile de trouver un terrain de bivouac, nous sommes en forêt et dans des terrains très pentus. Nous devrons nous contenter d’un tout petit pré au bord de la route. C’est pas un drame il passe seulement une dizaine de voitures par jour.
Nous passons en mode zone à ours (pas de bouffe ou de poubelles dehors, éclairage abondant pour aller pisser).
Il semble que ce ne soit vraiment pas une blague, les accidents sont assez rares mais parfois graves.
Ce sera l’occasion de tester le chauffage durant la nuit, il caille sérieux ce soir et il fait très humide
Nous partons pour un incontournable du pays la « Route Transfagarsan ». La traversée d’un massif de montagne avec un col à 2300. Bon, faudrait pas avoir circulé dans les Alpes pour être enthousiaste.
Mais la balade est sauvée puisque nous avons vu l’OURS ! Un glandu qui semble-t-il traine au bord du goudron et regarde goguenard les touristes. Il est d’ailleurs muni d’un collier émetteur avec GPS raison pour laquelle nous avons reçu un SMS nous mettant en garde contre sa présence.
Au col c’est une foire indicible avec parking payant, boutiques de souvenir en tous genres, le paysage est sympa sans plus. Nous fuyons.
Nous atteignons la plaine et cherchons à l’aide la cartographie numérique un accès au massif plus tranquille. Il pleut assez fort, nous trouvons une petit piste qui nous monte vers 1300 mètres. Difficile de trouver un terrain de bivouac, nous sommes en forêt et dans des terrains très pentus. Nous devrons nous contenter d’un tout petit pré au bord de la route. C’est pas un drame il passe seulement une dizaine de voitures par jour.
Nous passons en mode zone à ours (pas de bouffe ou de poubelles dehors, éclairage abondant pour aller pisser).
Il semble que ce ne soit vraiment pas une blague, les accidents sont assez rares mais parfois graves.
Ce sera l’occasion de tester le chauffage durant la nuit, il caille sérieux ce soir et il fait très humide
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Re: Conte rendu d'errance
03-08
Comme quoi, il faut se méfier des idées reçues … Il passe plus de dix voitures par jour sur cette route. Dès avant l’aube des groupes de bagnole se succèdent, nous ne sommes pas loin du départ d’un spot de cueillette de baies, myrtilles et framboises. La concurrence doit être rude puisqu’ils démarrent au lever du jour.
Deux chiens faméliques et puants viennent pleurer misère. Je leur donne quelques reste de pain qu’ils dévorent avec frénésie. M. leur lance du sucre qu’ils dédaignent. Amusant de penser que tant de chiens domestiques chez nous sont accros au glucose et qu’ailleurs ils ne le considèrent même pas comme comestible.
On traîne au chaud. Le chauffage est d’une efficacité redoutable. Avant que je trouve les réglages adéquats, la température dans le toit relevable a dépassé 24 ° alors qu’il faisait moins de 10 à l’extérieur et une humidité maximale suite à la forte averse du soir.
L’automne sera donc très gérable.
Nous descendons visiter une station de ski quelques kilomètres en contre-bas. Trois pistes, un télésiège deux places et un téléski. Les familles se baladent sous les pylônes, cueille des bouquets alpins, grappillent des myrtilles sur les pistes. Il ne manque que des 404 et des DS pour se croire dans le Vercors de mon enfance.
Nous quittons les lieux et traversons une forêt d’épicéa en longeant un ruisseau. Le sous-bois est superbe, aéré, moussu à souhait les arbres de haute futaie sans doute très anciens tamisent la lumière. Seuls percent quelques rayons de soleil qui tachent le sol. On espère croiser un ours, idéalement en train de pêcher dans ce qui est sans aucun doute un torrent à truites.
Les forêts sont immenses et atteindre les alpages au-dessus de 1200 m est souvent laborieux, les pistes sont très carrossables en 4x4 mais cahotiques et pierreuses.
Nous arrivons à un petit col à partir duquel nous avons prévu d’atteindre un petit sommet à 2300 m.
Sur une pente abrupte un vieux 4x4 descend très lentement. Il retient plus que tracte une remorque débordant d’immenses sacs. Ceux-ci sont si nombreux qu’il appuient sur le hayon arrière, l’équipage ressemble à un immense escargot, les ballots simulant la coquille et le véhicule l’animal.
Je l’observe descendre avec perplexité. Comment finira l’épopée et surtout que contiennent ces ballots ?
Ma patience est récompensée, plusieurs hommes s’extraient de la voiture et s’agitent afin de tenter de remettre en ordre le chargement. J’apprends qu’il s’agit d’environ 600 kg de lichens récoltés sur les épicéas et destinés à l’industrie cosmétique et phytopharmaceutique.
Je découvre encore un métier improbable.
La randonnée est un peu rude pour nos vieilles jambes mais nous accédons à un panorama d’exception à 360°. Le ciel est mitigé, la lumière médiocre mais tout autour de nous à perte de vue, des montagnes. Sur les pentes des forêts denses de conifères, sur les hauts les lignes de crête en prairie alpine se rejoignent et permettent de passer d’un sommet à l’autre sans perdre trop d’altitude.
Quelques bergeries éparses et pas un promeneur. C’est une sensation perturbante lorsqu’on est habitué aux Alpes encombrées de marcheurs, coureurs, cyclistes qui tachent la montagne de leurs habits techniques criards.
Il fait très frais lors des passages nuageux et venteux. Nous nous calons contre les rochers du sommet pour nous abriter et laissons le temps passer.
Il faut en profiter, fort et vite, les tronçonneuses sont à l’œuvre et partout des saignées terribles et récentes. Nous sommes dans un parc naturel … Je crois bien que les Autrichiens ne sont pas les seule à dévaster ces forêts dont beaucoup sont primaires.
Descente tranquille, nous croisons une forte bande de Gitans armés de peignes et de seaux qui partent aux myrtilles. Ils nous questionnent sur les ressources. Comme je suis vil, je leur indique la pente lointaine dont nous venons et dans laquelle aucun fruit n’est mur.
Nous rejoignons le col. Les Gitans ont fait un casse-dalle avant de monter. Emballages plastiques, bouteilles de bière brisées jonchent le sol. Leurs villages sont d’une saleté repoussante, toutes les ordures traînent au sol ou dans les ruisseaux.
Ils n’ont pas l’exclusivité, sur les aires de repos nous voyons les touristes roumains des classes moyennes supérieures, roulant en BMW ou Mercedes jeter tous leurs déchets sur le sol. Les plus précautionneux le font à proximité des bacs à poubelle qui restent vides, ou les rassemblent en petits tas.
C’est pratique, dans ces pays-là nous pouvons déféquer à notre aise en laissant le papier toilette souillé par terre plutôt que de le charrier avec nous.
Je repère un emplacement plat un peu en hauteur sur l’autre flanc de la montagne, ce sera une place parfaite pour la nuit. Et puis j’aurais un alibi pour expérimenter la piste improbable que mes artistes licheniers (?) du matin descendaient. A l’usage c’est très, très, raide avec des passages en dévers qui ne font absolument pas plaisir, des saignées ravinées profondément occasionnant des croisements de ponts inconfortables.
Je n’ai pas honte de le dire, à plusieurs instants je n’étais pas fier, même si sans doute il restait de la marge. Je suis plus habile pour la conduite à vitesse soutenue sur la grande piste que pour ces passages de trial.
Ces mecs sont des acrobates avoir descendu ça avec une remorque chargée de 600 kg au cul.
Il fait frais, j’allume un petit feu qui chassera les ours (!) et surtout ces drôles de moustiques roumains qui vivent en altitude loin des eaux stagnantes (les bâtards …).
J’ai tant fait de feux dans ma vie. Durant l’enfance, dans le terrain vague qui nous servait de parc de loisir. Plus tard, en montagne lors de camps d’ados. Dans le Sahel ou le désert, les soirées sont fraîches et jamais nous n’oublions des charger le pick-up de bois dans les forêts dévastées par les grandes sécheresses des années 70-80. Elles annonçaient le changement climatique, nous ne le savions pas. Et ensuite dans notre maison de campagne afin de se réchauffer le corps et le cœur la tête dans les étoiles loin de la pollution lumineuse urbaine. Et j’ai appris à nos enfants à le faire, même avec du bois vert ou sous la pluie.
J’ai allumé l’un de mes feux de camp les plus improbables au Tadjikistan. Au milieu d’un champ de mines anti-personnels dont nous avons découvert l’existence le lendemain en voyant des hommes en combinaison de protection poêle à frire en main arpenter le terrain.
Ce soir, c’est plus calme.
Comme quoi, il faut se méfier des idées reçues … Il passe plus de dix voitures par jour sur cette route. Dès avant l’aube des groupes de bagnole se succèdent, nous ne sommes pas loin du départ d’un spot de cueillette de baies, myrtilles et framboises. La concurrence doit être rude puisqu’ils démarrent au lever du jour.
Deux chiens faméliques et puants viennent pleurer misère. Je leur donne quelques reste de pain qu’ils dévorent avec frénésie. M. leur lance du sucre qu’ils dédaignent. Amusant de penser que tant de chiens domestiques chez nous sont accros au glucose et qu’ailleurs ils ne le considèrent même pas comme comestible.
On traîne au chaud. Le chauffage est d’une efficacité redoutable. Avant que je trouve les réglages adéquats, la température dans le toit relevable a dépassé 24 ° alors qu’il faisait moins de 10 à l’extérieur et une humidité maximale suite à la forte averse du soir.
L’automne sera donc très gérable.
Nous descendons visiter une station de ski quelques kilomètres en contre-bas. Trois pistes, un télésiège deux places et un téléski. Les familles se baladent sous les pylônes, cueille des bouquets alpins, grappillent des myrtilles sur les pistes. Il ne manque que des 404 et des DS pour se croire dans le Vercors de mon enfance.
Nous quittons les lieux et traversons une forêt d’épicéa en longeant un ruisseau. Le sous-bois est superbe, aéré, moussu à souhait les arbres de haute futaie sans doute très anciens tamisent la lumière. Seuls percent quelques rayons de soleil qui tachent le sol. On espère croiser un ours, idéalement en train de pêcher dans ce qui est sans aucun doute un torrent à truites.
Les forêts sont immenses et atteindre les alpages au-dessus de 1200 m est souvent laborieux, les pistes sont très carrossables en 4x4 mais cahotiques et pierreuses.
Nous arrivons à un petit col à partir duquel nous avons prévu d’atteindre un petit sommet à 2300 m.
Sur une pente abrupte un vieux 4x4 descend très lentement. Il retient plus que tracte une remorque débordant d’immenses sacs. Ceux-ci sont si nombreux qu’il appuient sur le hayon arrière, l’équipage ressemble à un immense escargot, les ballots simulant la coquille et le véhicule l’animal.
Je l’observe descendre avec perplexité. Comment finira l’épopée et surtout que contiennent ces ballots ?
Ma patience est récompensée, plusieurs hommes s’extraient de la voiture et s’agitent afin de tenter de remettre en ordre le chargement. J’apprends qu’il s’agit d’environ 600 kg de lichens récoltés sur les épicéas et destinés à l’industrie cosmétique et phytopharmaceutique.
Je découvre encore un métier improbable.
La randonnée est un peu rude pour nos vieilles jambes mais nous accédons à un panorama d’exception à 360°. Le ciel est mitigé, la lumière médiocre mais tout autour de nous à perte de vue, des montagnes. Sur les pentes des forêts denses de conifères, sur les hauts les lignes de crête en prairie alpine se rejoignent et permettent de passer d’un sommet à l’autre sans perdre trop d’altitude.
Quelques bergeries éparses et pas un promeneur. C’est une sensation perturbante lorsqu’on est habitué aux Alpes encombrées de marcheurs, coureurs, cyclistes qui tachent la montagne de leurs habits techniques criards.
Il fait très frais lors des passages nuageux et venteux. Nous nous calons contre les rochers du sommet pour nous abriter et laissons le temps passer.
Il faut en profiter, fort et vite, les tronçonneuses sont à l’œuvre et partout des saignées terribles et récentes. Nous sommes dans un parc naturel … Je crois bien que les Autrichiens ne sont pas les seule à dévaster ces forêts dont beaucoup sont primaires.
Descente tranquille, nous croisons une forte bande de Gitans armés de peignes et de seaux qui partent aux myrtilles. Ils nous questionnent sur les ressources. Comme je suis vil, je leur indique la pente lointaine dont nous venons et dans laquelle aucun fruit n’est mur.
Nous rejoignons le col. Les Gitans ont fait un casse-dalle avant de monter. Emballages plastiques, bouteilles de bière brisées jonchent le sol. Leurs villages sont d’une saleté repoussante, toutes les ordures traînent au sol ou dans les ruisseaux.
Ils n’ont pas l’exclusivité, sur les aires de repos nous voyons les touristes roumains des classes moyennes supérieures, roulant en BMW ou Mercedes jeter tous leurs déchets sur le sol. Les plus précautionneux le font à proximité des bacs à poubelle qui restent vides, ou les rassemblent en petits tas.
C’est pratique, dans ces pays-là nous pouvons déféquer à notre aise en laissant le papier toilette souillé par terre plutôt que de le charrier avec nous.
Je repère un emplacement plat un peu en hauteur sur l’autre flanc de la montagne, ce sera une place parfaite pour la nuit. Et puis j’aurais un alibi pour expérimenter la piste improbable que mes artistes licheniers (?) du matin descendaient. A l’usage c’est très, très, raide avec des passages en dévers qui ne font absolument pas plaisir, des saignées ravinées profondément occasionnant des croisements de ponts inconfortables.
Je n’ai pas honte de le dire, à plusieurs instants je n’étais pas fier, même si sans doute il restait de la marge. Je suis plus habile pour la conduite à vitesse soutenue sur la grande piste que pour ces passages de trial.
Ces mecs sont des acrobates avoir descendu ça avec une remorque chargée de 600 kg au cul.
Il fait frais, j’allume un petit feu qui chassera les ours (!) et surtout ces drôles de moustiques roumains qui vivent en altitude loin des eaux stagnantes (les bâtards …).
J’ai tant fait de feux dans ma vie. Durant l’enfance, dans le terrain vague qui nous servait de parc de loisir. Plus tard, en montagne lors de camps d’ados. Dans le Sahel ou le désert, les soirées sont fraîches et jamais nous n’oublions des charger le pick-up de bois dans les forêts dévastées par les grandes sécheresses des années 70-80. Elles annonçaient le changement climatique, nous ne le savions pas. Et ensuite dans notre maison de campagne afin de se réchauffer le corps et le cœur la tête dans les étoiles loin de la pollution lumineuse urbaine. Et j’ai appris à nos enfants à le faire, même avec du bois vert ou sous la pluie.
J’ai allumé l’un de mes feux de camp les plus improbables au Tadjikistan. Au milieu d’un champ de mines anti-personnels dont nous avons découvert l’existence le lendemain en voyant des hommes en combinaison de protection poêle à frire en main arpenter le terrain.
Ce soir, c’est plus calme.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
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Re: Conte rendu d'errance
04-08
Faudrait tout de même que je sois honnête.
Je vous ai vendu du rêve jusqu’ici. Le réel est un poil plus complexe. Je suis resté moi-même en dépit de toutes ces petites distractions. Vous savez que j’ai enchaîné mes diables, assez solidement. Ce n’est pas pour autant que le bruit de leurs chaînes qu’ils agitent parfois frénétiquement ne m’importune pas. C’est surtout la nuit ces temps, faute de temps dans la journée.
Avec du CBD, beaucoup de relaxation profonde et d’autohypnose j’arrive généralement à me rendormir après que la terreur m’a fait hurler. Il peut m’arriver d’voir besoin d’une benzo. Et parfois rien n’y fait, le goût de l’horreur reste dans ma bouche, même le matin longtemps après le réveil. C’est comme ça, on s’en fout.
Nous avons trainé au lit jusqu’à plus de 10 heures. Comme toujours, M. sait lorsque je suis dans cet état sans que j’aie à dire un mot. Nous avons longuement somnolé, enlacés dans la tiédeur agréable du matin d’altitude. J’ai révisé mes classiques, des images, des scénarios qui reviennent sans cesse et qu’aucun psychotrope ne peut effacer, des constructions mentales symboliques épouvantables de violence avec lesquelles il me faut vivre puisqu’elles sont inscrites à jamais dans mon cerveau. C’est un peu la merde mais très banal et bien documenté dans le spectre des SCPT. Normal.
Mais tout de même, le début de la journée a été fort rude.
Au point que je n’ai pas senti le coup de la randonnée prévue, d’autant que la météo était très incertaine et qu’il ne faut pas trop faire les cons en montagne à 2500 m.
Nous descendons à toute petite vitesse le petit bout de route flippante et rejoignons un chemin correct qui nous amène à la fameuse route « Transalpina » la bien nommée puisqu’elle traverse les Carpates. Ca faisait longtemps que nous n’avions pas roulé sur un bon goudron. Quelques dizaines de kilomètres et nous empruntons une route secondaire qui doit nous amener dans la région des villages Saxons. Quelques allemands se sont installés ici dans des époques anciennes ont apporté leur architecture et leur artisanat, leur communauté est restée endogame durant des siècles.
Nous arrivons au gros village de Jina, un panneau indique un petit musée ethnographique.
Nous y rencontrons Félix avec qui nous sympathisons. Il est le fils de la propriétaire et son histoire est singulière.
Dans les années 2005 alors qu’il est assistant vétérinaire et que sa femme est prof d’anglais il est installé dans une petite vie ordinaire de la classe moyenne à Sibiu une ville de 170 000 habitants. Alors qu’il traverse un boulevard avec son jeune fils de 4 ou 5 ans dans les bras il est renversé par une voiture. Le gosse est gravement blessé, plusieurs fractures du crâne. Il est efficacement soigné mais au cours de son séjour à l’hôpital on lui diagnostique un autisme sans déficit cognitif. Suite au traumatisme psychologique de l’accident, il cesse de parler.
Le chauffeur responsable du drame explique être l’homme de confiance d’un baron français qui cherche du personnel et propose à Félix de l’introduire. Il travaille pour celui-ci en Amérique du Sud et les conditions sont plus que confortables.
Félix refuse, il appartient à la classe moyenne, sa petite vie est bien calée à Sibiu et il ne souhaite pas s’expatrier, d’autant qu’il vient de changer de boulot et avoir de la promotion.
Quelques années plus tard, il reçoit un coup de téléphone du chauffeur dont il avait oublié jusqu’à l’existence. Il lui propose de rencontrer le baron qui séjourne à Sibiu pour quelques jours et à qui il a dit tant de bien de Félix … Par curiosité ce dernier accepte, le baron lui propose de devenir régisseur et factotum du château de Villemirande dont il est propriétaire (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Valmirande). Félix hésite beaucoup, il ne parle pas français et n’a pas spécialement de raison de s’expatrier. On lui vend la France comme un paradis d’intégration des enfants handicapés et les médecins roumains lui ont dit qu’il retrouverait peut-être la parole s’il apprenait une langue étrangère. Cet argument le convainc, il part s’installer en 2008, son fils est accueilli en section Ulis, sa femme trouve un job dans un collège et ils vivent en Haute Garonne depuis ce temps.
Accessoirement il me fait visiter la superbe collection d’art populaire et d’ethnographie de sa mère qui collecte des objets depuis des décennies au fur et à mesure que les habitants du village s’en désintéressent. Quelques pièces remarquables de faïence sans doute XVIIème et des costumes anciens de fort belle facture. Pour le reste il nous raconte tout de l’histoire très singulière de son village natal qui coexiste depuis 150 avec une communauté de marginaux pire que les gitans au point qu’on n’a pas souvenir d’un seul mariage mixte.
Ils ont aujourd’hui récupéré la plupart des maisons des Saxons qui ont tous rejoint la ville de Sibiu dans la fin des années 1990 pour y faire des affaires. Elles sont donc toutes dévastées alors qu’à l’époque de la jeunesse de Félix elles étaient coquettes et stylées.
Je n’ai pas d’avis sur la question.
Nous quittons Félix avec qui nous avons passé une bonne partie de l’après-midi et roulons en direction de fortes collines peu habitées dans lesquelles nous trouvons un agréable emplacement pour la nuit.
Je n’ai pas tout compris, au bord de la petit piste nous avons dépassé une bonne dizaine de très gros totems en bois sculptés dressés dans les prés. Ce sont manifestement des sculptures contemporaines qui m’ont semblé de bonne facture. Demain nous étudierons le sujet plus avant.
Puis nous descendrons en ville à Sibiu, il y a semble-t-il beaucoup à visiter.
Faudrait tout de même que je sois honnête.
Je vous ai vendu du rêve jusqu’ici. Le réel est un poil plus complexe. Je suis resté moi-même en dépit de toutes ces petites distractions. Vous savez que j’ai enchaîné mes diables, assez solidement. Ce n’est pas pour autant que le bruit de leurs chaînes qu’ils agitent parfois frénétiquement ne m’importune pas. C’est surtout la nuit ces temps, faute de temps dans la journée.
Avec du CBD, beaucoup de relaxation profonde et d’autohypnose j’arrive généralement à me rendormir après que la terreur m’a fait hurler. Il peut m’arriver d’voir besoin d’une benzo. Et parfois rien n’y fait, le goût de l’horreur reste dans ma bouche, même le matin longtemps après le réveil. C’est comme ça, on s’en fout.
Nous avons trainé au lit jusqu’à plus de 10 heures. Comme toujours, M. sait lorsque je suis dans cet état sans que j’aie à dire un mot. Nous avons longuement somnolé, enlacés dans la tiédeur agréable du matin d’altitude. J’ai révisé mes classiques, des images, des scénarios qui reviennent sans cesse et qu’aucun psychotrope ne peut effacer, des constructions mentales symboliques épouvantables de violence avec lesquelles il me faut vivre puisqu’elles sont inscrites à jamais dans mon cerveau. C’est un peu la merde mais très banal et bien documenté dans le spectre des SCPT. Normal.
Mais tout de même, le début de la journée a été fort rude.
Au point que je n’ai pas senti le coup de la randonnée prévue, d’autant que la météo était très incertaine et qu’il ne faut pas trop faire les cons en montagne à 2500 m.
Nous descendons à toute petite vitesse le petit bout de route flippante et rejoignons un chemin correct qui nous amène à la fameuse route « Transalpina » la bien nommée puisqu’elle traverse les Carpates. Ca faisait longtemps que nous n’avions pas roulé sur un bon goudron. Quelques dizaines de kilomètres et nous empruntons une route secondaire qui doit nous amener dans la région des villages Saxons. Quelques allemands se sont installés ici dans des époques anciennes ont apporté leur architecture et leur artisanat, leur communauté est restée endogame durant des siècles.
Nous arrivons au gros village de Jina, un panneau indique un petit musée ethnographique.
Nous y rencontrons Félix avec qui nous sympathisons. Il est le fils de la propriétaire et son histoire est singulière.
Dans les années 2005 alors qu’il est assistant vétérinaire et que sa femme est prof d’anglais il est installé dans une petite vie ordinaire de la classe moyenne à Sibiu une ville de 170 000 habitants. Alors qu’il traverse un boulevard avec son jeune fils de 4 ou 5 ans dans les bras il est renversé par une voiture. Le gosse est gravement blessé, plusieurs fractures du crâne. Il est efficacement soigné mais au cours de son séjour à l’hôpital on lui diagnostique un autisme sans déficit cognitif. Suite au traumatisme psychologique de l’accident, il cesse de parler.
Le chauffeur responsable du drame explique être l’homme de confiance d’un baron français qui cherche du personnel et propose à Félix de l’introduire. Il travaille pour celui-ci en Amérique du Sud et les conditions sont plus que confortables.
Félix refuse, il appartient à la classe moyenne, sa petite vie est bien calée à Sibiu et il ne souhaite pas s’expatrier, d’autant qu’il vient de changer de boulot et avoir de la promotion.
Quelques années plus tard, il reçoit un coup de téléphone du chauffeur dont il avait oublié jusqu’à l’existence. Il lui propose de rencontrer le baron qui séjourne à Sibiu pour quelques jours et à qui il a dit tant de bien de Félix … Par curiosité ce dernier accepte, le baron lui propose de devenir régisseur et factotum du château de Villemirande dont il est propriétaire (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Valmirande). Félix hésite beaucoup, il ne parle pas français et n’a pas spécialement de raison de s’expatrier. On lui vend la France comme un paradis d’intégration des enfants handicapés et les médecins roumains lui ont dit qu’il retrouverait peut-être la parole s’il apprenait une langue étrangère. Cet argument le convainc, il part s’installer en 2008, son fils est accueilli en section Ulis, sa femme trouve un job dans un collège et ils vivent en Haute Garonne depuis ce temps.
Accessoirement il me fait visiter la superbe collection d’art populaire et d’ethnographie de sa mère qui collecte des objets depuis des décennies au fur et à mesure que les habitants du village s’en désintéressent. Quelques pièces remarquables de faïence sans doute XVIIème et des costumes anciens de fort belle facture. Pour le reste il nous raconte tout de l’histoire très singulière de son village natal qui coexiste depuis 150 avec une communauté de marginaux pire que les gitans au point qu’on n’a pas souvenir d’un seul mariage mixte.
Ils ont aujourd’hui récupéré la plupart des maisons des Saxons qui ont tous rejoint la ville de Sibiu dans la fin des années 1990 pour y faire des affaires. Elles sont donc toutes dévastées alors qu’à l’époque de la jeunesse de Félix elles étaient coquettes et stylées.
Je n’ai pas d’avis sur la question.
Nous quittons Félix avec qui nous avons passé une bonne partie de l’après-midi et roulons en direction de fortes collines peu habitées dans lesquelles nous trouvons un agréable emplacement pour la nuit.
Je n’ai pas tout compris, au bord de la petit piste nous avons dépassé une bonne dizaine de très gros totems en bois sculptés dressés dans les prés. Ce sont manifestement des sculptures contemporaines qui m’ont semblé de bonne facture. Demain nous étudierons le sujet plus avant.
Puis nous descendrons en ville à Sibiu, il y a semble-t-il beaucoup à visiter.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
- joli:
- Merci pour ce récit drôlement bien écrit, ton style est parfait. (à part peut être ceci, c'est un détail: https://www.wiki-anjou.fr/index.php/Pansion)
Pas légendaire donc la nostalgie des années Ceaucescu, d'autant que les anciens de la sécuritate se sont reconvertis les premiers, en parfaits opportunistes.
Pas légendaire non plus le pillage des forêts roumaines, que ce soit par des mafias roumaines ou d'ailleurs, milliardaires chinois compris. Ici, à 200 m de chez un pote dans les Pyrénées ariégoises, une coupe sauvage a été perpétrée par une entreprise espagnole, alors en Roumanie... On n'imagine pas le fric qu'on peut se faire avec du bois, surtout si on l'a gratos. Comme me disait mon père, pour faire fortune, faut vendre un truc qui t'appartiens pas.
Magnifique la photo de la maison de Brancusi, enfin, je trouve surtout magnifique ce travail du bois et ce mode de construction. Une des poutres faisant office de garde corps de la terrasse me laisse particulièrement pantois, je me demande si c'est du chêne ou du peuplier, ce dernier pouvant selon sa qualité être un fabuleux matériau qui tient bien dans le temps, dont sont faits aussi les cageots et les allumettes. De toute façon, les anciens savaient couper le bois quand il fallait et celui qu'il fallait, chose qu'on a un peu oublié, sauf peut être en Suisse.
Marrant cette histoire du château de Valmirande, j'y suis passé bon nombre de fois à côté, je savais que cela appartenait à la famille De Lassus mais je ne connaissais pas l'histoire, je comprends pourquoi on disait qu'ils étaient pétés de thunes. En fait j'ai fait quatre ans d'études à moins de 5 km à l'époque du bac, et avec ma vieille quatre ailes et trois potes on a écumé la cambrousse. J'y connais des coins fabuleux, dont un lac aménagé où nous organisions nos barbecues estudiantins quand le beau temps arrivait et que les hormones flambaient.
T'as quand même une sacré matière pour écrire, et puis ton style est fluide et intéressant. Continue, c'est bien (ça fait tout bizarre d'apprécier un ancien prof, entre autres)
L'imprévu de l'aventure, l'anecdote à la con qui n'en est pas, ça c'est le sel.
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
05-08
Il faut imaginer un vaste coteau herbeux qui est sans doute encore un peu pâturé, mais pas assez régulièrement pour éviter la repousse d’un arbre de ci de là. La petite piste le coupe. Nous avons choisi le petit plateau qui le surmonte afin de dormir au plat.
C’est étonnant de voir se mettre en place si rapidement les routines. D’un regard et de quelques mots nous repérons le lieu de bivouac. M. descend de la voiture, observe les irrégularités du terrain afin de me guider pour que le lit soit horizontal. Au pire, nous avons quelques fortes cales en bois qui judicieusement placées sous les roue aident à mettre le Camion de niveau.
Nous soulevons bien vite le toit afin de pouvoir rester debout pour déballer le matériel : réchaud à essence (un cauchemar que je finis par apprivoiser), table et chaises pliantes, salle de bain (le tuyau de douche et la partie supérieure d’un tabouret en plastique acheté au Maroc qui permet d’avoir les pieds au propre). Nous sortons les seaux en plastique contenant les légumes, le pain et tout le petit bazar ainsi que les bidons d’eau potable qui encombrent le couloir entre les coffres. Nous évitons de boire celle du réservoir qui prend un goût de plastique peu agréable.
Amusant de noter comme le rapport aux objets insignifiants change en fonction du contexte. En France nous buvons de l’eau minérale, celle de la ville est très chlorée et chargée et nitrates. Nous jetons un container de bouteilles vides par semaine. Nous avons encore une bouteille de Cristalline française et deux grosses bouteilles de 5 litres achetées au début du voyage que nous remplissons aux sources dans la montagne. Elles sont nombreuses et l’eau d’une rare pureté. Lorsque nous le pouvons, nous les choisissons dans des terrains cristallins, l’eau y est plus douce.
Lorsque le menu est établi, en général tomate, concombres, feta locale arrosé d’huile d’olive suivi ragout à base de viande de port fumée accompagné de choux, pommes de terre ou carottes, de beaucoup d’oignon et d’ail revenus je commence à préparer le repas ou à chauffer les reste de la veille. Le tout en contemplant « Femme au bain dans le soleil couchant » (d’après Rubens).
Nous parlons peu, les gestes sont machinaux.
Le réchaud à essence est un dangereux criminel mais il est d’une efficacité redoutable. Il a tenté de me tuer au Maroc, je l’ai à l’œil et il sait qu’il ne peut plus m’en remontrer, donc ne tente plus que très occasionnellement de le faire. Le Camping Gaz bleu en bouteille acier est rare dans la plupart des pays et les raccords ne sont pas compatibles. J’ai beaucoup lu de récits d’explorations polaires ou d’aventures alpines durant mon enfance et c’est sans doute aussi dans ceux-ci que j’ai puisé mon goût du voyage. On y utilisait l’emblématique réchaud Primus à essence. Un réservoir est mis sous pression à l’aide d’une petite pompe à main, l’essence est brumisée afin de se mélanger à l’air et de bruler avec une jolie flamme bleu très calorique dans un ronflement agréable. Ce ronron est loué par les explorateurs qui l’associent à la douce chaleur envahissant la tente après une rude journée. Avant même de l’avoir entendu je l’imaginais fort bien.
Afin que la pression dans le réservoir ne chute pas, l’essence sous pression passe dans un tube placé au-dessus de la flamme qui la vaporise. Ce réchaud est donc une sorte de bombe emplis d’essence liquide et gazeuse sous pression. Lorsque tout va bien, c’est d’une efficacité redoutable qui fait pâlir d’envie les bonbonnes bleue de butane. Mais tout ne va pas toujours bien.
La Word Company Colmeman a racheté la marque Primus et l’a améliorée. Par souci d’écologie (?) l’ont adapté à une essence un peu particulière vendue à prix d’or (!) dans tous les supermarchés américains.
Bien entendu ce sont les stations service locales qui m’approvisionnent en carburant blindé d’additifs et de produits divers.
Le réchaud charbonne, parfois une haute flamme jaune et puante remplace l’élégant panache bleu au-dessus du brûleur. Il faut pomper, ajuster le débit pour tenter de rétablir la situation. Au fil du temps le gicleur s’obture, puis soudain se débouche et alors une giclée d’essence liquide s’embrase violemment. C’est particulièrement sensible lors des premiers instants après l’allumage alors que le régime stationnaire n’est pas encore établi. Lors de notre précédente escapade au Maroc, durant une froide matinée qui aurait pu être tragique, le réchaud s’est transformé en lance-flamme qui après m’avoir cramé les sourcils a bien failli mettre le feu au Camion.
Il est hors de question qu’un overlander (je suis très fier d’avoir découvert ce mot, et de savoir que j’appartiens à cette « communauté », je l’ignorais jusqu’à très récemment) se laisse impressionner par la rébellion d’un accessoire. Il se bat pour le dominer et lui faire rendre grâce.
J’ai démonté l’animal, poncé l’aiguille, débouché le gicleur, nettoyé les dépôts et la calamine. Le réchaud s’est résolu, à contre cœur, à fonctionner quelques semaines avant que les incidents ne se multiplient.
Je suis malin et ingénieux, même si ça ne s’est pas toujours vu.
J’ai acheté une bouteille de gaz marocaine toute cabossée puisqu’on ne peut pas les décharger du camion autrement qu’en les lançant sur le sol et un petit brûleur. Pour être honnête j’étais sur le point de renoncer et de passer au gaz, à contre-cœur et l’esprit empli d’amertume face à l’échec du réchaud à essence. Il s’avère que le gaz vendu au Maroc est particulièrement mal raffiné et que leurs brûleurs chinois (toute le monde déteste etc.) sont de qualité chinoise. Compter 15 bonnes minutes pour passer 2 litres d’eau à ébullition. Pourquoi deux litres ? Jamais moins lorsqu’il s’agit de cuire des pâtes pour deux !
Un soir, la lumière m’a envahi alors que je me gelais devant mon butane merdique. J’ai sorti le Primus (oui ! je sais, désormais c’est Coleman, mais je suis nostalgique du XXème jusque dans ces détails) et j’ai chauffé le tube destiné à vaporiser l’essence sur la flamme du gaz. Fortement afin que les dépôts se consument, que la température élevée favorisent le passage de l’essence à l’état de gaz dès les premiers instant de l’allumage. J’ai dominé le monstre, j’ai vaincu l’adversité (et la malveillance humaine).
Avant chaque usage je me conforme à ce rituel et mon réchaud à essence me rend désormais aussi heureux qu’un Jean Mallaurie (cherchez et lisez, c’est sublime …). Plus de défaillance et une flamme redoutable de presque 3 kW
Overlander : une vie, un métier, une philosophie …
Je lis quelques blogs afin d’être mieux préparé à m’intégrer lorsque je rencontrerai un groupe. Le truc qui va mal c’est que nous n’utilisons aucune des applications, groupes Facebook, « download de road-books » etc. qui permettent à tous ces voyageurs de circuler tous sur les mêmes pistes et à dormir tous sur les mêmes hot spots de bivouac afin de s’y retrouver.
Et du coup nous n’en croisons jamais. Encore un échec de ma vie. Alors que je m’apprêtais à faire tous les efforts pour me sentir appartenir sur le tard à un groupe humain cohérent, voilà que je ne le rencontre pas.
Parfois nous en croisons lors de liaisons sur les grandes routes. Ils nous saluent d’un appel de phare (idéalement une rampe de LED sur le toit). Nos véhicules se repèrent de loin (surtout le mien …). Je ne vais tout de même pas faire demi-tour et partir à leur trousses afin de leur dire « Oui, oui, vous avez bien vu le coup, je suis aussi un overlander ! Nous partageons sans doute beaucoup. ». Mais peut-être seraient-ils déçus de voir seulement deux petits vieux qui font les cons sans avoir de projet autre que de gaspiller le temps qui leur reste à vivre ?
Bon reprenons après ces quelques digressions !
Nous sommes dans ce putain de pré dans lequel y’a aussi des chardons et quelques ronces. Et toutes ces sculptures monumentales en bois étalées sont sur trois ou quatre hectares de forte pente. Il fait déjà chaud nous avons traîné au lit, il faisait agréablement frais, et pris un copieux petit déjeuner, l’effort physique soudain et (un peu) violent fait mauvais ménage avec le lard gras fumé.
Nous nous apercevons que les « totems » sont de plusieurs mains avec des styles affirmés très distincts, certains s’approchent de la figuration d’autres sont rigoureusement abstrait. La plupart sont monoxyles taillées dans des troncs spectaculaires de plus d’un mètre de diamètre, leur hauteur atteint près de quatre mètres. D’autres sont assemblés avec de solides pièces métalliques forgées avec parfois des parties mobiles. Ils sont fixés sur des socles de béton ou simplement fichés dans le sol, certains tels des géants vaincus gisent au sol.
Le vent, la neige et le soleil ont patiné, buriné le bois faisant apparaître ses veines profondes qui se mêlent aux coups de ciseau ou de tronçonneuse qui la travaillé.
Quelques sculptures portent une plaque métallique avec un titre, le nom de l’artiste et une date, toujours entre 1981 et 1983.
Je retrouve l’un d’entre-eux sur la toile, il a émigré en France a rencontré un succès d’estime, il est décédé l’an dernier.
Etrange lieu.
La région est assez touristique. Au pied des fortes collines dans lesquelles nous nous trouvons et qui sont très peu fréquentées sont disposés une série de villages Saxons (des émigrés allemands du XIIème siècle) qui sont visités par les roumains en vacances.
Toute la journée je questionne les personnes que je rencontre. Les gens du coin savent que la zonne d’exposition abandonnée en pleine nature existe, ils prétendent ne rien en savoir.
Je n’arriverai pas à comprendre de quoi il s’agit. Peut-être les travaux d’une master-class d’artistes collabos du temps des communistes ?
C’est un objet étrange pour un français un pays multiculturel. Imaginez des Allemands venus il y a près de mille ans, qui continuent à se marier ensemble, à parler leur langue, à ne pas se mélanger. Et qu’il en soit de même pour des Hongrois. Ne parlons pas de Gitans (!). Pour ce qui est des Juifs, les Roumains s’en sont occupés avec zèle.
Dans la cité de merde de mon enfance, les espingouins, les portos, les macaronis, les yougos ont bien vite oublié la langue de leurs ancêtres ont copulé les uns avec les autres. Mais tout de même pas avec les Arabes (qui étaient d’ailleurs rares dans mon quartier) et jamais les Italiens du Nord avec ceux du Sud, y’a des limites aux transgressions tout de même.
Je suis un petit Français métis d’Italien et de Dauphinoise, jamais il ne serait venu à l’idée de mes parents de m’inciter à étudier l’italien à l’école.
Bon rien n’avance ce soir dans mon récit …
Nous visitons le superbe musée de Sibiel. Il conserve plus de 600 icônes peintes en fixé sous verre. Les plus anciennes datent de la fin du XVIIème. Elles étaient réalisées par les plus habiles des paysans de villages autour du lieu, ils les vendaient sur le marché avec leur production agricole. On les achetait comme porte-bonheur et on devait, en bon Orthodoxe, se signer et les tripoter d’une main respectueuse.
La collection est impressionnante, c’est très naïf d’une qualité plastique très variable, suivant les villages ou les époques des styles, des motifs définissent comme des écoles. Aucune n’est signée très rares sont celles qui sont datées. Un travail d’artisan de la dévotion.
La « conservatrice » est une grenouille de bénitier que nous avons rencontré dans l’église orthodoxe du XVIIIème dont la structure est originale et les fresques de qualité. Elle nous l’a fait visiter et n’a pas manqué une génuflexion ou une succession des trois signes de croix conventionnels devant chaque relique ou peinture emblématique. Elle parlait un français plus que correct, était d’une speedeur rare, un peu austère et débordée par la tâche. Elle courrait de l’église au musée en fermant les portes à clés, tout en donnant des explications aux visiteurs qui arrivaient dans le désordre ce qui l’amenait à devoir reprendre sans cesse son discours à zéro. Et nous ne lui avons pas facilité la tâche puisqu’il lui fallut désormais le faire en deux langues.
Par chance les touristes Roumains n’étaient pas du tout intéressés. Ils restaient trois à cinq minutes dans l’église, et guère plus dans le musée dont le tarif d’entrée est dérisoire, même pour eux. Ils ne se sentaient donc même pas dans l’obligation de « rentabiliser » l’investissement.
Je suis lent, je ne comprends pas tout bien, j’ai besoin de temps. Nous sommes restés plus d’une heure dans le musée. Par chance un pope a pris le relais pour la visite de l’église et j’ai pu trainer tout mon saoul. Notre conférencière s’est peu à peu amadouée. Il faut dire qu’elle s’était mise en tête de donner le minimum d’explications à une famille de Polonais de passage. Elle alternait le français et le roumain. Elle s’appliquait à parler lentement et très distinctement, pensant qu’ainsi ces langues s’approcheraient du polonais. Les touristes n’osaient pas trop protester ni s’enfuir, mais on les sentait mal à l’aise et de toute façon fort peu intéressés par le sujet. La plus grande des filles de la famille était charmante dans son short ras du cul, affichant des nibards de belle tenu à moitié à l’air (le tissus est sans doute cher en Pologne ?). Je propose à notre guide d’utiliser cette jeune fille (?) comme intermédiaire, je traduirais en anglais et elle délivrera le message au reste de la famille dans sa langue natale. Elle est soulagée, sa mission civilisatrice passera encore une fois les frontières. Dans les premiers instants, la belle gosse traduisait en polak pour ses parents. Rapidement, deux minutes d’explication en anglais étaient résumées en dix mots de polonais. Puis elle cessa même de traduire. Lorsque je m’en étonnais, elle me répondit : « They dont’t care … ».
Au final, cette jeune fille était très polie en dépit de son cul à l’air. Elle semblait se foutre des explications autant que ses parents mais les écoutait avec philosophie. Sans doute une bonne élève à l’école ?
Toujours est-il que ma conférencière a été fort satisfaite de ma prestation et qu’elle a satisfait ma curiosité sur les icônes de verre sans plus aucune réticence.
J’ai une nouvelle copine à Sibiel.
Il fait très chaud et lourd.
Nous arrivons au village suivant afin de visiter une église fortifiée allemande dont les parties les plus anciennes datent du XIIIème. Elle est entourée d’un fort mur d’enceintes et de tours qui délimitent une vaste zone dans laquelle est installé le bâtiment et de nombreuses annexes. Un coquet gazon et des fleurs accueillent des camping-cars et des vans allemands. Ils campent ici. Nous parcourons les lieux, découvrons l’église avec ses livres de messe en allemand, visitons les tours, nous baladons sur l’ensemble du site.
Lorsque nous sortons, j’aperçois une billetterie, nous sommes rentrées par inadvertance dans l’enceinte par une porte qui n’était pas destinée au public. Je m’approche d’une femme au visage fermé afin de m’acquitter du droit d’entrée. Elle me rabroue et m’indique que le site est fermé à la visite ce jour. Je demande pourquoi, elle me répond un définitif « ‘cause it’s like that ». J’ai hésité à insister pour payer mais je n’ai pas voulu déranger.
Du coup nous avons laissé nos poubelles qui commençaient à fouetter sévère dans leur container à ordures.
Parfois on se dit qu’on a eu raison de gagner la seconde guerre mondiale. En même temps, l’a-t-on gagnée autant que ça ? Parfois on se demande …
Bon c’est pas le tout, on rentre dans Sibiu (150 000 habitants). Pour rassurer ceux qui se préoccupent du devenir climatique de la planète, tout ce cirque se passe sur un parcours de moins de 50 km.
La ville est super belle, on trouve un pansion proche du centre avec un parking pour Camion (si j’étais en Turquie j’écrirais pansyon, hum !).
Petit tour en ville, on dirait Vienne ou certaines zones de Prague, c’est bien rénové coquet, opulent, plein de touristes roumains et même quelques européens.
On se fait un resto de luxe, un des plus chers de la ville me semble-t-il, si on exclut ceux des hôtels internationaux pour business. Faut être honnête le repas était un peu moins gras qu’ailleurs.
Ouh j'ai été bavard !
Et encore vous ne lisez pas les hide faute de réagir !
Vous ne saurez pas ce que nous avons fait aujourd'hui arg arg arg ...
Rien relu, tout au fil de la plume soyez indulgent.
Il faut imaginer un vaste coteau herbeux qui est sans doute encore un peu pâturé, mais pas assez régulièrement pour éviter la repousse d’un arbre de ci de là. La petite piste le coupe. Nous avons choisi le petit plateau qui le surmonte afin de dormir au plat.
C’est étonnant de voir se mettre en place si rapidement les routines. D’un regard et de quelques mots nous repérons le lieu de bivouac. M. descend de la voiture, observe les irrégularités du terrain afin de me guider pour que le lit soit horizontal. Au pire, nous avons quelques fortes cales en bois qui judicieusement placées sous les roue aident à mettre le Camion de niveau.
Nous soulevons bien vite le toit afin de pouvoir rester debout pour déballer le matériel : réchaud à essence (un cauchemar que je finis par apprivoiser), table et chaises pliantes, salle de bain (le tuyau de douche et la partie supérieure d’un tabouret en plastique acheté au Maroc qui permet d’avoir les pieds au propre). Nous sortons les seaux en plastique contenant les légumes, le pain et tout le petit bazar ainsi que les bidons d’eau potable qui encombrent le couloir entre les coffres. Nous évitons de boire celle du réservoir qui prend un goût de plastique peu agréable.
Amusant de noter comme le rapport aux objets insignifiants change en fonction du contexte. En France nous buvons de l’eau minérale, celle de la ville est très chlorée et chargée et nitrates. Nous jetons un container de bouteilles vides par semaine. Nous avons encore une bouteille de Cristalline française et deux grosses bouteilles de 5 litres achetées au début du voyage que nous remplissons aux sources dans la montagne. Elles sont nombreuses et l’eau d’une rare pureté. Lorsque nous le pouvons, nous les choisissons dans des terrains cristallins, l’eau y est plus douce.
Lorsque le menu est établi, en général tomate, concombres, feta locale arrosé d’huile d’olive suivi ragout à base de viande de port fumée accompagné de choux, pommes de terre ou carottes, de beaucoup d’oignon et d’ail revenus je commence à préparer le repas ou à chauffer les reste de la veille. Le tout en contemplant « Femme au bain dans le soleil couchant » (d’après Rubens).
Nous parlons peu, les gestes sont machinaux.
Le réchaud à essence est un dangereux criminel mais il est d’une efficacité redoutable. Il a tenté de me tuer au Maroc, je l’ai à l’œil et il sait qu’il ne peut plus m’en remontrer, donc ne tente plus que très occasionnellement de le faire. Le Camping Gaz bleu en bouteille acier est rare dans la plupart des pays et les raccords ne sont pas compatibles. J’ai beaucoup lu de récits d’explorations polaires ou d’aventures alpines durant mon enfance et c’est sans doute aussi dans ceux-ci que j’ai puisé mon goût du voyage. On y utilisait l’emblématique réchaud Primus à essence. Un réservoir est mis sous pression à l’aide d’une petite pompe à main, l’essence est brumisée afin de se mélanger à l’air et de bruler avec une jolie flamme bleu très calorique dans un ronflement agréable. Ce ronron est loué par les explorateurs qui l’associent à la douce chaleur envahissant la tente après une rude journée. Avant même de l’avoir entendu je l’imaginais fort bien.
Afin que la pression dans le réservoir ne chute pas, l’essence sous pression passe dans un tube placé au-dessus de la flamme qui la vaporise. Ce réchaud est donc une sorte de bombe emplis d’essence liquide et gazeuse sous pression. Lorsque tout va bien, c’est d’une efficacité redoutable qui fait pâlir d’envie les bonbonnes bleue de butane. Mais tout ne va pas toujours bien.
La Word Company Colmeman a racheté la marque Primus et l’a améliorée. Par souci d’écologie (?) l’ont adapté à une essence un peu particulière vendue à prix d’or (!) dans tous les supermarchés américains.
Bien entendu ce sont les stations service locales qui m’approvisionnent en carburant blindé d’additifs et de produits divers.
Le réchaud charbonne, parfois une haute flamme jaune et puante remplace l’élégant panache bleu au-dessus du brûleur. Il faut pomper, ajuster le débit pour tenter de rétablir la situation. Au fil du temps le gicleur s’obture, puis soudain se débouche et alors une giclée d’essence liquide s’embrase violemment. C’est particulièrement sensible lors des premiers instants après l’allumage alors que le régime stationnaire n’est pas encore établi. Lors de notre précédente escapade au Maroc, durant une froide matinée qui aurait pu être tragique, le réchaud s’est transformé en lance-flamme qui après m’avoir cramé les sourcils a bien failli mettre le feu au Camion.
Il est hors de question qu’un overlander (je suis très fier d’avoir découvert ce mot, et de savoir que j’appartiens à cette « communauté », je l’ignorais jusqu’à très récemment) se laisse impressionner par la rébellion d’un accessoire. Il se bat pour le dominer et lui faire rendre grâce.
J’ai démonté l’animal, poncé l’aiguille, débouché le gicleur, nettoyé les dépôts et la calamine. Le réchaud s’est résolu, à contre cœur, à fonctionner quelques semaines avant que les incidents ne se multiplient.
Je suis malin et ingénieux, même si ça ne s’est pas toujours vu.
J’ai acheté une bouteille de gaz marocaine toute cabossée puisqu’on ne peut pas les décharger du camion autrement qu’en les lançant sur le sol et un petit brûleur. Pour être honnête j’étais sur le point de renoncer et de passer au gaz, à contre-cœur et l’esprit empli d’amertume face à l’échec du réchaud à essence. Il s’avère que le gaz vendu au Maroc est particulièrement mal raffiné et que leurs brûleurs chinois (toute le monde déteste etc.) sont de qualité chinoise. Compter 15 bonnes minutes pour passer 2 litres d’eau à ébullition. Pourquoi deux litres ? Jamais moins lorsqu’il s’agit de cuire des pâtes pour deux !
Un soir, la lumière m’a envahi alors que je me gelais devant mon butane merdique. J’ai sorti le Primus (oui ! je sais, désormais c’est Coleman, mais je suis nostalgique du XXème jusque dans ces détails) et j’ai chauffé le tube destiné à vaporiser l’essence sur la flamme du gaz. Fortement afin que les dépôts se consument, que la température élevée favorisent le passage de l’essence à l’état de gaz dès les premiers instant de l’allumage. J’ai dominé le monstre, j’ai vaincu l’adversité (et la malveillance humaine).
Avant chaque usage je me conforme à ce rituel et mon réchaud à essence me rend désormais aussi heureux qu’un Jean Mallaurie (cherchez et lisez, c’est sublime …). Plus de défaillance et une flamme redoutable de presque 3 kW
Overlander : une vie, un métier, une philosophie …
Je lis quelques blogs afin d’être mieux préparé à m’intégrer lorsque je rencontrerai un groupe. Le truc qui va mal c’est que nous n’utilisons aucune des applications, groupes Facebook, « download de road-books » etc. qui permettent à tous ces voyageurs de circuler tous sur les mêmes pistes et à dormir tous sur les mêmes hot spots de bivouac afin de s’y retrouver.
Et du coup nous n’en croisons jamais. Encore un échec de ma vie. Alors que je m’apprêtais à faire tous les efforts pour me sentir appartenir sur le tard à un groupe humain cohérent, voilà que je ne le rencontre pas.
Parfois nous en croisons lors de liaisons sur les grandes routes. Ils nous saluent d’un appel de phare (idéalement une rampe de LED sur le toit). Nos véhicules se repèrent de loin (surtout le mien …). Je ne vais tout de même pas faire demi-tour et partir à leur trousses afin de leur dire « Oui, oui, vous avez bien vu le coup, je suis aussi un overlander ! Nous partageons sans doute beaucoup. ». Mais peut-être seraient-ils déçus de voir seulement deux petits vieux qui font les cons sans avoir de projet autre que de gaspiller le temps qui leur reste à vivre ?
Bon reprenons après ces quelques digressions !
Nous sommes dans ce putain de pré dans lequel y’a aussi des chardons et quelques ronces. Et toutes ces sculptures monumentales en bois étalées sont sur trois ou quatre hectares de forte pente. Il fait déjà chaud nous avons traîné au lit, il faisait agréablement frais, et pris un copieux petit déjeuner, l’effort physique soudain et (un peu) violent fait mauvais ménage avec le lard gras fumé.
Nous nous apercevons que les « totems » sont de plusieurs mains avec des styles affirmés très distincts, certains s’approchent de la figuration d’autres sont rigoureusement abstrait. La plupart sont monoxyles taillées dans des troncs spectaculaires de plus d’un mètre de diamètre, leur hauteur atteint près de quatre mètres. D’autres sont assemblés avec de solides pièces métalliques forgées avec parfois des parties mobiles. Ils sont fixés sur des socles de béton ou simplement fichés dans le sol, certains tels des géants vaincus gisent au sol.
Le vent, la neige et le soleil ont patiné, buriné le bois faisant apparaître ses veines profondes qui se mêlent aux coups de ciseau ou de tronçonneuse qui la travaillé.
Quelques sculptures portent une plaque métallique avec un titre, le nom de l’artiste et une date, toujours entre 1981 et 1983.
Je retrouve l’un d’entre-eux sur la toile, il a émigré en France a rencontré un succès d’estime, il est décédé l’an dernier.
Etrange lieu.
La région est assez touristique. Au pied des fortes collines dans lesquelles nous nous trouvons et qui sont très peu fréquentées sont disposés une série de villages Saxons (des émigrés allemands du XIIème siècle) qui sont visités par les roumains en vacances.
Toute la journée je questionne les personnes que je rencontre. Les gens du coin savent que la zonne d’exposition abandonnée en pleine nature existe, ils prétendent ne rien en savoir.
Je n’arriverai pas à comprendre de quoi il s’agit. Peut-être les travaux d’une master-class d’artistes collabos du temps des communistes ?
C’est un objet étrange pour un français un pays multiculturel. Imaginez des Allemands venus il y a près de mille ans, qui continuent à se marier ensemble, à parler leur langue, à ne pas se mélanger. Et qu’il en soit de même pour des Hongrois. Ne parlons pas de Gitans (!). Pour ce qui est des Juifs, les Roumains s’en sont occupés avec zèle.
Dans la cité de merde de mon enfance, les espingouins, les portos, les macaronis, les yougos ont bien vite oublié la langue de leurs ancêtres ont copulé les uns avec les autres. Mais tout de même pas avec les Arabes (qui étaient d’ailleurs rares dans mon quartier) et jamais les Italiens du Nord avec ceux du Sud, y’a des limites aux transgressions tout de même.
Je suis un petit Français métis d’Italien et de Dauphinoise, jamais il ne serait venu à l’idée de mes parents de m’inciter à étudier l’italien à l’école.
Bon rien n’avance ce soir dans mon récit …
Nous visitons le superbe musée de Sibiel. Il conserve plus de 600 icônes peintes en fixé sous verre. Les plus anciennes datent de la fin du XVIIème. Elles étaient réalisées par les plus habiles des paysans de villages autour du lieu, ils les vendaient sur le marché avec leur production agricole. On les achetait comme porte-bonheur et on devait, en bon Orthodoxe, se signer et les tripoter d’une main respectueuse.
La collection est impressionnante, c’est très naïf d’une qualité plastique très variable, suivant les villages ou les époques des styles, des motifs définissent comme des écoles. Aucune n’est signée très rares sont celles qui sont datées. Un travail d’artisan de la dévotion.
La « conservatrice » est une grenouille de bénitier que nous avons rencontré dans l’église orthodoxe du XVIIIème dont la structure est originale et les fresques de qualité. Elle nous l’a fait visiter et n’a pas manqué une génuflexion ou une succession des trois signes de croix conventionnels devant chaque relique ou peinture emblématique. Elle parlait un français plus que correct, était d’une speedeur rare, un peu austère et débordée par la tâche. Elle courrait de l’église au musée en fermant les portes à clés, tout en donnant des explications aux visiteurs qui arrivaient dans le désordre ce qui l’amenait à devoir reprendre sans cesse son discours à zéro. Et nous ne lui avons pas facilité la tâche puisqu’il lui fallut désormais le faire en deux langues.
Par chance les touristes Roumains n’étaient pas du tout intéressés. Ils restaient trois à cinq minutes dans l’église, et guère plus dans le musée dont le tarif d’entrée est dérisoire, même pour eux. Ils ne se sentaient donc même pas dans l’obligation de « rentabiliser » l’investissement.
Je suis lent, je ne comprends pas tout bien, j’ai besoin de temps. Nous sommes restés plus d’une heure dans le musée. Par chance un pope a pris le relais pour la visite de l’église et j’ai pu trainer tout mon saoul. Notre conférencière s’est peu à peu amadouée. Il faut dire qu’elle s’était mise en tête de donner le minimum d’explications à une famille de Polonais de passage. Elle alternait le français et le roumain. Elle s’appliquait à parler lentement et très distinctement, pensant qu’ainsi ces langues s’approcheraient du polonais. Les touristes n’osaient pas trop protester ni s’enfuir, mais on les sentait mal à l’aise et de toute façon fort peu intéressés par le sujet. La plus grande des filles de la famille était charmante dans son short ras du cul, affichant des nibards de belle tenu à moitié à l’air (le tissus est sans doute cher en Pologne ?). Je propose à notre guide d’utiliser cette jeune fille (?) comme intermédiaire, je traduirais en anglais et elle délivrera le message au reste de la famille dans sa langue natale. Elle est soulagée, sa mission civilisatrice passera encore une fois les frontières. Dans les premiers instants, la belle gosse traduisait en polak pour ses parents. Rapidement, deux minutes d’explication en anglais étaient résumées en dix mots de polonais. Puis elle cessa même de traduire. Lorsque je m’en étonnais, elle me répondit : « They dont’t care … ».
Au final, cette jeune fille était très polie en dépit de son cul à l’air. Elle semblait se foutre des explications autant que ses parents mais les écoutait avec philosophie. Sans doute une bonne élève à l’école ?
Toujours est-il que ma conférencière a été fort satisfaite de ma prestation et qu’elle a satisfait ma curiosité sur les icônes de verre sans plus aucune réticence.
J’ai une nouvelle copine à Sibiel.
Il fait très chaud et lourd.
Nous arrivons au village suivant afin de visiter une église fortifiée allemande dont les parties les plus anciennes datent du XIIIème. Elle est entourée d’un fort mur d’enceintes et de tours qui délimitent une vaste zone dans laquelle est installé le bâtiment et de nombreuses annexes. Un coquet gazon et des fleurs accueillent des camping-cars et des vans allemands. Ils campent ici. Nous parcourons les lieux, découvrons l’église avec ses livres de messe en allemand, visitons les tours, nous baladons sur l’ensemble du site.
Lorsque nous sortons, j’aperçois une billetterie, nous sommes rentrées par inadvertance dans l’enceinte par une porte qui n’était pas destinée au public. Je m’approche d’une femme au visage fermé afin de m’acquitter du droit d’entrée. Elle me rabroue et m’indique que le site est fermé à la visite ce jour. Je demande pourquoi, elle me répond un définitif « ‘cause it’s like that ». J’ai hésité à insister pour payer mais je n’ai pas voulu déranger.
Du coup nous avons laissé nos poubelles qui commençaient à fouetter sévère dans leur container à ordures.
Parfois on se dit qu’on a eu raison de gagner la seconde guerre mondiale. En même temps, l’a-t-on gagnée autant que ça ? Parfois on se demande …
Bon c’est pas le tout, on rentre dans Sibiu (150 000 habitants). Pour rassurer ceux qui se préoccupent du devenir climatique de la planète, tout ce cirque se passe sur un parcours de moins de 50 km.
La ville est super belle, on trouve un pansion proche du centre avec un parking pour Camion (si j’étais en Turquie j’écrirais pansyon, hum !).
Petit tour en ville, on dirait Vienne ou certaines zones de Prague, c’est bien rénové coquet, opulent, plein de touristes roumains et même quelques européens.
On se fait un resto de luxe, un des plus chers de la ville me semble-t-il, si on exclut ceux des hôtels internationaux pour business. Faut être honnête le repas était un peu moins gras qu’ailleurs.
Ouh j'ai été bavard !
Et encore vous ne lisez pas les hide faute de réagir !
Vous ne saurez pas ce que nous avons fait aujourd'hui arg arg arg ...
Rien relu, tout au fil de la plume soyez indulgent.
Confiteor- Messages : 9190
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Re: Conte rendu d'errance
Lu pour ma part du fond de lit, tard.
rendez-vous ici au prochain vlog.
bonne nuit.
ps. Pour les nouilles en mode bivouac, j'opte toujours pour la poele. Moins d'eau. Plus de surface de convection thermique. 10 minutes maxi. A tester...
.
rendez-vous ici au prochain vlog.
bonne nuit.
ps. Pour les nouilles en mode bivouac, j'opte toujours pour la poele. Moins d'eau. Plus de surface de convection thermique. 10 minutes maxi. A tester...
.
higeekomori- Messages : 3165
Date d'inscription : 20/03/2015
Re: Conte rendu d'errance
moi aussi je suis un overglandeur
Ah, les polonaises...
Ah, les polonaises...
cyranolecho- Messages : 4876
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Re: Conte rendu d'errance
06-08
Journée musée. Eprouvant …
Un immense palais 18ème et ses dépendances au centre-ville.
Je vous passe les détails, de la fort bonne peinture hollandaise et allemande de la meilleure époque Van Eyck, Brughel, Dürer, Cranach, etc.
Pas mal de peinture 17 et 18ème de toutes provenances. Du mobilier etc. Pas époustouflant mais ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas fait un marathon d’art.
Une expo intéressante dans le point de vue, la gravure au service de la vulgarisation des grands maîtres. Des reproductions de tableaux célèbres Caravage, Vinci, Raphaël, Poussin, etc. par des graveurs de l’époque ou postérieurs afin de rendre leur diffusion possible. Le challenge étant de rendre les lumières et les textures, pour la couleur on ne s’y hasarde pas !
Et puis la découverte d’un peintre allemand d’origine roumaine Bruno Maria Bradt https://www.tribuna.ro/stiri/actualitate/duplex-expozitional-bruno-maria-bradt-la-cabinetul-de-cartografie-si-muzeul-de-arta-contemporana-159037.html
Un virtuose du dessin au service de la transcription de la fragilité de la condition humaine restant pleine d’espoir. Très belle découverte, je peux aussi être sensible à la figuration si elle est dense.
Le musée est un sport de combat bien connu, 11 h – 17 h avec des pauses, rude néanmoins.
Un peu de balade dans le centre fort bien rénové, de belles façades ornées Sécession Viennoise, des bâtiments plus anciens baroques allemands, plaisant.
La bouffe roumaine est vraiment grasse.
Et les Roumains aussi, l’épidémie d’obésité est spectaculaire.
Journée musée. Eprouvant …
Un immense palais 18ème et ses dépendances au centre-ville.
Je vous passe les détails, de la fort bonne peinture hollandaise et allemande de la meilleure époque Van Eyck, Brughel, Dürer, Cranach, etc.
Pas mal de peinture 17 et 18ème de toutes provenances. Du mobilier etc. Pas époustouflant mais ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas fait un marathon d’art.
Une expo intéressante dans le point de vue, la gravure au service de la vulgarisation des grands maîtres. Des reproductions de tableaux célèbres Caravage, Vinci, Raphaël, Poussin, etc. par des graveurs de l’époque ou postérieurs afin de rendre leur diffusion possible. Le challenge étant de rendre les lumières et les textures, pour la couleur on ne s’y hasarde pas !
Et puis la découverte d’un peintre allemand d’origine roumaine Bruno Maria Bradt https://www.tribuna.ro/stiri/actualitate/duplex-expozitional-bruno-maria-bradt-la-cabinetul-de-cartografie-si-muzeul-de-arta-contemporana-159037.html
Un virtuose du dessin au service de la transcription de la fragilité de la condition humaine restant pleine d’espoir. Très belle découverte, je peux aussi être sensible à la figuration si elle est dense.
Le musée est un sport de combat bien connu, 11 h – 17 h avec des pauses, rude néanmoins.
Un peu de balade dans le centre fort bien rénové, de belles façades ornées Sécession Viennoise, des bâtiments plus anciens baroques allemands, plaisant.
La bouffe roumaine est vraiment grasse.
Et les Roumains aussi, l’épidémie d’obésité est spectaculaire.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
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Re: Conte rendu d'errance
07-08
Pas mal de trainer un peu dans un bon lit, douche confortable, etc.
Nous allons voir la suite de l’expo dans un autre lieu. C’est vraiment bien, ça m’a brassé.
Ballade dans les quartiers moins touristiques.
Un petit muséum d’histoire naturelle à l’ancienne.
L’exposition de la collection personnelle d’un galeriste, de la peinture roumaine seconde partie du 20ème. Pas éblouissant.
Le long des remparts, un petit marché aux « antiquités », un bien grand mot beaucoup de merdouilles modernes, un peu de came 20ème d’assez mauvaise facture et goût provenant d’Allemagne, Italie ou France à des prix très élevés.
La visite aurait été décevante si nous n’avions passé près d’une heure avec un marchand très plaisant qui nous a expliqué hésiter à venir en France pour acheter tant il s’y sent en insécurité. Long témoignage sur ce qu’il juge être une politique laxiste en matière d’immigration et de répression des incivilités et délits aboutissant à un climat anxiogène. Il compare notre « problème Arabe » avec leur « problème Gitan ». Il nous assure que la Roumanie restera toujours prête à l’accueil des réfugiés de notre type lorsque la situation deviendra explosive en France.
Je vous avais déjà dit qu’ils sont ultra sympas ici !
De fait nous nous sentons ultra en sécurité dans le pays, jamais un regard de travers ou agressif, des comportements systématiquement respectueux et courtois, pas de clochards dans les rues, ni de bande de jeunes au look et à l’attitude provocante.
Nous avons vu nos premiers policiers urbains … cet après-midi ! Deux mecs déambulant dans le centre et semblant totalement incongrus dans l’ambiance si sereine.
Notre antiquaire nous a confirmé la bonne santé économique de la ville, de nombreux investisseurs en particulier Allemands pour des raisons historiques, du tourisme roumain et étranger, du travail dans des secteurs porteurs. Il a utilisé le terme « ville émergente ». C’est exactement ce que nous avions ressenti.
Nos connaissances ont eu bien raison de nous mettre en garde contre les dangers des voyages en pays hostiles.
Pour être honnête nous n’avons pas encore traîné dans les banlieues des villes et ne savons pas quel en est le climat. Faudra bien qu’on s’y colle un de ces jours.
Ah ! et puis juste un truc marrant, nous dormons dans des lits jumeaux et séparés par un espace. C'est très étrange comme sensation, si peu commun.
Pas mal de trainer un peu dans un bon lit, douche confortable, etc.
Nous allons voir la suite de l’expo dans un autre lieu. C’est vraiment bien, ça m’a brassé.
Ballade dans les quartiers moins touristiques.
Un petit muséum d’histoire naturelle à l’ancienne.
L’exposition de la collection personnelle d’un galeriste, de la peinture roumaine seconde partie du 20ème. Pas éblouissant.
Le long des remparts, un petit marché aux « antiquités », un bien grand mot beaucoup de merdouilles modernes, un peu de came 20ème d’assez mauvaise facture et goût provenant d’Allemagne, Italie ou France à des prix très élevés.
La visite aurait été décevante si nous n’avions passé près d’une heure avec un marchand très plaisant qui nous a expliqué hésiter à venir en France pour acheter tant il s’y sent en insécurité. Long témoignage sur ce qu’il juge être une politique laxiste en matière d’immigration et de répression des incivilités et délits aboutissant à un climat anxiogène. Il compare notre « problème Arabe » avec leur « problème Gitan ». Il nous assure que la Roumanie restera toujours prête à l’accueil des réfugiés de notre type lorsque la situation deviendra explosive en France.
Je vous avais déjà dit qu’ils sont ultra sympas ici !
De fait nous nous sentons ultra en sécurité dans le pays, jamais un regard de travers ou agressif, des comportements systématiquement respectueux et courtois, pas de clochards dans les rues, ni de bande de jeunes au look et à l’attitude provocante.
Nous avons vu nos premiers policiers urbains … cet après-midi ! Deux mecs déambulant dans le centre et semblant totalement incongrus dans l’ambiance si sereine.
Notre antiquaire nous a confirmé la bonne santé économique de la ville, de nombreux investisseurs en particulier Allemands pour des raisons historiques, du tourisme roumain et étranger, du travail dans des secteurs porteurs. Il a utilisé le terme « ville émergente ». C’est exactement ce que nous avions ressenti.
Nos connaissances ont eu bien raison de nous mettre en garde contre les dangers des voyages en pays hostiles.
Pour être honnête nous n’avons pas encore traîné dans les banlieues des villes et ne savons pas quel en est le climat. Faudra bien qu’on s’y colle un de ces jours.
Ah ! et puis juste un truc marrant, nous dormons dans des lits jumeaux et séparés par un espace. C'est très étrange comme sensation, si peu commun.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Salut. Tu pourras donc a present lire "Les lits a une place" de Francoise Dorin. Te voila familiarise avec le decor. ^^
a demain.
.
a demain.
.
higeekomori- Messages : 3165
Date d'inscription : 20/03/2015
Re: Conte rendu d'errance
- oups:
- Vous baisez souvent ? Le camion remue beaucoup ?
Autre question pertinente [s'il en est], ça fait quoi de se promener en tant que riches dans ces contrées semble-t-il peu fortunées. De traiter les gens en plus de paresseux ?
"Je vole quelques photos à sa vigilance." *
Ouaouh... Ma lecture s'arrêtera là. Je juge ton périple de l'occidental et son mal-être de riche qui s'en va faire du tourisme (du voyeurisme ?) dans des contrées où il se permet de juger, de voler, tout en gardant sa place de riche.
Mi
Nable.
Sous couvert de regard intello cultivé.
Eh, espèce de bourgeois bohème, t'es vers chez toi, la Bohême !! Ça va, ça te fait du bien ?
Eh ! Espèce d'estranger ! Retourne dans ton pays ! La France a besoin de toi !
Va visiter les banlieues avec ton caravane. Va leur expliquer l'art soi-disant moderne. Va leur expliquer l'art contemporain. Va faire un peu d'anthropologie locale !
Va leur expliquer le budget de Beaubourg, ça va les consoler !
Et oui ! L'art, sous toutes ses formes subventionnées, ça sert à quoi, à part donner de l'occupation aux riches déprimés ? Et ces cons de roumains qui fichent rien ! Bande de branleurs !
Quand on voit les conséquences des occupations des occidentaux, ils feraient mieux de rien foutre ! Ils pollueraient moins !
Va donc visiter les vieux à côté de chez toi si tu t'emmerdes. Va leur raconter Cézanne et Picasso.
Edit. *Ah merde. J'aurais dû comprendre "je prends qques photos".
Dernière édition par ProfDeMaths le Dim 8 Aoû 2021 - 13:01, édité 2 fois
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- Quelles questions !!! T’es un peu con, non ? Pourquoi tu crois qu’ils traînent là bas précisément ?
Opium- Messages : 119
Date d'inscription : 13/09/2020
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- Moi je suis pas un peu con, je suis très con, plus con que bite en tout cas.
Traîner est sûrement le bon mot.
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- J'avais envie de signaler ton message ProfDeMaths, car je le trouve insultant et irrespectueux, digne d'un monologue de poivrot au café du commerce.
ça pue le mec aigri, le jaloux, ce que tu as écrit, j'imagine que ta vie doit pas être toute rose, voire une vie de merde, si ça explique, ça n'excuse pas tout.
Je ne cherche pas à "défendre" Confitéor, je sais qu'il le fera très bien tout seul, si c'est le cas tu vas te faire défoncer, sinon ce sera certainement que tu aura été jugé comme insignifiant, ce que tu es.
Je ne sais pas si tu es au courant, mais tu n'es pas obligé de cracher ta bile comme il se fait un peu partout sur internet ou d'émettre des jugements à l'emporte pièces, tu peux aussi passer ton chemin, et laisser ceux que ça intéresse en paix.
Enfin, au risque de me répéter, tu dois être bien malheureux pour réagir de la sorte.
Dernière édition par cyranolecho le Dim 8 Aoû 2021 - 13:16, édité 1 fois
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- C'est quoi cet argument du malheur... Genre condescendant.
Je suis en colère, ce n'est pas exactement la même chose.
Et quand bien même, je t'en prie, démonte mes arguments par MP, sinon tout ce que tu auras fait ce n'est que parler dans le vent.
J'ai remarqué, oui, que j'étais insignifiant. J'imagine que cette posture vaut à elle seule décrédibilisation aux yeux des imbéciles.
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
Ok. Ok.
Toutes mes confuses, mauvaise interprétation d'une phrase a donné lieu à une analyse erronée.
Bien, ayant je pense terminé ma réputation, je vous quitte .
Toutes mes confuses, mauvaise interprétation d'une phrase a donné lieu à une analyse erronée.
Bien, ayant je pense terminé ma réputation, je vous quitte .
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
- ok:
- Non, pas par MP, sous spoiler c'est bien plus amusant.
Tes arguments ou plutôt tes allégations sont de la mousse et tellement fragiles que je n'ose y toucher.
Le fait que tu me fasses pitié ne présume en rien que je puisse me croire supérieur à toi en quoique ce soit. Simplement tu fais pitié, autant que le chasseur qui prétend défendre la nature en la souillant.
La colère, oui, t'es juste aveugle, c'est bien ce que je veux dire, ce n'est pas vraiment ta faute.
Tu prétends donc que ton insignifiance est un leurre à imbéciles, oui, tu m'as bien leurré, je te pensais intelligent.
Si encore tu étais amusant, ce pourrait être sympathique, mais tu es simplement pathétique, avec tes blagues pas drôles.
Ah, je vois qu'il y a eu un incident technique, profdemaths a sauté, t'as du bol, j'avais pas fini. La paix enfin. Et qui que ce soit, Merci.
Ta réputation... non mais franchement, achète une vie.
PS: désolé si j'ai pourri le fil, cas échéant je peux effacer ce que j'ai écrit
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
Du coup je suis dispensé de répondre.
Mais je le ferai peut-être tout de même. Je ne veux rien justifier mais peut-être donner à comprendre.
Un premier élément déterminant et qui vous passionnera tous : notre libido est au mieux de sa forme, le sexe est aussi un loisir pour nous, innocent , gratuit et ne causant du tort à personne. D'aucun s'inquiétait pour les suspensions du Camion, louable préoccupation technique, elles sont taillées pour les pires pistes et résistent à mes assauts libidineux.
Pour le reste nous profitons de l'intimité de la nature, la plus intense, appuyé sur un rocher, adossé à un hêtre centenaire, les fesses caressées par la prairie alpine d'altitude. Les ours ont l'amour grognon parait-il, leur regard d'envie nous ravit.
Édit : Vos interventions m'ont fait du bien et je vous en remercie.
Généralement je suis totalement indifférent à la malveillance 2.0 mais étrangement PdM à réussi à me blesser. Non qu'il ait été particulièrement talentueux mais c'est un peu compliqué ces temps. Rien à voir avec la culpabilité du boomer occidental
Plutôt des odeurs d'égoût qui remontent de très très loin et qui hantent mes nuits. J'en sors fragile. Par périodes heureusement rares "elle" hante mes nuits.
C'est comme ça, on s'en fout.
Néanmoins j'ai beaucoup pleuré aujourd'hui et j'ai encore les larmes aux yeux.
Ça aurait pu être si bien ma vie si ...
Je ne suis ni fâché, ni révolté, ni envahi d'un sentiment d'injustice, seulement terriblement triste. Pour le gâchis.
Ce gâchis il est pour moi, mais aussi pour mon entourage dont j'ai compliqué l'existence, et pour vous tous, sans être présomptueux j'aurais pu faire de grandes choses et pas seulement de grandes conneries. C'était classe et original d'aller aussi loin dans le bordel, les transgressions, les dérives les explorations de territoires improbables. Mais un peu stérile et peu productif.
Je suis tellement triste de n'avoir su être que ce morceau de moi.
Il est si con ce PdM ...
Con de méchanceté autant que d'incompréhension. Ça fait beaucoup !
Heureusement M. est là.
Et cette nuit, je l'ai rejointe dans son petit lit. Et nous nous sommes serrés parce c'était impossible de s'entendre respirer et de ne pas être peua à peau.
Et nous avons bien entendu fait l'amour. Et ce matin a nouveau parce qu'elle voulait dormir encore un peu et qu'elle s'est dit que sans doute je somnolerais après.
Ça va chercher loin dans la tactique une fille.
Il est si con PdM ... c'est pour lui que c'est dommage.
Mais je le ferai peut-être tout de même. Je ne veux rien justifier mais peut-être donner à comprendre.
Un premier élément déterminant et qui vous passionnera tous : notre libido est au mieux de sa forme, le sexe est aussi un loisir pour nous, innocent , gratuit et ne causant du tort à personne. D'aucun s'inquiétait pour les suspensions du Camion, louable préoccupation technique, elles sont taillées pour les pires pistes et résistent à mes assauts libidineux.
Pour le reste nous profitons de l'intimité de la nature, la plus intense, appuyé sur un rocher, adossé à un hêtre centenaire, les fesses caressées par la prairie alpine d'altitude. Les ours ont l'amour grognon parait-il, leur regard d'envie nous ravit.
Édit : Vos interventions m'ont fait du bien et je vous en remercie.
Généralement je suis totalement indifférent à la malveillance 2.0 mais étrangement PdM à réussi à me blesser. Non qu'il ait été particulièrement talentueux mais c'est un peu compliqué ces temps. Rien à voir avec la culpabilité du boomer occidental
Plutôt des odeurs d'égoût qui remontent de très très loin et qui hantent mes nuits. J'en sors fragile. Par périodes heureusement rares "elle" hante mes nuits.
C'est comme ça, on s'en fout.
Néanmoins j'ai beaucoup pleuré aujourd'hui et j'ai encore les larmes aux yeux.
Ça aurait pu être si bien ma vie si ...
Je ne suis ni fâché, ni révolté, ni envahi d'un sentiment d'injustice, seulement terriblement triste. Pour le gâchis.
Ce gâchis il est pour moi, mais aussi pour mon entourage dont j'ai compliqué l'existence, et pour vous tous, sans être présomptueux j'aurais pu faire de grandes choses et pas seulement de grandes conneries. C'était classe et original d'aller aussi loin dans le bordel, les transgressions, les dérives les explorations de territoires improbables. Mais un peu stérile et peu productif.
Je suis tellement triste de n'avoir su être que ce morceau de moi.
Il est si con ce PdM ...
Con de méchanceté autant que d'incompréhension. Ça fait beaucoup !
Heureusement M. est là.
Et cette nuit, je l'ai rejointe dans son petit lit. Et nous nous sommes serrés parce c'était impossible de s'entendre respirer et de ne pas être peua à peau.
Et nous avons bien entendu fait l'amour. Et ce matin a nouveau parce qu'elle voulait dormir encore un peu et qu'elle s'est dit que sans doute je somnolerais après.
Ça va chercher loin dans la tactique une fille.
Il est si con PdM ... c'est pour lui que c'est dommage.
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
Pas mal ton système pour nettoyer ton poêle à essence. Ça correspond à ce qui se passe dans un cycle de nettoyage d'un filtre à particules sur un diesel moderne : on brûle du diesel pour augmenter la température et carboniser les impuretés. Sur une essence les gaz d'échappement sont suffisamment chauds pour détruire les impuretés par catalyse.
Bientôt plus d'essence, il faudra passer à l'électrique, et réinventer une manière de voyager.
Merci pour le voyage par procuration et bonne route à toi !
Bientôt plus d'essence, il faudra passer à l'électrique, et réinventer une manière de voyager.
Merci pour le voyage par procuration et bonne route à toi !
REGBEL- Messages : 342
Date d'inscription : 07/03/2017
Re: Conte rendu d'errance
Salut. Je viens juste de me reveiller. Pas chez moi. En nomadisme aussi mais pas aussi loin. Fait encoe tout noir dans la piaule. Et je voulais prendre un petit bout de "confit' " ure avant le petit dej.
Hébé qu'est ce que tu nous fais la, profdemath? qu'est ce qui t'arrive. Message qui aurait merite d'etre signale a la modo car effectivement. C'est une attaque. Tres decu pour ma part...
confit' riche? et meprisant, ou tu as vu ca?
un vrai riche ne se fait generalrment pas chier avec un rechaud a essence. Il va au carlton. Et dans un pays ou les gens peuvent eventuellement sucet led cailloux parce que rien manger, faut il soi meme sucer des cailloux pour etre digne d'etre a leur niveau? pensee d'integriste...
Hig
(Pas content)
.
Hébé qu'est ce que tu nous fais la, profdemath? qu'est ce qui t'arrive. Message qui aurait merite d'etre signale a la modo car effectivement. C'est une attaque. Tres decu pour ma part...
confit' riche? et meprisant, ou tu as vu ca?
un vrai riche ne se fait generalrment pas chier avec un rechaud a essence. Il va au carlton. Et dans un pays ou les gens peuvent eventuellement sucet led cailloux parce que rien manger, faut il soi meme sucer des cailloux pour etre digne d'etre a leur niveau? pensee d'integriste...
Hig
(Pas content)
.
higeekomori- Messages : 3165
Date d'inscription : 20/03/2015
Re: Conte rendu d'errance
Un peu stérile et peu productif... t'es vache avec toi.
Non seulement t'as pas à rougir vu que tu l'as bien gagné, en plus je pense que tes "ballades" à travers le monde ont fait un peu pour que l'étranger voie autre chose dans le touriste français qu'une vache à traire ou un colon. Tu pourras jamais savoir tout le bien que tu as apporté dans ton travail comme dans tes loisirs.
Là, je relis "oro" de Cizia Ziké (le salopard au coeur d'or) pour la xxxieème fois (je compte plus), c'est pas tout à fait la même, mais pareil, je voyage à chaque fois.
Faudrait que je retrouve un passage de Françoise Giroud où elle parle de "trous dans le coeur" avec lesquels il faut vivre, c'est assez magnifique.
Comme l'a dit REGBEL, merci pour ce voyage par procuration (surtout que la Roumanie, ça fait des années que j'ai envie d'y aller, j'ai quelques rudiments de langage, un peu oubliés, que tout petit je rêvais de ton camtar, avec un canoé en plus, mais que avec la famille que j'ai, et ai eue, c'est compliqué, même si c'est des sucres et que c'est largement moins compliqué que pour d'autres) .
Comment ça va les douleurs? D'être émerveillé ça fait diversion?
Non seulement t'as pas à rougir vu que tu l'as bien gagné, en plus je pense que tes "ballades" à travers le monde ont fait un peu pour que l'étranger voie autre chose dans le touriste français qu'une vache à traire ou un colon. Tu pourras jamais savoir tout le bien que tu as apporté dans ton travail comme dans tes loisirs.
Là, je relis "oro" de Cizia Ziké (le salopard au coeur d'or) pour la xxxieème fois (je compte plus), c'est pas tout à fait la même, mais pareil, je voyage à chaque fois.
Faudrait que je retrouve un passage de Françoise Giroud où elle parle de "trous dans le coeur" avec lesquels il faut vivre, c'est assez magnifique.
Comme l'a dit REGBEL, merci pour ce voyage par procuration (surtout que la Roumanie, ça fait des années que j'ai envie d'y aller, j'ai quelques rudiments de langage, un peu oubliés, que tout petit je rêvais de ton camtar, avec un canoé en plus, mais que avec la famille que j'ai, et ai eue, c'est compliqué, même si c'est des sucres et que c'est largement moins compliqué que pour d'autres) .
Comment ça va les douleurs? D'être émerveillé ça fait diversion?
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- Ma grand mère a toujours dit que si elle avait pas dû arrêter son école à 12 ans elle serait devenue Einstein (oui ma grand mère n’avait pas froid aux yeux, on évitait de les chauffer d’ailleurs ses yeux). Je me dis parfois que mon « non » m’a coûté cher. En même temps c’est si facile de se le dire après coup, de se retourner comme ça pour se juger froidement avec en main toutes les cartes de vie indisponibles au moment des choix cruciaux ou pas d’ailleurs. C’est trop facile.
Dernière édition par izo le Lun 9 Aoû 2021 - 18:34, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- Il est intéressant ton récit, le terme beau n'est sans doute pas adapté, puisque je parle en général et pas que le récit que tu offres ici.
Merci à toi de nous dépayser via écrans interposés.
Je dirais que si tu en viens à considérer les choix qui t'ont menés jusque-là, c'est qu'ils ont servi au moins à cela. Et il me semble bien que le "jusque-là" qui te concerne est quand même un beau quelque chose en soi.
_________________
INTJ, ne m'en veuillez pas si au passage, je vous écrase 6 fois le coeur. J'ai du mal à situer et le referai sans doute encore.
Opossum- Messages : 3887
Date d'inscription : 04/08/2019
Age : 47
Localisation : Belgique
Re: Conte rendu d'errance
- Spoiler:
- Confit’, pour la tristesse je t’offre un hug que tu affectionnes tant, convertible en une main sur l’épaule voire une grande tape amicale sur simple demande.
Cai verzi pe pereți- Spoiler:
- Romanian
Green horses on the walls (literally)
Meaning:
1) to have unrealistic expectations or dreams
2) to believe in a fantasy
3) to be too idealistic for your own good
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
- Moultou mechk:
- Attends... je voulais pas continuer de polluer, mais bon...
horses, donc y'en a au moins deux
sur des murs, donc faut qu'il y ait des murs
justement j'avais envie de me faire tatouer un truc un jour, mais c'est sacrément compliqué de trouver quelque chose de bien
to be too idéalistic for your own good...
c'est pur ça, c'est du sang, de la chair,
la jument verte
deux chevaux verte
PS: Mi La Ré
cyranolecho- Messages : 4876
Date d'inscription : 29/07/2015
Age : 53
Localisation : au pays de Candy... man
Re: Conte rendu d'errance
C'est bon j'ai récupéré.
C'est comme ça. On n'y peut rien. Les séquelles.
Lorsque ça survient je ne suis pas inquiet, c'est si banal que j'y suis habitué. Pas pour autant que c'est plaisant.
Je voulais vous mettre une photo du petit déjeuner mais pas de 4g
C'est comme ça. On n'y peut rien. Les séquelles.
Lorsque ça survient je ne suis pas inquiet, c'est si banal que j'y suis habitué. Pas pour autant que c'est plaisant.
Je voulais vous mettre une photo du petit déjeuner mais pas de 4g
Confiteor- Messages : 9190
Date d'inscription : 01/04/2017
Age : 65
Localisation : Drôme
Re: Conte rendu d'errance
J'ai commencé à lire.
C'est marrant, j'ai l'impression (pour faire une comparaison avec des pays que je connais) d'être quelque part entre le Laos et la Corée du Nord.
L'unicité ethnique est quelque chose qui m'avait fortement marqué en Pologne et en République Tchèque, dès la descente de l'avion. On quitte Charles de Gaulle qu'on a atteint avec le RER D, lieu cosmopolite s'il en est, pour descendre à Varsovie ou Prague entourés uniquement de blancs à tendance majoritairement blonde. Ca fait bizarre.
Même en Asie (DPRK exceptée, évidemment), on trouve dans les capitales une plus grande mixité de types.
C'est marrant, j'ai l'impression (pour faire une comparaison avec des pays que je connais) d'être quelque part entre le Laos et la Corée du Nord.
L'unicité ethnique est quelque chose qui m'avait fortement marqué en Pologne et en République Tchèque, dès la descente de l'avion. On quitte Charles de Gaulle qu'on a atteint avec le RER D, lieu cosmopolite s'il en est, pour descendre à Varsovie ou Prague entourés uniquement de blancs à tendance majoritairement blonde. Ca fait bizarre.
Même en Asie (DPRK exceptée, évidemment), on trouve dans les capitales une plus grande mixité de types.
fift- Messages : 8877
Date d'inscription : 26/04/2016
Age : 48
Localisation : Paris
Re: Conte rendu d'errance
Confit’ a écrit: Plutôt des odeurs d'égoût qui remontent de très très loin et qui hantent mes nuits. J'en sors fragile. Par périodes heureusement rares "elle" hante mes nuits.
C'est comme ça, on s'en fout.
Néanmoins j'ai beaucoup pleuré aujourd'hui et j'ai encore les larmes aux yeux.
Ça aurait pu être si bien ma vie si ...
Passage intéressant, de ta vulnérabilité. C’est beau lorsque c’est exprimé en toute sincérité.
Tu penses bien : On ne s’en fout pas! Tu ne t’en fous pas et c’est pas le genre de choses dont je me fous.
Cette tristesse elle colle donc à vie, c’est assez triste comme constat, on ne peut donc jamais s’en défaire? Ne pas la sublimer? La transformer donc? Pas de remplacement ? C’est une question qui me taraude depuis mes 10 ans, à me répéter « un jour, ce sera différent » alors je cherche des réponses chez les plus âgés. Tu es le second qui me confirme qu’on meurt avec … que même s’il y’a des périodes où ça n’handicape pas, ça reste un point fragile qui se réveille ça et là au gré du vécu.
La pirogue est souvent un moyen de se leurrer sur le fait que lorsqu’on change d’air, ça va aussi changer notre mood. Je l’ai cru aussi, je l’ai expérimenté, ça ne change rien à son état intrinsèque. Car le mal est fait. Les manques sont crées. L’impasse est permanente.
Il faut accepter. Mais ça, bonjour !
PS1 : g lu ton clin d’œil concernant la bouteille de vin, tu peux éviter, je veux m’éloigner de « tout ça ». N’oublie pas non plus que j’ai beaucoup trop souffert de l’alcoolisme de ma génitrice, j’en ai peut-être pas suffisamment parlé mais ce n’était rien de « léger », en tout cas, probablement pas le même alcoolisme que tu vis.
PS2 : je suis étonnée que PDM ait pu te toucher personnellement, il a crié sa propre souffrance, si tu rends à Cesar ce qui lui appartient, ça te rend juste triste pour lui.
PS3: On est à la PS5 mais je n’ai pas autant à dire.
Enjoy well !
Invité- Invité
Re: Conte rendu d'errance
Bon les affaires reprennent. On a du réseau ce soir et on s'est arrêté tôt.
Un peu d'incohérence dans le fil. Je reviens en arrière dans le récit, je parle de sujets déjà évoqués mais c'est plus structuré
08-08
Nous avons comme projet de visiter un ethno-musée à la sortie de la ville dans un immense parc arboré.
Erreur de débutant que je ne me pardonne pas : oublié que nous sommes dimanche. Toute la ville est venue se mettre au frais, c’est la foire d’empoigne, embouteillage, parking saturés, etc.
Je récidive. Contre toute forme de bon sens je décide de quitter les lieux en direction de la montagne proche par une vallée qui rejoint la « station de ski » où nous sommes passés quelques jours auparavant. Tous les lieux horizontaux sont occupés par des barbecues …
Nouvel acte manqué.
Je ne vais pas très bien ces jours. Je dors très mal, des cauchemars terriblement précis. Les séquelles de mon enfance. C’est banal, j’y suis habitué, ce n’en est pas pour autant fort désagréable. Ça survient par épisodes sans que je n’ai jamais identifié le déclencheur.
La contrariété d’avoir agi irrationnellement ajoutée à l’angoisse intense du SCPT qui s’est réveillé me plonge dans un profond désespoir. Sans raison objective. Ainsi est la vie à laquelle j’ai été contraint de m’accoutumer. Dans ces moments-là, j’ai un intense besoin de solitude, seule la présence de M. me rassure un peu. Je trouve une petite piste qui part dans la montagne, les familles aiment en général rester au bord de la rivière et dédaignent les alpages. Nous y trouverons du calme.
Voir une bande de potes insouciante échanger des banalités en buvant des bières et en grillant du cochon m’est terriblement douloureux. Je suis mis en face de mes singularités et de mes échecs. Il me faut fuir le monde et la nature m’apaise un peu.
Malchance, après quelques centaines de mètres, la route est fermée par une barrière cadenassée.
Cette dernière galère qui aurait été insignifiante dans un contexte ordinaire me dévaste. D’autant qu’un message aussi haineux que stupide sur les réseaux sociaux m’a blessé et que j’y repense en boucle. Généralement je suis totalement indifférent à la malveillance 2.0.
Et je sombre dans un désarroi intense.
Nous laissons la voiture devant la barrière, le demi-tour s’annonce laborieux, la route est étroite le coteau très pentu.
Nous partons à pied et marchons durant plusieurs heures sur la petite piste. Elle suit le torrent dans un sous-bois agréablement frais. Ce serait parfait n’était mon état …
La benzo fait peu à peu son effet et puis je me raisonne, ne pas s’inquiéter et ce convaincre que l’épisode sera comme toujours temporaire. Un immense désespoir m’envahit dans ces instants, une plongée dans un enfer noir et gluant, une tristesse indicible dont rien ne peut me distraire.
Ca faisait longtemps que le malaise n’avait pas été aussi intense. Je pleure beaucoup.
Il ne faudrait pas que l’on fasse tout ça à un enfant.
Au final, si on regarde avec un tout autre point de vue, on a fait une chouette balade sur cette route forestière qui se prolongeait par un sentier serpentant dans le cours du torrent. La température était idéale, le soleil versait des flaques de lumière entre les arbres. L’eau état si limpide que je n’ai pas hésité à me désaltérer, quelques bergeronnettes des ruisseaux nous accompagnaient. Nous avons marché quatre heure sans croiser personne hormis un étonnant personnage en scooter qui allait on ne sait où puisque le sentier finissait par se perdre dans le bois sans aboutir dans un lieu d’un quelconque intérêt.
Le demi-tour a été un peu laborieux mais pas épouvantable.
Calmé j’ai repris la cartographie numérique sous les yeux et avec un peu de bonne volonté j’ai trouvé un plan à moins de quinze kilomètres qui laissait espérer un point de bivouac agréable. La fin d’après-midi aidant, les citadins quittaient la fraicheur de la montagne. Même si la distance est assez courte, ils doivent rouler à très faible vitesse avec leurs voitures de ville sur les pistes caillouteuses et pleines de trous.
Nous trouvons un coin sympa bien qu’un peu dégueulasse puisque les Roumains sont passés par ici et y ont laissé tous leurs déchets comme la coutume l’exige. C’est le bord d’un fort ruisseau très sonore. La vallée s’élargit, quelques herbages sont occupés par des vaches occupées à parsemer le paysage de vastes bouses odorantes.
De l’autre côté de la rivière, cachés par des arbustes, un couple d’une bonne quarantaine est installé dans un fourgon vaguement aménagé. Ils campent là sans doute depuis quelques jours puisqu’ils ont pris soin d’aménager à l’aide de quelques pierres un trou d’eau pour un conserver au frais boissons et légumes. Je surveille l’homme du coin de l’oeil. Il ne quitte pas son fauteuil de camping, immobile devant une bière en boîte. Tout me laisse penser qu’il est confortable, bien dans ses tongs.
La femme alterne quelques activités « domestiques » et des séjours sur le siège qui lui fait face.
Pour me venger, je cuisine un sauté de porc fumé avec des carottes, des pommes de terre et des oignons. Nous le mangerons accompagné de vin roumain qui est en outre un assez bon anxiolytique.
Sur le soir, se pointe un berger qui vient récupérer les vaches qui chient consciencieusement autour de nous. Je lui propose un peu de palinka (gnôle de prune) qu’un copain agriculteur m’a donné il y a quelques jours.
Il accepte volontiers et me tient une longue conversation en roumain. Il est semble-t-il si con qu’il n’arrive pas à concevoir qu’un homme assez intelligent pour avoir à la fois une grosse bagnole et un stock l’alcool puisse ne pas parler sa langue.
Vite fait parce que c’est de l’information (et non une réponse à quelques inepties).
L’IDHI de la Roumanie est le même que celui du Portugal, qui ne passe pourtant pas pour un pays du Tiers Monde …
Par contre, si on examine l’IDH strict, le Portugal est au quarantième rang mondial alors que la Roumanie est au cinquante quatrième.
Autrement dit la Roumanie serait un pays dans lequel il ferait aussi bon vivre que le Portugal si la richesse y était mieux répartie. Ce n’est en aucun cas un pays pauvre ! Et je ne vous raconte pas l’arrosage de fonds structurels européens, le pays est couvert de panneaux vantant le mérite des projets ainsi financés.
Se balader en Roumanie comme nous le faisons n’est pas un étalage de richesse indigne (« minable »). Dans la réalité, le paysan qui vit en autosubsistance dans un village déserté voit ses compatriotes expatriés revenir chaque été et rouler en grosse berline allemande, rénover à grand frais la maison de famille et la meubler somptueusement. Il sait qu’en ville les gagnants de la mondialisation vivent plus que confortablement puisque leurs salaires sont alignés sur les standards européens dans un pays où un café coûte 40 centimes d’euro dans un bar de campagne et le kilo de viande de porc élevé en plein air moins de 5 euros.
Et sur les routes les Audi Q7 ou les 4x4 flambant neufs sont légions. J’ai toute raison de croire que mon vieux HZJ passe ici pour ce qu’il est : une vieille bagnole de l’ancien temps ! Une étrange particularité de notre époque moderne fait qu’il coûte fort cher … en France. Je n’imagine pas un Roumain échanger une vieille BM série 7 qui, chez-nous, aurait peine à trouver preneur pour 5000 € contre mon vieux Land Cruiser !
Au-delà, et dans le fond c’est plus important, dans les contacts que nous avons eu avec eux, les culs-terreux locaux m’ont semblé fort bien dans leur petite vie. Quelques vaches ou brebis, un jardin saisonnier, des céréales et le reste du temps la chasse, les champignons, la palinka avec les potes, pas si triste. Ils ne m’ont pas semblés envieux ou jaloux, bien au contraire à l’aise dans leur histoire pas ambitieuse. Et lorsqu’il leur fallait changer le vieux petit 4x4 Suzuki, souvent des Jimmy, ou faire quelques frais dans la maison, ils avaient un plan pour venir passer quelques mois à l’Ouest faire le manœuvre. Bien entendu ils sont exploités par les esclavagistes qui gèrent leurs contrats, mais, moyennant de trimer comme des bêtes douze heures par jour sur les chantiers, de leur aveu, tous frais déduits, il leur reste huit ou neuf cents euros en fin de mois. Et c’est une somme énorme ici dans les campagnes.
Ceux avec qui j’ai parlé semblaient presque rire des besoins des « gens de la ville », ils ne nous ont pas regardé comme des privilégiés, mais, il me semble et ce n’est pas une certitude, comme des gens qui cherchent la même simplicité de vie dans la nature et sont prêtes à partager un verre de vin avec un passant.
Bien entendu c’est « fake », je ne suis pas seulement cette personne. Je suis aussi cette personne et entre-temps suis empli de bien d’autres réalités.
Je ne sais pas jusqu’à quel point ils le perçoivent. Quand bien même ce serait le cas, je ne crois (?) pas que ce soit un souci.
Un peu d'incohérence dans le fil. Je reviens en arrière dans le récit, je parle de sujets déjà évoqués mais c'est plus structuré
08-08
Nous avons comme projet de visiter un ethno-musée à la sortie de la ville dans un immense parc arboré.
Erreur de débutant que je ne me pardonne pas : oublié que nous sommes dimanche. Toute la ville est venue se mettre au frais, c’est la foire d’empoigne, embouteillage, parking saturés, etc.
Je récidive. Contre toute forme de bon sens je décide de quitter les lieux en direction de la montagne proche par une vallée qui rejoint la « station de ski » où nous sommes passés quelques jours auparavant. Tous les lieux horizontaux sont occupés par des barbecues …
Nouvel acte manqué.
Je ne vais pas très bien ces jours. Je dors très mal, des cauchemars terriblement précis. Les séquelles de mon enfance. C’est banal, j’y suis habitué, ce n’en est pas pour autant fort désagréable. Ça survient par épisodes sans que je n’ai jamais identifié le déclencheur.
La contrariété d’avoir agi irrationnellement ajoutée à l’angoisse intense du SCPT qui s’est réveillé me plonge dans un profond désespoir. Sans raison objective. Ainsi est la vie à laquelle j’ai été contraint de m’accoutumer. Dans ces moments-là, j’ai un intense besoin de solitude, seule la présence de M. me rassure un peu. Je trouve une petite piste qui part dans la montagne, les familles aiment en général rester au bord de la rivière et dédaignent les alpages. Nous y trouverons du calme.
Voir une bande de potes insouciante échanger des banalités en buvant des bières et en grillant du cochon m’est terriblement douloureux. Je suis mis en face de mes singularités et de mes échecs. Il me faut fuir le monde et la nature m’apaise un peu.
Malchance, après quelques centaines de mètres, la route est fermée par une barrière cadenassée.
Cette dernière galère qui aurait été insignifiante dans un contexte ordinaire me dévaste. D’autant qu’un message aussi haineux que stupide sur les réseaux sociaux m’a blessé et que j’y repense en boucle. Généralement je suis totalement indifférent à la malveillance 2.0.
Et je sombre dans un désarroi intense.
Nous laissons la voiture devant la barrière, le demi-tour s’annonce laborieux, la route est étroite le coteau très pentu.
Nous partons à pied et marchons durant plusieurs heures sur la petite piste. Elle suit le torrent dans un sous-bois agréablement frais. Ce serait parfait n’était mon état …
La benzo fait peu à peu son effet et puis je me raisonne, ne pas s’inquiéter et ce convaincre que l’épisode sera comme toujours temporaire. Un immense désespoir m’envahit dans ces instants, une plongée dans un enfer noir et gluant, une tristesse indicible dont rien ne peut me distraire.
Ca faisait longtemps que le malaise n’avait pas été aussi intense. Je pleure beaucoup.
Il ne faudrait pas que l’on fasse tout ça à un enfant.
Au final, si on regarde avec un tout autre point de vue, on a fait une chouette balade sur cette route forestière qui se prolongeait par un sentier serpentant dans le cours du torrent. La température était idéale, le soleil versait des flaques de lumière entre les arbres. L’eau état si limpide que je n’ai pas hésité à me désaltérer, quelques bergeronnettes des ruisseaux nous accompagnaient. Nous avons marché quatre heure sans croiser personne hormis un étonnant personnage en scooter qui allait on ne sait où puisque le sentier finissait par se perdre dans le bois sans aboutir dans un lieu d’un quelconque intérêt.
Le demi-tour a été un peu laborieux mais pas épouvantable.
Calmé j’ai repris la cartographie numérique sous les yeux et avec un peu de bonne volonté j’ai trouvé un plan à moins de quinze kilomètres qui laissait espérer un point de bivouac agréable. La fin d’après-midi aidant, les citadins quittaient la fraicheur de la montagne. Même si la distance est assez courte, ils doivent rouler à très faible vitesse avec leurs voitures de ville sur les pistes caillouteuses et pleines de trous.
Nous trouvons un coin sympa bien qu’un peu dégueulasse puisque les Roumains sont passés par ici et y ont laissé tous leurs déchets comme la coutume l’exige. C’est le bord d’un fort ruisseau très sonore. La vallée s’élargit, quelques herbages sont occupés par des vaches occupées à parsemer le paysage de vastes bouses odorantes.
De l’autre côté de la rivière, cachés par des arbustes, un couple d’une bonne quarantaine est installé dans un fourgon vaguement aménagé. Ils campent là sans doute depuis quelques jours puisqu’ils ont pris soin d’aménager à l’aide de quelques pierres un trou d’eau pour un conserver au frais boissons et légumes. Je surveille l’homme du coin de l’oeil. Il ne quitte pas son fauteuil de camping, immobile devant une bière en boîte. Tout me laisse penser qu’il est confortable, bien dans ses tongs.
La femme alterne quelques activités « domestiques » et des séjours sur le siège qui lui fait face.
Pour me venger, je cuisine un sauté de porc fumé avec des carottes, des pommes de terre et des oignons. Nous le mangerons accompagné de vin roumain qui est en outre un assez bon anxiolytique.
Sur le soir, se pointe un berger qui vient récupérer les vaches qui chient consciencieusement autour de nous. Je lui propose un peu de palinka (gnôle de prune) qu’un copain agriculteur m’a donné il y a quelques jours.
Il accepte volontiers et me tient une longue conversation en roumain. Il est semble-t-il si con qu’il n’arrive pas à concevoir qu’un homme assez intelligent pour avoir à la fois une grosse bagnole et un stock l’alcool puisse ne pas parler sa langue.
Vite fait parce que c’est de l’information (et non une réponse à quelques inepties).
L’IDHI de la Roumanie est le même que celui du Portugal, qui ne passe pourtant pas pour un pays du Tiers Monde …
Par contre, si on examine l’IDH strict, le Portugal est au quarantième rang mondial alors que la Roumanie est au cinquante quatrième.
Autrement dit la Roumanie serait un pays dans lequel il ferait aussi bon vivre que le Portugal si la richesse y était mieux répartie. Ce n’est en aucun cas un pays pauvre ! Et je ne vous raconte pas l’arrosage de fonds structurels européens, le pays est couvert de panneaux vantant le mérite des projets ainsi financés.
Se balader en Roumanie comme nous le faisons n’est pas un étalage de richesse indigne (« minable »). Dans la réalité, le paysan qui vit en autosubsistance dans un village déserté voit ses compatriotes expatriés revenir chaque été et rouler en grosse berline allemande, rénover à grand frais la maison de famille et la meubler somptueusement. Il sait qu’en ville les gagnants de la mondialisation vivent plus que confortablement puisque leurs salaires sont alignés sur les standards européens dans un pays où un café coûte 40 centimes d’euro dans un bar de campagne et le kilo de viande de porc élevé en plein air moins de 5 euros.
Et sur les routes les Audi Q7 ou les 4x4 flambant neufs sont légions. J’ai toute raison de croire que mon vieux HZJ passe ici pour ce qu’il est : une vieille bagnole de l’ancien temps ! Une étrange particularité de notre époque moderne fait qu’il coûte fort cher … en France. Je n’imagine pas un Roumain échanger une vieille BM série 7 qui, chez-nous, aurait peine à trouver preneur pour 5000 € contre mon vieux Land Cruiser !
Au-delà, et dans le fond c’est plus important, dans les contacts que nous avons eu avec eux, les culs-terreux locaux m’ont semblé fort bien dans leur petite vie. Quelques vaches ou brebis, un jardin saisonnier, des céréales et le reste du temps la chasse, les champignons, la palinka avec les potes, pas si triste. Ils ne m’ont pas semblés envieux ou jaloux, bien au contraire à l’aise dans leur histoire pas ambitieuse. Et lorsqu’il leur fallait changer le vieux petit 4x4 Suzuki, souvent des Jimmy, ou faire quelques frais dans la maison, ils avaient un plan pour venir passer quelques mois à l’Ouest faire le manœuvre. Bien entendu ils sont exploités par les esclavagistes qui gèrent leurs contrats, mais, moyennant de trimer comme des bêtes douze heures par jour sur les chantiers, de leur aveu, tous frais déduits, il leur reste huit ou neuf cents euros en fin de mois. Et c’est une somme énorme ici dans les campagnes.
Ceux avec qui j’ai parlé semblaient presque rire des besoins des « gens de la ville », ils ne nous ont pas regardé comme des privilégiés, mais, il me semble et ce n’est pas une certitude, comme des gens qui cherchent la même simplicité de vie dans la nature et sont prêtes à partager un verre de vin avec un passant.
Bien entendu c’est « fake », je ne suis pas seulement cette personne. Je suis aussi cette personne et entre-temps suis empli de bien d’autres réalités.
Je ne sais pas jusqu’à quel point ils le perçoivent. Quand bien même ce serait le cas, je ne crois (?) pas que ce soit un souci.
Confiteor- Messages : 9190
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